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Droits de douane: l'étonnant silence d'Emmanuel Macron après l'accord avec Donald Trump

Emmanuel Macron et Donald Trump le 24 février 2025 à la Maison Blanche

Emmanuel Macron et Donald Trump le 24 février 2025 à la Maison Blanche - Jim WATSON / AFP

Depuis l'annonce d'un accord entre l'Union européenne et les États-Unis pour la mise en place de tarifs douaniers à hauteur de 15% sur les produits européens, Emmanuel Macron a préféré garder le silence. Ce contrat avec Donald Trump est pourtant jugé défavorable à l'économie européenne, y compris parmi les propres partisans du chef de l'État.

Emmanuel Macron, d'habitude si prompt à commenter l'actualité internationale, aurait-il du mal à trouver ses mots? Plus de 48 heures après l'annonce d'un accord entre l'Union européenne et l'administration de Donald Trump sur les droits de douane, le président de la République n'est pas sorti du bois.

C'est pourtant une addition salée pour la France qui a été signée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Concrètement, les tarifs douaniers des produits européens envoyés sur le sol américain vont augmenter pour se monter désormais à 15%, à l'exception de quelques secteurs comme l'aéronautique.

Un deal accueilli plus que tièdement, provoquant même une rare sortie du Premier ministre François Bayrou, manifestement inquiet des conséquences de cet accord sur l'économie française.

"C'est un jour sombre que celui où une alliance de peuples libres, rassemblés pour affirmer leurs valeurs et défendre leurs intérêts, se résout à la soumission", a déploré le chef du gouvernement, adoptant un ton amer inhabituel.

Les réactions mécontentes furent nombreuses du côté des oppositions, y compris du côté de La France insoumise qui a pourtant longtemps défendu le protectionnisme, loin d'une vision d'une économie débarrassée de toutes ses barrières.

"Tout a été cédé à Trump", a ainsi pesté Jean-Luc Mélenchon dès le 27 juillet. Tandis que Marine Le Pen, elle, lit dans cet accord un "fiasco politique, économique et moral" et demande à "la macronie" de "reconnaître ce cuisant échec".

"Ne pas se fâcher" avec Donald Trump

Emmanuel Macron préfère donc faire profil bas. Le chef de l'État a eu beau se retirer (un peu) de la scène intérieure, il ne se prive pourtant jamais d'intervenir sur les sujets internationaux, que ce soit sur la guerre en Ukraine, la situation catastrophique à Gaza, et même les droits de douane infligés par Donald Trump, avant la conclusion de l'accord... mais pas depuis. Contacté, l'Élysée n'a pas donné suite à nos sollicitations.

"Il ne veut probablement pas fâcher Donald Trump alors que beaucoup reste encore à négocier. La diplomatie économique se joue aussi de silence pour faire retomber la pression", observe un ancien ministre d'Emmanuel Macron qui connaît bien le dossier, auprès de BFMTV.

L'Union européenne continue en effet de négocier la liste des produits exemptés avec l'administration américaine. La France espère notamment que les vins et les spiritueux ne soient pas touchés par cette hausse des droits de douane. Même topo pour le secteur pharmaceutique.

La publication de la liste définitive des exemptions devrait intervenir d'ici vendredi, suscitant potentiellement à ce moment-là une prise de parole d'Emmanuel Macron.

"La négociation n'est jamais terminée avec Donald Trump", avance de son côté l'ancien ministre de l'Agriculture d'Emmanuel Macron Stéphane Travert qui imagine bien le président français jouer la carte de "son droit de veto".

Si la Commission européenne a reçu un mandat pour négocier, l'accord doit encore être avalisé par une grande partie des États-membres. À cette occasion, le président français pourrait alors tenter de bloquer les négociations, en dégainant donc son veto, ou jouer la montre, en faisant durer les discussions entre pays européens.

Tenter de convaincre les pays d'Europe de l'Est

Quant à faire changer d'avis les pays les plus favorables à cet accord, notamment les pays d'Europe de l'Est qui dépendent toujours de l'alliance transatlantique, l'idée est forcément dans un coin de la tête du chef de l'État.

"On a des cartes en main et on peut vraiment faire évoluer les perspectives des uns et des autres quand ils auront fait leurs calculs, y compris dans des pays qui ne veulent pas se fâcher avec les États-Unis", avance un ex-ministre d'Emmanuel Macron.

Quant à l'ancien locataire de Matignon, Gabriel Attal, en froid depuis des mois avec le chef de l'État, il appelle dans les colonnes du Figaro à arrêter de "théoriser notre propre impuissance" et à "bâtir notre propre puissance".

Tom Kerkour et Marie-Pierre Bourgeois