Le prélèvement de l'impôt à la source, un casse-tête politique pour Macron

Emmanuel Macron en visite en Grèce, ce jeudi 7 septembre. - Yorgos Karahalis - AFP
Verra-t-on le prélèvement de l'impôt à la source mis en place en janvier 2019 comme l'Elysée l'avait annoncé il y a un an? Rien n'est moins sûr. Selon le Canard enchaîné paru mercredi, Emmanuel Macron hésite à reporter cette mesure: le chef de l'Etat se donne encore 15 jours pour se décider. "L'objectif d'une mise en place le 1er janvier 2019 est maintenu, mais nous nous laissons la possibilité de le décaler", affirme l'Elysée aux Echos. Du côté de Matignon, cité par Le Monde, on explique "poser les jalons un à un, et en septembre on appuiera sur le bouton si tout continue d'aller bien". Des déclarations qui confirment que le doute est bien là.
En voyage officiel à Helsinki, le chef de l'Etat a confirmé être "plutôt pour la réforme". "Mais je veux voir en détail ce que ça veut dire pour chaque citoyen (...) Il est normal que nous nous assurions que tous les détails sont clairs", avant de la lancer.
"Tout fonctionne", assure Darmanin
Entre temps, le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin, chargé du service après-vente de la mesure, a démenti tout doute et report. Jeudi, il s'est de nouveau voulu rassurant: à BFMTV, il a assuré "fai[re] le point chaque mois avec le président de la République et le Premier ministre pour que tout soit prêt pour la mise en oeuvre du prélèvement à la source en janvier 2019. Tout fonctionne et j’aurai l’occasion de leur démontrer lors de notre prochain point."
"Nous ferons le prélèvement à la source. Simplement il est légitime que le Premier ministre prenne toutes les précautions nécessaires pour s'assurer" que cette réforme "se fasse dans les meilleures conditions", a indiqué pour sa part le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
Lancée sous le quinquennat de François Hollande, la réforme a déjà été reportée d'un an lors de l'arrivée d'Emmanuel Macron à l'Elysée. Outre une mise en œuvre compliquée d'un point de vue technique, elle comporte plus d'un risque, et notamment celui de donner l'impression aux Français de perdre du pouvoir d'achat, alors que la croissance peine à retrouver son élan.
L'importance du pouvoir d'achat
En tout, 38 millions de foyers fiscaux sont concernés. Et l'opposition n'est pas en reste sur ce dossier: "La fiche de paie sera amputée de l'impôt", avertit Eric Woerth, président de la commission des finances, qui dénonce sur BFMTV une mesure "pas utile" et "dangereuse". Dans le sondage "L'Opinion en direct" d'Elabe pour BFMTV, le pouvoir d'achat est cité comme préoccupation numéro 1 des Français.
Dans Le Monde, la députée La République en marche de l'Isère, Cendra Motin, qui a travaillé sur la question, rassure: "il s'agira de montants supportables", affirme-t-elle, citant en exemple des sommes comme "20 à 60 euros pour tout un tas de métiers de l'artisanat".
Pourtant, l'appréhension est bien là au sein de l'exécutif. D'autant qu'un report de la mesure représenterait un désaveu pour Gérald Darmanin. Après l'annonce retentissante du départ de Nicolas Hulot du gouvernement, Emmanuel Macron n'a pas intérêt à mettre en danger l'équilibre de son équipe, suffisamment remis en question ces derniers temps. Après l'affaire Benalla, la croissance en berne et la démission de Nicolas Hulot, la rentrée s'annonce décidément sensible pour Emmanuel Macron.