Avant La France insoumise, la longue histoire des perquisitions de partis politiques

- - Eric FEFERBERG / AFP
Jean-Luc Mélenchon n’en démord pas. Vendredi, lors d'une conférence de presse, le leader de La France insoumise est revenu sur les perquisitions opérées mardi à son domicile, ainsi qu'au siège de son mouvement et chez certains de ses collaborateurs, dans le cadre d’enquêtes sur ses comptes de campagne présidentielle et sur les assistants de certains eurodéputés de son parti.
Après avoir dénoncé "une manœuvre politique", le député des Bouches-du-Rhône s'est longuement défendu et dénoncé ce qu'il considère comme "une offensive de la Macronie". Il en a profité pour réclamer les annulations pures et simples des perquisitions. En réalité, perquisitionner un parti politique n’est pas un fait si rare que cela.
Au MoDem, Bayrou "comprend" Mélenchon
En octobre 2017, le siège du MoDem a lui aussi été perquisitionné, dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour des soupçons d’emplois fictifs au Parlement européen. A la différence de celui de Jean-Luc Mélenchon, le domicile de François Bayrou, le président du parti centriste, n’était pas visé à l’époque. Ce qui n’a pas empêché le maire de Pau d’expliquer "comprendre" la colère du leader de La France insoumise.
"C’est extrêmement violent. Je vous en parle parce que je l’ai vécu. Quand cette perquisition a eu lieu, j’ai ressenti cette perquisition de la même manière, avec un sentiment d’injustice profonde. Je le comprends (Jean-Luc Mélenchon, ndlr), après chacun son style. Le mien n’est pas celui de Jean-Luc Mélenchon. Mais oui c’est une violente qui est extrêmement forte. Vous le ressentez comme une injustice quand vous êtes sûr de n’avoir rien fait de répréhensible. Et tout le monde y passe, tout le monde ressent les mêmes choses. Parce que quand on pique votre ordinateur, votre portable, pour aspirer tout ce qu’il y a dedans, oui c’est violent", expliquait François Bayrou à Ruth Elkrief.
Deux perquisitions depuis 2016 au Rassemblement national
Quelques mois avant le MoDem, un autre parti politique avait été visé par une perquisition. Il s’agit de celui qui s’appelait encore à l’époque le Front national. En février 2017, le siège du parti avait été fouillé dans le cadre de l’affaire des assistants présumés fictifs au Parlement européen. Une première perquisition avait déjà eu lieu en 2016. Une affaire dans laquelle Marine Le Pen est mise en examen pour "détournements de fonds publics". La présidente du Rassemblement national se dit "assez sereine": "Nous sommes totalement innocents des faits qui nous sont reprochés".
Le domicile de Marine Le Pen, à l’inverse de celui de Jean-Luc Mélenchon, n’a pas été perquisitionné dans cette enquête. Mais la justice a bien perquisitionné celui de son père en 2016. Le 22 juin dernier, des policiers sont retournés à Montretout, dans les Hauts-de-Seine, pour entendre Jean-Marie Le Pen, qui avait décidé de ne pas leur parler. "Tout était en place pour les recevoir, mais le comportement des autorités policières a été tellement arrogant que Jean-Marie Le Pen ne l’a pas admis et les a renvoyés, dans le cadre de son immunité parlementaire", a expliqué son conseiller, Lorrain de Saint Affrique, à franceinfo.
Chez Les Républicains, les précédents de 2014 et 2016
Depuis quatre ans, le siège des Républicains (LR) a été perquisitionné deux fois. En octobre 2014, la justice se rend au quartier général de l’UMP (avant son changement de nom pour LR), dans le cadre de l’enquête sur le financement de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012. Dans cette affaire, l’ancien président de la République saura le 25 octobre prochain s’il est renvoyé en correctionnelle, explique Le Monde. Son domicile ainsi que ses bureaux avaient également étaient perquisitionnés dans le cadre de l’affaire Bettencourt, dans laquelle Nicolas Sarkozy a bénéficié d’un non-lieu.
En mars 2016, une nouvelle perquisition a eu lieu au siège du parti. Elle visait cette fois Claude Guéant, soupçonné de financement illégal de campagne électorale et mis en examen dans ce dossier, alors qu’il était candidat à Boulogne. Le domicile de l’ancien ministre de l’Intérieur a par ailleurs été perquisitionné dans d’autres affaires.
"Aucun d’entre nous n’est au-dessus des lois" au PS
Le Parti socialiste n’a pas non plus été épargné. Dès 1992, le siège du PS, rue de Solférino, est perquisitionné dans le cadre de l’affaire Urba, sur fond de financement occulte de parti politique. C’est l’une des toutes premières démarches du genre. La procédure aboutira notamment à la condamnation d’Henri Emmanuelli, alors trésorier du parti, à 18 mois de prison avec sursis et à deux ans de privation des droits civiques pour complicité de trafic d’influence.
Plus récemment, en décembre 2012, c’est le siège de la fédération socialiste du Pas-de-Calais, et pas le siège parisien, qui a reçu la visite de la justice. Un épisode qu’a lui-même rappelé Olivier Faure en réponse à Jean-Luc Mélenchon, vendredi. Celui-ci a évoqué vendredi lors de sa conférence de presse un fait plus ancien relatif au PS. En 1979, la police était en effet intervenue pour interrompre la tenue d'une émission de radio libre, à l'époque interdite.
Chez LREM, pas de perquisition mais "un déplacement de la police judiciaire"
A ce stade, La République en marche n’a jamais été formellement perquisitionnée par la justice. Dans le cadre de la campagne présidentielle de 2017, des dons supérieurs à la limite légale autorisée ont bien été signalés par la Commission nationale des comptes de campagne au parquet, qui n’a pas donné suite, selon Libération.
La situation est moins claire dans le cadre de l’affaire Benalla. La police s’est bien rendue dans les locaux du parti, le 21 juillet dernier, et y a découvert trois armes non déclarées. Selon le parti, "il n’y a pas eu de perquisition mais un déplacement de la police judiciaire dans le cadre de l’enquête". En revanche, la visite de cette même police judiciaire à l’Elysée pour fouiller le bureau d’Alexandre Benalla s’est bien faite dans le cadre d’une perquisition.