Homicide routier: les familles de victimes mitigées après les annonces d'Élisabeth Borne

Une mesure "symbolique", mais insuffisante? Élisabeth Borne a détaillé ce lundi une série de mesures visant à "réduire le nombre d'accidents" de la route. Parmi les mesures phares, la requalification de "l'homicide involontaire" par conducteur en "homicide routier".
Dans les faits, il ne s'agit pas de la création d'un nouveau délit mais d'un changement de dénomination "symbolique", qui interviendra par une modification du code pénal. Deviendront homicide routier "tous les homicides involontaires par conducteur d'un véhicule à moteur terrestre avec ou sans circonstances aggravantes", a indiqué Matignon. L'homicide routier restera puni jusqu'à 5 ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende.
Face aux annonces, les associations de prévention routière et les familles de victimes sont mitigées. Si elles saluent cette portée "symbolique", elles demandent de plus lourdes peines.
"Une victoire" contre le terme d'"homicide involontaire"
"On est sans doute en partie dans de la communication. Mais la prévention, c'est aussi de la communication, donc on ne peut pas tout jeter", a ainsi estimé Anne Lavaud, déléguée générale de l'association "Prévention routière", invitée de BFMTV.
Ce changement de sémantique "est une demande de famille des victimes. On comprend très bien que ça soit insupportable, pendant toute une procédure, d'entendre 'homicide involontaire'", poursuit Anne Lavaud, espérant qu'il conduise à "des statistiques" qui permettent "d'avoir des données très précises sur les peines prononcées".
"Le fait que ce soit involontaire n'était pas entendable", abonde Robert Montury, membre de l'association Marilou, qui lutte contre la délinquance routière. Un avis également partagé par Marceline et Yvon Guiez, parents de Noé, tué à 16 ans par un chauffard "alcoolisé et drogué" en juin 2022.
"C'est un premier pas. Les familles de victimes, ça fait des années qu'elles attendent ça", ont-ils affirmé sur notre antenne.
"Sur le plan de la symbolique, pour les victimes de la route, c'est quelque chose d'important et c'est une victoire pour ceux qui se sont battus pour effacer ce terme d''involontaire'", renchérit Me Vincent Julé-Parade, avocat spécialisé dans la défense des victimes d'accidents de la route.
"Absolument rien de nouveau"
Pour autant, associations et familles réclament une justice plus ferme. L'homme soupçonné d'avoir tué Noé a été libéré au bout de deux mois de détention provisoire "sous caution, pour 5000 euros", relatent ses parents.
"On est dans l'incompréhension totale, comment une personne qui a tué un enfant peut être libérée au bout de deux mois?", s'interroge sa mère.
Le chef cuisinier Yannick Alléno, dont le fils a également été tué par un chauffard, a quant à lui dénoncé une mesure pas "satisfaisante". "Ceci est un verbatim, c'est un changement sémantique de la loi, on sera toujours sous le chapeau de l'homicide involontaire", a déploré le chef, qui souhaite une "infraction autonome, distincte de l'homicide involontaire".
"Le changement de terme ne réparera en rien l'incompréhension des victimes face aux peines qui sont prononcées", assure de son côté Me Vincent Julé-Parade.
Pour Robert Montury, "on peut créer toutes les infractions qu'on veut, si on ne se donne pas les moyens de dépister, de contrôler..."
Une mesure en trompe-l'œil? "La plupart des mesures qui ont été annoncées sont des mesures qui existent déjà (...) il n'y absolument rien de nouveau", déplore Me Rémy Josseaume, avocat en droit routier.