Fillon se donne trois semaines pour prendre conseil sur le niqab

PARIS - François Fillon n'exclut pas de demander l'urgence pour interdire le voile intégral mais n'annoncera son choix que le 19 mai, lors de la...

PARIS (Reuters) - François Fillon n'exclut pas de demander l'urgence pour interdire le voile intégral mais n'annoncera son choix que le 19 mai, lors de la présentation du texte en conseil des ministres, déclare le président de l'Assemblée nationale Bernard Accoyer.

Avant la présentation de la loi d'interdiction totale du voile intégral, voulue par Nicolas Sarkozy, le Premier ministre souhaite consulter les dirigeants religieux et politiques français, a dit Matignon.

"Il n'y a pas d'urgence à trancher sur l'urgence", a-t-on dit dans l'entourage du Premier ministre.

Les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, opposés à la procédure d'urgence, ont eu le sentiment d'être entendus lors d'un entretien avec François Fillon en fin de journée.

"Le Premier ministre nous a prêtés une oreille beaucoup plus qu'attentive", a dit Bernard Accoyer. "Le chef du gouvernement souhaite que les textes qui sont les textes gouvernementaux soient applicables, soient acceptés le plus largement possible, soient solides juridiquement", a-t-il ajouté.

Le président du Sénat Gérard Larcher, sorti peu avant, s'est contenté de lancer aux journalistes: "Vous voyez, j'ai gardé le sourire."

La procédure d'urgence, rebaptisée "procédure accélérée" en 2009, permet de faire adopter des lois rapidement, chaque assemblée n'examinant le texte qu'une seule fois. L'opposition de gauche estime que le gouvernement en abuse.

"QUESTION SENSIBLE"

"Le temps nécessaire sera dégagé" pour la recherche d'un consensus républicain et d'un texte applicable et solide juridiquement, a affirmé Bernard Accoyer.

"Le Premier ministre consulte dans la sérénité sur cette question sensible, plus complexe qu'il n'y paraît. Il n'agit pas dans la précipitation", a dit le président de l'Assemblée nationale.

Après les représentants des communautés juive et musulmane de France, François Fillon recevra dans la semaine le président de la Conférence des évêques de France, le cardinal André Vingt-Trois, et le président de la Fédération protestante de France, le pasteur Claude Baty.

Il demandera la semaine prochaine aux dirigeants des partis politiques leur avis sur cette loi, que la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie a pour mission de rédiger.

Lundi matin, le Conseil français du culte musulman (CFCM), défavorable au voile intégral comme à une loi interdisant son port, a déploré auprès du Premier ministre un climat de stigmatisation de l'islam.

Selon un communiqué des services du Premier ministre publié après l'entrevue, François Fillon "a insisté sur la nécessité d'éviter les amalgames et les préjugés qui donnent une image déformée de l'islam de France".

Le débat sur le voile intégral a pris un nouveau tour depuis la fin de semaine dernière.

Une femme portant un niqab a annoncé avoir été verbalisée pour avoir conduit vêtue d'un voile qui, selon la police, contrevient aux règles de sécurité du code de la route.

Le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, a demandé que l'on envisage de déchoir son compagnon de la nationalité française en raison de sa présumée polygamie. Liès Hebbadj, né à Alger, a démenti être polygame, admettant seulement avoir des maîtresses.

Bernard Accoyer a demandé que cela ne vienne pas polluer le débat sur le voile intégral. "Une chose à la fois et si les choses le méritent", a-t-il lancé.

Clément Guillou, édité par Yves Clarisse