L'affaire Pelicot aurait-elle pu être évitée? Une inspection sur des "dysfonctionnements judiciaires" lancée

Des "dysfonctionnements judiciaires" dans les affaires concernant Dominique Pelicot? C'est la conviction du journaliste Laurent Valdiguié, auteur de Fetiche45 - Les autres vies de Dominique Pelicot. L'affaire des viols de Mazan et le calvaire de Gisèle Pelicot n'auraient jamais dû exister, selon le journaliste, qui explique que Dominique Pelicot aurait pu être interpellé dès 2010.
Cette année-là, "son nom sort dans le fichier national des empreintes génétiques (FNEG) comme étant l'auteur d'une tentative de viol avec arme commise en 1999". Laurent Valdiguié explique sur BFMTV qu'une goutte de sang retrouvée sur la scène de crime "a fait son chemin" et a permis de relier ce crime à l'ADN de Dominique Pelicot.
Les empreintes de ce dernier sont connues de la justice en 2010, car en juillet de cette année, il est arrêté dans un magasin Carrefour en Seine-et-Marne. Dominique Pelicot était alors en train de filmer sous les jupes des femmes. Pour cela, il est condamné à une amende de 100 euros et son empreinte est relevée.
Des scellés disparus
Plusieurs années plus tard, la juge du pôle judiciaire cold cases Nathalie Turquey enquête sur cette tentative de viol en 1999, mais aussi sur le meurtre et le viol de Sophie Narme, une jeune femme de 23 ans en 1991. Et elle a "une intuition".
"Elle demande à la brigade criminelle, qui a cette vieille affaire de 1991, de vérifier l'autre affaire de 1999", explique Laurent Valdiguié.
Le mode opératoire de ces deux crimes présente des similitudes, car les victimes sont deux agentes immobilières endormies à l'éther et déshabillées de la même manière.
Le journaliste explique alors que la justice découvre en 2022 que l'auteur de la tentative de viol en 1999 et du meurtre et du viol de 1991 a été identifié dès 2010: il s'agit de Dominique Pelicot. Mais cette authentification n'a alors entraîné aucune procédure.
Alors comment la justice a-t-elle pu passer à côté? Laurent Valdiguié a adressé un courrier au ministre de la Justice Gérald Darmanin pour présenter son travail. Résultat selon lui, le ministre a ordonné une inspection sur ces "dysfonctionnements judiciaires".
Car ce n'est pas le seul raté de la justice qui a permis à Dominique Pelicot d'échapper aussi longtemps à la justice. Laurent Valdiguié raconte que "le lendemain du meurtre de Sophie Narme en 1991, une autopsie est faite" et du sperme est retrouvé. Des écouvillons du sperme du violeur sont transférés au laboratoire mais "ils se sont perdus".
D'autres scellés, comme la ceinture et le pull de Sophie Narme, ont disparu. Depuis 2016, la juge Turquey recherche ces scellés.
"Il y a 1,2 millions de scellés. Dans les salles susceptibles de les abriter, les scellés de Sophie Narme n'y sont pas", déplore Laurent Valdiguié.
Dominique Pelicot a reconnu la tentative de viol de 1999 lors de sa garde à vue en octobre 2022, quand il avait été confronté à la découverte de son ADN sur la scène de crime.
Concernant le viol et le meurtre de Sophie Narme, Dominique Pelicot est mis en examen, mais a toujours nié son implication. Dans le procès des viols de Mazan, il a été condamné à 20 ans de réclusion criminelle, la peine maximale. Il n'a pas fait appel.