"Ça va flinguer": tombé à 8,5% aux européennes, LR se divise déjà
Même dans leur fourchette basse, les cadres des Républicains n'envisageaient pas une telle déception. Ce dimanche 26 mai, la liste conduite par François-Xavier Bellamy obtient 8,4% des suffrages aux élections européennes selon notre dernière estimation Elabe. Un effondrement pour la droite, deux ans après une présidentielle qui a vu son candidat éliminé du second tour pour la première fois dans l'histoire de la Ve République. Le 23 avril 2017, François Fillon recueillait 20% des voix, et ce malgré les affaires judiciaires qui avaient largement obéré sa campagne.
"La droite traverse une crise profonde, tout est à reconstruire", a déclaré à l'AFP la tête de liste LR, qui fera partie des 7 à 10 élus qu'enverra le parti de Laurent Wauquiez au Parlement européen. La République en marche, avec ses 22,4%, caracole loin devant. Le président du Sénat, Gérard Larcher, a publié un communiqué dans lequel il résume froidement la situation: "Disons la vérité, c'est un échec pour notre liste."
"Notre mouvement devra repenser sa ligne politique, il devra rassembler plus largement", a-t-il mis en garde, appelant à "exprimer plus clairement la diversité qui le compose".
Séduisante, la candidature Bellamy flanche
Chacun tente donc de faire profil bas, tout en annonçant des lendemains difficiles. À tout le moins, ce score - le pire jamais enregistré par la droite française à une élection européenne depuis 1979 - montre que la candidature Bellamy, malgré l'attrait qu'elle a pu susciter auprès des cadres de LR, n'a pas fait mouche.
"On a été victime du vote utile des retraités et des CSP+", constate pour BFMTV.com le député LR de l'Essonne Robin Reda.
Contrairement au sentiment que semblaient traduire les nombreux ralliements enregistrés dans les dernières semaines de la campagne, la droite - surtout son électorat - n'est pas ressoudée. Ce dimanche soir, les leaders du parti n'ont qu'un mot à la bouche, le "rassemblement".
"Si on ne revoit pas tout, du sol au plafond, on peut disparaître", a prévenu le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau, invité de notre antenne. Pour éviter ce destin funeste, chaque ténor y va de sa petite idée; davantage d'écologie, de ruralité, de social, moins de sociétal, d'identité, d'euroscepticisme. En clair, amender la ligne imposée par Laurent Wauquiez depuis son accession à la présidence du parti fin 2017.
Une démission demandée
Durant son intervention sur notre plateau, Bruno Retailleau a bien pris soin de citer Gérard Larcher, Valérie Pécresse, Christian Jacob et François-Xavier Bellamy comme éléments essentiels pour rénover la ligne et le "projet" de LR. Laurent Wauquiez, qui affichait la tête des mauvais jours lors de son allocution, n'a été mentionné par l'ex-proche de François Fillon qu'après coup. "Je ne vois pas pourquoi Laurent Wauquiez n'y participerait pas", s'est-il contenté de déclarer. D'autres rappellent opportunément l'exemple de 1999, lorsqu'un Nicolas Sarkozy sèchement battu aux européennes avec 12,8% avait quitté son poste de président du RPR quelques mois après.
"Laurent Wauquiez a été le chat noir de la droite, dans cette élection", a résumé un élu LR auprès de BFMTV.com. Un cadre du parti annonce, lui, un "grand bazar" dans les mois qui viennent:
"Ça va flinguer. Je pense que Laurent va se bunkeriser et tirer sur les diviseurs", ajoute-t-il.
Sur Europe 1, le député LR Eric Diard demande même une démission de Laurent Wauquiez. Le parlementaire des Bouches-du-Rhône aimerait qu'il "prenne ses responsabilités".
Les barons aiguisent leurs couteaux
Dès lundi matin, la présidente de la Région Île-de-France, Valérie Pécresse, sera l'invitée de la matinale de RTL. L'occasion pour cette opposante résolue au patron de LR de (re)faire entendre sa différence, après avoir mis en sourdine ses inimitiés le temps de la campagne. Autre voix à surveiller, celle de Xavier Bertrand, qui a quitté le parti mais qui pourrait potentiellement s'associer à une initiative visant à remettre en cause le leadership de Laurent Wauquiez sur la droite. Notamment en vue des municipales de 2020, qui s'annoncent beaucoup plus difficiles que prévu.
"Les maires LR sortants auront besoin des électorats de LaREM et de LR. Ils auront intérêt à ne pas arbitrer et à choisir un label élargi. Ils se battront pour ne pas avoir un autre candidat de droit et du centre en face, mais ils ne revendiqueront pas d'étiquette", décrypte un élu en vue.
Et de conclure: "Donc Wauquiez dirigera un parti vide."