Procès Tron: "J’étais incapable de réagir", martèle Virginie Faux

Virginie Faux, l'une des plaignantes dans le procès de Georges Tron. - Jacques Demarthon - AFP
De l'avis de tous les observateurs présents dans la salle d'audience en ce troisième jour du procès de Georges Tron, c'est à une audition musclée qu'a dû faire face Virginie Faux. L'ancienne employée de la mairie de Draveil, qui accuse Georges Tron et son adjointe Brigitte Gruel de viols et d'agressions sexuelles, a été interrogée toute la matinée de jeudi. Lors de ce témoignage, cette femme de 40 ans a raconté une scène de viol en mars 2009.
"Tout ce que je demande, c'est que mon affaire soit jugée par un jury populaire, qu'on entende ma parole directement, lance Virginie Faux au début de son témoignage. On a beaucoup parlé en plaisantant de réflexologie. Ce n'est pas de la réflexologie que je dénonce, ce sont des agressions sexuelles."
"Il va s'arrêter de lui-même"
En 2008, Virginie Faux se présente à la permanence de Georges Tron. Elle recherche alors un emploi et le maire de Draveil lui propose un poste d'"hôtesse d'accueil", raconte cette femme aux cheveux blonds attachés en queue de cheval qui a bien eu du mal à s'exprimer tant le président de la cour d'assises de Bobigny monopolise la parole aux première heures de cette nouvelle journée d'audience. Dès son embauche, les massages de pieds ont débuté que ce soit dans la voiture du maire ou dans des restaurants lors de déjeuners arrosés.
"J'étais gênée, j'essayais de changer de position. Lucile Mignon (membre du cabinet du maire, NDLR) m'avait dit "si il voit que vous n'êtes pas réceptive, il va s'arrêter de lui-même'", confie Virginie Faux.
Puis, la plaignante parle de ce fameux déjeuner où tout aurait basculé, où, le reconnait-elle bien volontiers sa présence n'était pas "nécessaire" mais répondait seulement à une exigence de son "patron". "Il s'est arrangé pour avoir mes jambes et les mettre sur les siennes, débute Virginie Faux. J'étais très gênée par rapport aux invités. Je ne bougeais pas. Puis, je me suis aperçue que M. Tron avait ses deux mains sur la table." Ces mains sur mes pieds étaient celles de Brigitte Gruel, l'adjointe au maire, poursuit-elle, assurant que Georges Tron la resservait sans cesse en vin.
Etat de sidération
Le président reprend alors la lecture de la plainte de l'ex-employée. Après le départ des convives, Brigitte Gruel a fermé la porte à clé, puis caressé les épaules de Virginie Faux avant de la déshabiller. Pourquoi ne manifeste-t-elle aucune réaction, s'interroge la cour de manière brutale. "Je n'ai pas compris ce qu'il se passait, j’étais incapable de réagir, j’étais choquée", s'explique-t-elle. L'adjointe se serait chargée d'enlever le haut de l'employée pendant que Georges Tron lui aurait retirée sa jupe. "J'étais là mais je n'étais plus là. J’étais complètement paralysée, je suis devenue toute molle", répond-elle encore aux interrogations du tribunal sur son absence de réaction.
"Ce n’est pas évident, livre au dehors de la salle d'audience Virginie Faux. Comment faire comprendre à quelqu’un qui n’a pas vécu cette sidération, le fait de ne pas pouvoir bouger. Même moi j’étais la première, avec mes croyances, je me disais ‘une femme elle est battue, elle s’en va’. Mais on se rend compte que ça n’a rien à voir quand ça nous arrive à nous."
Passés les attouchements sexuels, le président de la cour d'assises demande à la plaignante de préciser le viol dont elle accuse le maire. "Je suis désolé de vous poser la question: vous aviez des collants, une culotte, un string? Allons-y (...) parce qu’après vous dites qu'il y a eu pénétration", lance-t-il à la quadragénaire. Elle raconte qu'elle portait des bas en raison d'une opération récente. A la question de savoir si George Tron a "introduit ses doigts" dans son sexe, Virginie Faux réplique pas "plusieurs" mais "un doigt". "Il m’a caressé le sexe à travers ma culotte, l’a poussée, et a écarté mes lèvres", poursuit-elle. "Il a mis son doigt à l’intérieur de votre vagin?", presse le président du tribunal. "Oui", répond la plaignante avant de s'effondrer en larmes.
"Mes interrogatoires sont toujours désagréables", se défend le président de la cour d'assises de Bobigny face à l'étonnement de l'avocat de l'ex-employée quant au ton employé, comparé aux audiences des années 50, pour questionner Virginie Faux.
Femme soumise
La plaignante, qui est revenue en début d'après-midi sur un autre viol qu'elle dénonce et qui daterait de janvier 2010, affiche le profil d'une femme fragile, d'une femme soumise. Pressée une nouvelle fois par le président du tribunal sur son absence de réaction pendant et après les scènes de viols qu'elle décrit, il lui demande pourquoi ne pas avoir alerté ses collègues ou ses proches.
"Mon mari ne m’a pas donné l’autorisation de démissionner(...), souffle Virginie Faux. Il prenait toutes les décisions (...). Je n'avais même pas le droit d'avoir un compte en banque. Elle devra également faire face aux questions de la défense de Georges Tron. Des avocats qui tentent de décrédibiliser sa version, notamment en pointant du doigt des incohérences de son témoignage.