Ultime débat des européennes: Nathalie Loiseau ciblée par la totalité de ses adversaires

Ce n'était pas un guet-apens, mais presque. Face à ses dix adversaires ce jeudi soir, la tête de liste de La République en marche aux élections européennes a eu beaucoup de mal à se faire entendre. Seule à porter, au fond, le bilan de ces deux dernières années de présidence d'Emmanuel Macron, Nathalie Loiseau a été mise en difficulté à de nombreuses reprises à l'occasion de l'ultime débat, diffusé ce jeudi soir sur notre antenne.
Dès la première partie de cette confrontation à onze, l'ancienne ministre des Affaires européennes s'est vue reprocher certaines décisions prises depuis l'élection présidentielle. Politique industrielle, travailleurs détachés, transition écologique... Sur tous ces sujets, Nathalie Loiseau a fait office de paratonnerre. Ian Brossat, chef de file des communistes aux élections européennes, a été l'un des premiers à dégainer:
"Mme Loiseau (...) se découvre une conscience sociale. Vous avez été au gouvernement pendant deux ans. Vous avez baissé l'APL, vous avez gelé les retraites, vous avez gelé les allocations familiales, et subitement vous nous expliquez que vous allez devenir la championne du social au Parlement européen! Excusez-moi, mais c'est une plaisanterie."
Attaquée de toutes parts
Après coup, la candidate LaREM a subi une violente charge de la part de son adversaire d'Europe Écologie-Les Verts, Yannick Jadot, sur le sujet de Nicolas Hulot. Nathalie Loiseau a reproché au candidat EELV d'accuser l'ancien ministre de la Transition écologique d'être aux mains des lobbies.
"Souvenez-vous Madame, de Nicolas Hulot à la radio disant que votre majorité et votre gouvernement étaient gangrenés par les lobbies", lui a-t-il asséné en retour.
Dans la foulée, c'est sur le sujet de la difficile reprise d'Ascoval que l'ex-locataire du Quai d'Orsay a subi un tir de barrage, notamment en provenance de Ian Brossat et de Benoît Hamon. À tel point que le président et candidat de l'UDI, Jean-Christophe Lagarde, s'est permis de prendre la défense de Nathalie Loiseau (ce qu'elle a peu apprécié). Le dirigeant centriste a en revanche taclé sa concurrente sur la question du Smic européen, une "fausse histoire" selon lui.
"Vous nous laissez crever!"
La tête de liste LaREM, qui n'aura pas vécu une campagne facile, a ensuite eu maille à partir avec Manon Aubry, son homologue de La France insoumise. Celle-ci reprochait à Nathalie Loiseau, et à travers elle au gouvernement d'Édouard Philippe, son manque d'ambition environnementale.
"Je veux une écologie efficace, crédible", a développé l'ex-ministre, ce à quoi l'ancienne porte-parole d'Oxfam France a répondu: "Oui, comme ça vous nous laissez crever!"
Ne se laissant pas faire, Nathalie Loiseau a tenté de défendre ses positions, tout en étant régulièrement interrompue par Manon Aubry. "Je vous répondrai comme j'ai envie de vous répondre", lui a rétorqué à un moment la juppéiste.
"Je peux termine une phrase?!"
C'est sur le thème de l'immigration et des frontières, toutefois, que la candidate macroniste a traversé la plus forte zone de turbulence. Expliquant qu'elle serait prête, sous condition, à accueillir un nouvel "Aquarius" (à savoir, un navire portant secours à des migrants en mer Méditerranée), Nathalie Loiseau a été attaquée d'emblée par la totalité des candidats de gauche. Au cœur de leurs reproches: la décision du gouvernement de ne pas permettre à l'Aquarius, à l'été 2018, d'accoster sur les côtes françaises.
Inaudible, l'échange a dû être interrompu afin que l'intéressée puisse répondre:
"Mais enfin, je peux terminer une phrase?! Vous êtes vraiment la campagne 'contre' qui ne sait que hurler et critiquer!"
"Mais c'est vous qui étiez contre quand vous étiez au pouvoir", lui a rétorqué Ian Brossat. La charge la plus virulente est venue de Raphaël Glucksmann, candidat adoubé par le Parti socialiste.
"Vous vous dites écologiste et vous choisissez les chasseurs contre Nicolas Hulot. Maintenant vous vous dites humaniste, alors que vous avez fermé vous-même les ports français à l'Aquarius. (...) À un moment, Madame Loiseau, il faudra mettre les gestes en concordance avec les mots. Sur l'Aquarius, la France s'est ridiculisée! Elle a bafoué son honneur", a-t-il tonné.
"Marketing électoral"
Au cours de cette étrange campagne, l'un des bras de fer remarqués fut celui, intermittent, entre Nathalie Loiseau et François-Xavier Bellamy, le jeune philosophe choisi par Laurent Wauquiez pour porter les couleurs des Républicains.
Ce jeudi soir, les deux adversaires ont eu une joute très amère portant sur l'élargissement de l'Union européenne aux pays des Balkans. En début de semaine, le candidat LR a accusé Emmanuel Macron de vouloir intégrer la Roumanie à l'espace Schengen. Le lendemain, Nathalie Loiseau a balayé cette accusation, la qualifiant de mensongère.
L'option a pourtant bien été défendue dans un premier temps par le chef de l'État, dans son discours de Bucarest du 24 août 2017. Elle a été visiblement abandonnée lorsque "la remise à plat de l'espace Schengen" est devenue, cette année, une priorité du gouvernement.
"Vous pouvez nous dire aujourd'hui que le président de la République a changé d'avis. Vous pouvez nous dire aujourd'hui, vous ne partagez pas l'avis du président de la République'. Vous n'avez pas le droit de nous dire que nous mentons lorsque nous ne faisons que rappeler la position du président de la République en exercice il y a seulement quelques mois", a égrené François-Xavier Bellamy, agacé par les propos de Nathalie Loiseau.
Et l'élu versaillais de conclure: "C'est cette confusion qui piège le débat dans lequel nous sommes aujourd'hui. (...) Cette stratégie du 'en même temps', c'est du marketing électoral et ça piège la démocratie."