"Pas de repos pour les braves": l'été très chargé de Gérald Darmanin, qui veut rester omniprésent dans les esprits

Gérald Darmanin à Nanterre le 31 juillet 2025 - Thomas SAMSON / AFP
Des vacances, quelles vacances? Pas question de lézarder au soleil au mois d'août pour le ministre de la Justice. Gérald Darmanin compte bien occuper le terrain pendant les prochaines semaines et a déjà commencé fin juillet en dégainant un projet de loi baptisé SURE comme "Sanction Utile, Rapide et Effective".
"C'est un grand classique. Tous les ans, il nous fait le coup de celui qui ne pose pas de vacances et c'est pareil aussi à Noël", sourit auprès de BFMTV le sénateur centriste Olivier Henno, voisin de circonscription.
"Pas de repos pour les braves", rit même franchement un élu Renaissance. Difficile de lui donner tort. Pendant ses 5 ans à l'Intérieur, le quadragénaire n'a que rarement pris des vacances. Le changement d'habitude sera donc pour une autre fois. Le garde des Sceaux va juste s'accorder quelques week-ends prolongés avec sa femme et ses deux fils. Gérald Darmanin ne s'en cache pas. Il a des ambitions présidentielles et n'entend pas perdre de temps dans la bataille de popularité engagée avec son collègue à l'Intérieur Bruno Retailleau.
Ainsi a-t-il lancé ce projet de loi qui vise à mettre fin au sentiment d'une "justice laxiste" et ce alors même que "la surpopulation carcérale n'a jamais été aussi élevée" et "la durée des peines prononcées n'a cessé de s'allonger". Et tant pis si son texte SURE suscite ainsi le scepticisme dans les rangs de la Justice.
"Est-ce qu'il y a un intérêt aujourd'hui à refaire une énième réforme sur une matière complexe qui n'arrête pas de changer? Nous n'en sommes pas certains", avance Alexandra Vaillant, la secrétaire générale de l'Union syndicale des magistrats.
François Bayrou, dont le destin à Matignon pourrait se fracasser sur la censure des budgets à l'Assemblée nationale à l'automne, n'est visiblement pas pressé de s'emparer de ce projet de loi. Si Gérald Darmanin aurait bien vu son projet de loi débattu dès le retour des députés dans l'hémicycle, probablement à la mi-septembre, le ministère des Relations avec le Parlement a mis le holà. Il faut dire que plusieurs mesures de son texte pourraient susciter la colère de la gauche comme l'instauration de peines minimales qui ne respecterait pas le principe de l'individualité des peines ou encore la fin du sursis pour toutes les personnes déjà condamnées par la justice.
"Si on pouvait éviter de se fracasser dès la rentrée sur un projet de loi que personne n'attend et avancer sur les négociations avec la gauche pour faire passer nos budgets", lance un député Modem.
Le projet de loi devrait malgré tout arriver au Sénat en novembre prochain, là où il devrait être adopté à une large majorité, avant d'arriver à l'Assemblée au début de l'année 2026. Bref, une éternité dans un hémicycle très instable.
"Rester incontournable"
Mais au fond, peu importe. Depuis des semaines, l'entourage de Gérald Darmanin explique que le ministre n'a qu'une obsession, celle de "bosser et servir les Français", d'"aller très vite pour eux". Avec de vrais résultats à mettre au crédit du ministre: en quelques mois, le Parlement a adopté la proposition de loi contre le narcotrafic, bien aidé par le fait qu'elle venait à la fois de la droite et de la gauche sénatoriale. Le ministre de la Justice peut aussi se targuer d'avoir réussi à lancer en seulement 150 jours la toute première prison de haute sécurité contre les trafiquants de drogue les plus dangereux.
"Dans un contexte politique comme le nôtre où on a l'impression qu'on est dans la mélasse, ce n'est pas rien quand même", se félicite Alexandre Vincendet, maire de Rillieux-la-Pape et proche du ministre de la Justice.
Et comme faire ne suffit pas toujours, Gérald Darmanin n'oublie pas non plus l'événement incontournable pour tous les aspirants à la présidence de la République: une rentrée politique en bonne et due forme.
Un an après le lancement de son mouvement Populaires, retour le 31 août prochain à Tourcoing, la ville dont il a été longtemps maire et qui a affronté plusieurs rodéos et émeutes ces dernières semaines.
Autour de saucisses, de frites et de bières et d'un raout en bonne et due forme, plusieurs ténors du socle commun pourraient être présents comme un autre présidentiable Édouard Philippe, avec qui Gérald Darmanin aime s'afficher ces derniers mois. Mais aucun discours autre que celui de Gérald Darmanin n'est pour l'instant prévu, façon de rappeler qu'il ne compte pas s'effacer, en tout cas pas immédiatement, derrière le maire du Havre, pour 2027.
"Gérald Darmanin est face à une équation très difficile. Soit il va à la présidentielle sur son nom, soit il rejoint Édouard Philippe et là, il devra trouver sa place dans son dispositif. Sa rentrée politique vise à montrer qu'il reste incontournable" à droite et pour le centre, poursuit l'ex-député Alexandre Vincendet.
De quoi pousser Gérald Darmanin à multiplier les propositions, comme il l'a déjà fait sur sa "préférence aux travailleurs", qui n'est pas, selon lui, la "préférence nationale" défendue par Marine Le Pen, ou encore "un nouveau modèle de capitalisme" pour "avoir des salariés heureux". Face à cette stratégie d'occupation du terrain mediatico-politique, un député macroniste conclut par cette analyse : "Il va falloir qu'il frappe très très fort pour qu'on en retienne quelque chose."