Le jihadiste Oussama Atar soupçonné d'être le coordinateur des attentats de Paris et Bruxelles

Près d'un an après les attentats du 13 novembre 2015 à Paris et à Saint-Denis, les enquêteurs pensent avoir identifié un donneur d'ordre, qui aurait, depuis la Syrie, coordonné ces attaques, ainsi que celles commises à Bruxelles en mars 2016.
D'après nos informations, les enquêteurs français cherchent depuis plusieurs semaines à déterminer qui se cache derrière un surnom, un kounya, nom de guerre utilisé par les jihadistes: Abou Ahmad. Ce nom apparaît en effet dans les deux dossiers: celui du 13 novembre et celui du 22 mars. D'après les services antiterroristes belges, il s'agirait d'un de leurs ressortissants, Oussama Admah Atar, un Belgo-Marocain de 32 ans, vétéran du jihad malgré son jeune âge et membre de Daesh, qui avait revendiqué ces deux séries d'attentats.
Le seul coordinateur identifié
Une hypothèse que les enquêteurs français jugent crédibles, précisent ce mardi des sources proches de l'enquête, venant confirmer une information du Monde. "Il est le seul coordinateur depuis la Syrie à avoir été identifié en l'état des investigations", affirme une de ces sources. Au total, dix commanditaires des attentats du 13 novembre ont été identifiés par les enquêteurs français.
Le nom d'Abou Ahmad apparaît pour la première fois dans les investigations après l'interpellation de deux personnes le 10 décembre, dans un camp de réfugiés, en Autriche. L'Algérien Adel Haddadi et le Pakistanais Mohamed Usman ont été débarqués sur l'île grecque de Leros le 3 octobre 2015, parmi un flot de migrants, en même temps que les deux kamikazes irakiens qui se sont fait sauter aux abords du Stade de France le 13 novembre.
Abou Ahmad agissait depuis Raqqa
Après des dénégations, Adel Haddadi a avoué qu'ils avaient été missionnés pour commettre des attentats à Paris et que le mystérieux Abou Ahmad avait organisé leur venue en Europe depuis la Syrie en compagnie des deux futurs kamikazes de Saint-Denis. Devant les enquêteurs français, après que l'Autriche a remis les deux hommes aux autorités françaises, Adel Haddadi a désigné Oussama Atar comme étant probablement Abou Ahmad, d'après une planche de photos.
Abou Ahmad aurait organisé leur voyage à tous les quatre depuis Raqqa, capitale autoproclamée du "califat" de Daesh. Il leur a remis 2.000 dollars à chacun et est resté en contact avec eux tout au long de leur voyage, précise Le Monde. Le voyage s'arrêtera là pour Adel Haddadi et Mohamed Usman, incarcérés quelque temps en Grèce pour détention de faux passeports. Mais celui des deux futurs kamikazes se terminera en France comme prévu. Sur le cadavre de l'un d'eux, les enquêteurs retrouveront d'ailleurs le numéro de téléphone turc avec lequel Abou Ahmad contactait ses recrues.
Le nom d'Abou Ahmad apparaît par ailleurs dans l'enquête belge quelques jours après les attentats de Bruxelles, quand un ordinateur abandonné dans une poubelle est retrouvé près d'une des planques utilisée par la cellule jihadiste de Belgique. Les enquêteurs exhument du disque dur des conversations dans lesquelles des membres de la cellule semblent s'adresser à Abou Ahmad en évoquant des testaments, des modes d'action et des listes de cibles, selon une source proche de l'enquête.
Dix ans dans les geôles américaines d'Irak
Cousin éloigné des frères El-Bakraoui, morts en kamikazes lors des attentats de Bruxelles, Oussama Atar est un nom bien connu de l'antiterrorisme. En 2005, rappelle Le Monde, il avait été condamné à dix ans de prison par un tribunal irakien pour être entré illégalement dans le pays, avant d'être incarcéré dans plusieurs prisons tenues par l'armée américaine.
"Abou Ghraib, Camp Cropper et Camp Bucca, comme en atteste un câble publié par WikiLeaks. C’est dans cette dernière prison que transiteront à la même période une dizaine de futurs cadres de l’organisation Etat islamique (EI), dont son calife autoproclamé, Abou Bakr Al-Baghdadi", écrit le quotidien du soir.
Oussama Atar sort en 2012 de Camp Bucca, après avoir bénéficié d'une libération anticipée pour raisons de santé, une rumeur laissant entendre qu'il souffrait d'une tumeur au rein. Après sa libération, il fait un passage par la Belgique, puis rejoint la zone irako-syrienne et Daesh sans attendre. A ce jour, il n'a pas donné signe de vie depuis au moins deux ans et est considéré comme l'un des hommes les plus recherchés de Belgique, voire d'Europe.