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Police-Justice

Stèle nazie érigée à Volmunster: un ressortissant allemand jugé pour son "acte odieux"

Le tribunal d’Aix-en-Provence

Le tribunal d’Aix-en-Provence - AFP

Le tribunal correctionnel de Sarreguemines juge, à partir de ce lundi, un ressortissant allemand qui avait érigé une stèle nazie dans son jardin en 2018. Poursuivi pour "apologie de crimes contre l'humanité", il encourt jusqu'à 5 ans de prison et 45.000 euros d'amende.

C'est une affaire qui a "outré" et "blessé" la communauté juive de Moselle, et bien au-delà. Ce lundi, au tribunal correctionnel de Sarreguemines, s'ouvre le procès d’un ressortissant allemand poursuivi pour "apologie de crimes contre l’humanité". Le trentenaire est accusé d’avoir érigé, en janvier 2018, une stèle nazie visible de tous dans son jardin sur les hauteurs de Volmunster, dans le pays de Bitche, en Moselle.

Des passants avaient découvert le monument de ciment, orné de fleurs et de rubans rouges et noirs, au détour d'une promenade champêtre. Sur le bloc poli trônait la devise "Drauf, dran und durch": "En avant, on y va, tête baissée", une référence à la 17e SS Panzergrenadier Division. Cette unité d’infanterie qui a combattu de 1943 à 1945 pour le IIIe Reich est suspectée d'avoir massacré 124 habitants - dont 50 enfants - du village de Maillé, en Indre-et-Loire, le 25 août 1944.

Un "acte odieux"

"C'est le minimum de passer devant le tribunal pour répondre de cet acte odieux", commente à BFMTV.com Jacky Marx, président de la communauté israélite de Sarreguemines.

"En France, les juifs représentent environ 400.000 personnes, c'est la valeur d'une goutte d'eau dans l'océan! Pour moi, c'est un mystère que des gens se sentent menacés par notre communauté au point de vénérer le nazisme encore de nos jours", déplore le septuagénaire qui se définit comme un "Français d'abord, un Sarregueminois, de confession juive".

Après la découverte de cette stèle qui pourrait valoir au prévenu 5 ans de prison et 45.000 euros d'amende, les témoins avaient fait remonter l’information aux autorités. Les gendarmes avaient immédiatement démonté le monument, devenu pièce à conviction dans l’enquête menée par la brigade de recherches de Sarreguemines et l'Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité, les génocides et crimes de guerre (OCLCH).

Il est rapidement apparu que le suspect, aujourd’hui âgé de 36 ans, était un proche des Hammerskins, un groupe de suprémacistes blancs prônant une idéologie néonazie et raciste, rapporte France Info citant le média allemand, Saarbrücker Zeitung.

Des rassemblements néo-nazis en Moselle

Et si cet Allemand a choisi de s’établir dans la région, ce n’est pas sans raison. Pour contrer les interdictions auxquelles ils font face en Allemagne, les néo-nazis traversent régulièrement la frontière pour organiser leurs rassemblements. Ainsi, en 2014, une centaine de néonazis venus principalement d'Allemagne avaient célébré clandestinement le 125e anniversaire de la naissance d'Hitler dans la salle communale d'Oltingue, dans le Haut-Rhin, indiquait alors France 3 Grand Est.

En février 2017, le Républicain Lorrain expliquait également que 300 à 400 personnes s'étaient réunies dans une grange du village de Lengelsheim. 

"Il y avait des voitures partout, du bruit et de 'drôles' de cris en allemand", racontait à l'époque un habitant à nos confrères, tandis que le maire ajoutait: "Ils avaient tous des tee-shirts noirs, des tatouages, ils prononçaient des expressions typiques." 

A Volmunster, un villageois assure à France Info que de tels rassemblements ont lieu "au moins une ou deux fois l’été. Les gens qui y participent sont pour la plupart tatoués, le crâne rasé. Mieux vaut ne pas trop s'approcher."

Augmentation des actes antisémites en France

Des rassemblements privés qui laissent derrière eux des traces de leurs convictions politiques, comme l’édification de cette stèle à Volmunster. En France, les faits antisémites ont d’ailleurs augmenté de 27% au cours de l’année précédente, selon les derniers chiffres du ministère de l'Intérieur qui en décompte 687 en 2019 contre 541 en 2018. Plus des deux tiers de ces faits (536 exactement) se traduisent par des "menaces" sous formes de propos, de gestes, d’inscriptions hostiles à la religion juive.

"Tous les vendredi et samedi, nos synagogues sont encadrées par la police pour que nous puissions prier en sécurité. C’est affligeant", se désolé Jacky Marx.

Malgré cette sombre réalité, le président de la communauté israélite de Sarreguemines reste positif: "Je suis négociant dans le bétail, je bouge dans toute la région et je n’ai jamais été confronté à l’antisémitisme." Un témoignage d’optimisme alors que 34% des Français de confession ou de culture juive déclarent se sentir régulièrement menacés en raison de leur appartenance religieuse, selon une étude de l'Ifop pour Fondapol parue le 20 janvier.

Ambre Lepoivre