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Cité de la Castellane à Marseille: les habitants usés par "les coups de feu" 

La cité de la Castellane, jeudi, à Marseille, peu après les tirs à la kalachnikov

La cité de la Castellane, jeudi, à Marseille, peu après les tirs à la kalachnikov - Boris Horvat - AFP

La cité touchée par des tirs de kalachnikov début février est gangrenée par la violence et les trafics de drogue, selon les habitants, rencontrés par BFMTV.

Plus d'une semaine a passé depuis les tirs à la kalachnikov survenus dans les rues de la cité de la Castellane, à Marseille, à quelques mètres d'une école, et juste avant une visite de Manuel Valls. Mais les habitants ne parviennent pas à tourner la page. Ce fait divers, un parmi des dizaines, était celui de trop: épuisés de la situation, ils ont monté un collectif, pour faire entendre leurs problèmes.

"Une maîtresse qui partait en sortie s'est retrouvée nez à nez avec un homme armé de kalachnikov et habillé tout en noir. Elle a fait immédiatement demi-tour, mais les enfants ont vraiment eu un choc psychologique, on a eu beaucoup de mal à les remettre au travail", témoigne sur BFMTV un enseignant. "La vérité, c'est que s'il n'y avait pas eu dans la foulée la visite du Premier ministre, cette nouvelle n'aurait fait qu'une brève dans vos journaux", explique une habitante.

Les habitants se sentent abandonnés

Dans la cité, deux groupes scolaires y accueillent au total 788 enfants. Et depuis plusieurs années, la violence dans cette cité se banalise, comme l'explique l'enseignant, qui souhaite garder l'anonymat. "Pendant trois semaines environ, nos véhicules personnels ont été caillassés. Une de nos collègues a reçu une pierre sur la tête pendant la récréation. On a même des impacts de balles sur nos fenêtres..." 

Les habitants se sentent pris en otage par les trafiquants de drogue qui font régner leur loi. "Les médecins ne viennent plus, ils se font trop agresser...", explique l'enseignant, qui habite aussi dans la cité. "La nuit parfois, on entend des cris, des rafales de tirs. Dans ce cas-là, je réveille les enfants, je les sors de leur chambre, et je les amène dans le salon jusqu'à ce que ça se calme. Personne ne s'occupe de nous. La Castellane est délaissée." 

"Pour moi, c'est la mafia"

Depuis une dizaine de jours, le déploiement de CRS dans la cité à la suite des tirs de kalachnikov a quelque peu amélioré la situation, reconnaissent les habitants de la Castellane, même si certains déplorent des contrôles de véhicules ou de papiers les visant au lieu de viser plus directement les trafiquants. Pourtant, ces opérations ne durent pas assez longtemps, selon le collectif.

"Mois après mois, on a réalisé que les réseaux de trafiquants se renforçaient à la Castellane, qu'ils se professionnalisaient. Il l n'y a même plus ce côté affectif de 'Je te connais, on a grandi ensemble'... Pour moi, c'est la mafia", pointe une fonctionnaire.

Au sein de la cité qui compte quelque 7.000 habitants, le trafic de drogue rapporterait chaque jour environ 50.000 euros, selon les services de police. "La réalité, c'est des mecs masqués qui mettent des barrières pour organiser les acheteurs, qui contrôlent les allées et venues", décrit encore la même personne. "De 22h à 5h, la cité est dans le noir, ils mettent des lumières pour guider les acheteurs, il y a même un drive-in", ajoute une mère de famille. Le collectif en appelle donc à l'Etat, à la municipalité et à l'Education nationale pour remédier aux problèmes de la cité.

A. G. avec Alexis Pluyette, Antoine Heulard et AFP