Gilets jaunes: journée "très difficile" redoutée par les forces de l'ordre, à quoi s'attendre ce samedi?

Les gilets jaunes préparent leur 45e samedi de mobilisation, qui coïncide avec les Journées du patrimoine. Pour se prémunir contre les débordements, quelque 5000 gendarmes et policiers seront déployés à Paris, la capitale sera quadrillée.

Depuis le 17 novembre 2018, les gilets jaunes occupent des ronds-points et défilent chaque samedi contre la politique gouvernementale. Mais après dix mois de mobilisation, leurs rangs se sont rétrécis. Les militants espèrent donner un nouveau souffle ce samedi à leur mouvement avec un "45e acte", un événement "historique" réunissant "la France entière à Paris".

• A 10h00 sur les Champs-Elysées
  

Sur Facebook, les gilets jaunes enjoignent les manifestants à se rassembler à 10h00 sur les Champs-Elysées: "10 mois que nous réclamons une justice sociale, fiscale et environnementale. 10 mois que le gouvernement ignore nos revendications et nous méprise. Alors aux armes citoyens." Pour l’heure, un peu moins de 3000 personnes ont confirmé, sur Facebook, leur participation à l’événement.

Pour Jérôme Rodrigues, une des figures du mouvement blessé à l'oeil en janvier, "ce sera une manifestation révélatrice car beaucoup de gens vont monter à Paris".

"J'ai le même ressenti en termes d'affluence que le 16 mars, l'émulation est bonne", ajoute-t-il, en référence à l'acte 18 de la mobilisation pendant lequel l'emblématique restaurant Fouquet's, sur les Champs-Élysées, avait été incendié.

Sur Facebook, de nombreuses organisations régionales de gilets jaunes prévoient également de se rendre à Paris. C'est le cas de la Normandie, de la Povence-Alpes-Côtes-d'Azur, de l'Auvergne-Rhône-Alpes, du Centre-Val-De Loire, des Pays de la Loire, de la Bretagne, de la Nouvelle-Aquitaine, de l'Occitanie, du Grand-Est, des Hauts-de-France, de la Bourgogne et de la Loire-Atlantique.

Mais la mobilisation autour de ces événements semble minime à ce stade, si l'on s'en tient au nombre de personnes ayant indiqué leur participation: elles sont entre 100 et 2900 au maximum.

• Gilets jaunes et militants pour le climat à la Madeleine
  

D’autres gilets jaunes appellent à rallier la marche pour le climat. "Il faut que le mouvement mute", assume Jérôme Rodrigues. "Je suis pour converger vers la lutte contre le mal-être, pour la justice environnementale et pour intégrer des cortèges différents".

Les associations écologistes semblent pourtant frileuses face à cette convergence, et ont proposé a minima un rassemblement commun "symbolique" samedi matin, place de la Madeleine à Paris. "Il y a une volonté de se réunir mais nos formes d'action sont trop différentes et leurs manifestations sont non-déclarées", explique Elodie Nace, la porte-parole du mouvement écologiste Alternatiba.

Plus enthousiaste, la porte-parole de l'association Attac, Aurélie Trouvé, explique que gilets jaunes et écologistes se battent "contre un même système, et pas chacun de notre côté: l'urgence écologique ne doit pas se faire sur le dos de la justice sociale, et inversement".

• Gilets jaunes contre la réforme des retraites
  

Priscillia Ludosky, figure des gilets jaunes depuis le mois de novembre 2018, s'attend à une "forte mobilisation contre la réforme des retraites", car "les retraités sont un profil important du mouvement". "La question des retraites n'est pas anecdotique", abonde Benoit Hasard, chercheur à l'EHESS. "Une grande partie des gilets jaunes, à la base, c'était des retraités sur les ronds-points".

Selon Laurent Jeanpierre, chercheur à Paris-VIII qui vient de publier un livre sur le mouvement, une telle convergence, sur des modes d'actions plus traditionnels de la gauche, risquerait de "sonner la fin des gilets jaunes" jusque-là inclassable politiquement.

• Les black-blocs attendus, les forces de l’ordre se préparent
  

Si l’on en croit les pages Facebook des gilets jaunes, certains prévoient également des actions dans la nuit de samedi à dimanche avec "la nuit des barricades à Paris".

"Ce jour va entrer dans l'histoire. Nous devons nous faire entendre et aller chercher le pouvoir là où il se trouve ou encore prendre la maison du peuple qui est l'Assemblée nationale, faisons entendre notre colère. La nuit des barricades est lancée à Paris, tous ensemble jusqu'à la victoire car le peuple uni ne sera jamais vaincu!"

Par ailleurs, plusieurs affiches, diffusées sur les réseaux sociaux, appellent les black-blocs à se rendre dans la capitale.

Cette multitude d’événements prévus en marge des Journées du patrimoine fait craindre le pire aux forces de l’ordre, qui seront présentes en nombre dans les rues de la capitale.

"La préfecture de police sera en ‘configuration 16 mars’, ce jour où les manifestations avaient dégénéré, le Fouquet’s avait été incendié, des banques brûlées, des habitants évacués de leur immeuble, explique notre consultant police-justice, Dominique Rizet. Il y aura des contrôles à l’entrée de la capitale dès vendredi, dans les gares et aux péages."

"Ce sera une journée très difficile pour les policiers, prédit Sylvain Durante, secrétaire national Alternative police CFDT interrogé sur notre antenne également. Néanmoins, 70 unités seront engagées sur ces événements pour faire tenir la République."

Ambre Lepoivre avec AFP