Squarcini à NKM: "Rachida on n'en veut plus, Fillon c'est pareil"

Bernard Squarcini, le 18 février 2014. - François Guillot - AFP
Nouvelles révélations fracassantes sur le "système" Squarcini. Le Monde dévoile ce vendredi des éléments aux mains des juges du pôle financier, dans une enquête portant sur les activités de l'ex-patron du renseignement Bernard Squarcini depuis sa reconversion dans le privé. Florilèges.
> Toujours "le chef"
Celui qui fut le numéro un du renseignement intérieur sous Nicolas Sarkozy, dont il est très proche, a été mis en examen le 28 septembre pour une longue liste de délits présumés: trafic d'influence et détournement de fonds publics, faux en écriture publique, atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique, recel de violation du secret de l'instruction et compromission.
Le journal du soir publie notamment des extraits des écoutes judiciaires pratiquées en mars et avril 2013 sur son téléphone portable, qui trahissent le réseau de renseignement parallèle mis en place par Bernard Squarcini.
Evincé en 2012 du renseignement par la gauche au pouvoir en raison de sa proximité avec Nicolas Sarkozy, Bernard Squarcini fonde en 2013 une société privée de conseil en sécurité, Kyrnos.
Mais d'après les conversations reproduites par les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme, il appelle encore souvent ses fidèles ou anciens subordonnés à la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenue DGSI). Quatre ans après son départ forcé, on l’appelle encore "chef". Ses ex-secrétaires lui rendent encore service, prenant ici un RDV chez le médecin, récupérant là le numéro de téléphone privé d'un ambassadeur. Et il continue de recevoir sur sa boîte mail le bulletin interne de la DGSI...
Bernard Squarcini recueille ainsi un certain nombre d'informations sensibles, auxquelles il n'a pourtant plus le droit d'accéder, qu'il utilise ensuite à titre privé ou dont il fait profiter ses amis, notamment sarkozystes, affirme Le Monde.
> "Tu me tues Rachida et Fillon"
Dans leur article, Gérard Davet et Fabrice Lhomme retranscrivent une conversation du 28 mars 2013 entre Bernard Squarcini et Nathalie Kosciusko-Morizet. Lors de cet échange intercepté par les policiers, Il est question des époux Tiberi, que celle qui est alors en pleine bataille pour la mairie de Paris, veut tenir à distance.
Mais la conversation dévie et celui qu'on surnomme le "Squale" somme NKM d'écarter deux de ses ennemis des listes électorales. "Bon, allez, tu me tues Rachida et Fillon (…) Parce que Rachida on n’en veut plus (…) Basta crapoto", lui lance-t-il. "Je vais te dire, le meilleur moyen de la tuer, c’est d’éteindre (…) Et Fillon, c’est pareil, faut pas le tuer publiquement, faut l’éteindre", converge NKM.
> Le "petit blanc" sur l'affaire Cahuzac
Le 4 avril 2013, deux jours après les aveux de l'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac reconnaissant l'existence de son compte à l'étranger, Bernard Squarcini reçoit un coup de fil du directeur de cabinet de l'ex-président Nicolas Sarkozy, Michel Gaudin. Ce dernier lui demande s'il est possible de récupérer une note de la direction centrale de la police judiciaire - un élément pourtant couvert par le secret de l'enquête - à ce sujet. Car une rumeur circule à Paris: une note émanant de la DGSI aurait alerté l’exécutif sur l'affaire Cahuzac plusieurs mois avant, sans que rien ne bouge au sommet de l'Etat.
"On ne peut pas récupérer une note, là?", interroge Michel Gaudin. "Je vais essayer", dit Bernard Squarcini, avant de poursuivre: "Mais bien sûr qu’ils étaient au courant". "Bon, alors il faut lancer l’opération Victor Hugo", rétorque, Michel Gaudin, sans plus de précisions.
Un peu moins deux semaines plus tard, le 16 avril 2013, Bernard Squarcini rappelle le secrétariat particulier de Nicolas Sarkozy. "Je revenais vers vous pour prendre un petit rendez-vous, Il (Nicolas Sarkozy, Ndlr) m’a dit de passer régulièrement…", explique-t-il. "Et je voudrais vous envoyer un petit mail pour… A son intention (Nicolas Sarkozy)… Et à celle de Michel Gaudin aussi", poursuit-il. Et de préciser, en riant: "C’est sur l’affaire Cahuzac, c’est un petit blanc".
Bernard Squarcini promet ainsi de transmettre ce que l'on appelle "un blanc" dans le milieu du renseignement. Traduction: une note confidentielle, sans en-tête ni signature. Les enquêteurs retrouveront bien la note en question, datée du 15 avril 2013, lors d’une perquisition au printemps 2016. Cachée dans un coffre loué dans une banque parisienne par Bernard Squarcini. "L’argent placé en Suisse n’appartiendrait pas qu’à M. Cahuzac (...) il est question que M. Hollande aurait été mis au courant des problèmes de M. Cahuzac et qu’il aurait refusé sa démission avant les aveux officiels", y est-il écrit. Sans plus de preuves, souligne Le Monde.
> En possession d'une note sur l'appartement de Royal
Mais ce n'est pas tout. Lors d'une perquisition, les enquêteurs découvriront également une note au sujet du domicile de Ségolène Royal, réalisée par la DCRI à l'occasion une opération de sécurisation électronique de son appartement - comprenant son examen complet - qui avait été cambriolé en 2008. Un document retrouvé cette fois-ci au domicile de Bernard Squarcini...