Ce qu'Alexandre Benalla a dit aux enquêteurs

- - HANDOUT / MEDIAPART / AFP
Deux semaines après la mise au jour de l'affaire Benalla, l'enquête se poursuit. Avec les vacances parlementaires, qui débutent ce mercredi, les auditions du Sénat et de l'Assemblée sont mises au repos forcé. Place désormais à l'enquête judiciaire.
Le journal Le Monde dévoile justement des extraits recueillis lors des gardes à vue d'Alexandre Benalla, de Vincent Crase et des trois policiers soupçonnés d'avoir transmis au chargé de mission un CD avec les images de vidéosurveillance des violences qu'il a commises le 1er mai dernier, pour l'aider à préparer sa défense.
Devant les enquêteurs, le principal intéressé revient d'abord sur cette journée, au cours de laquelle il effectuait une mission d'observation et a été filmé en train de brutaliser un couple de manifestants. Comme devant la presse, le jeune homme de 26 ans maintient qu'il n'a "à aucun moment porté de coups". Selon Alexandre Benalla, la "pointe de son pied" a seulement "effleuré le torse" du manifestant.
Au sujet de l'équipement (radio, brassard), traditionnellement réservé aux policiers et qu'il arborait le 1er mai, il assure que le matériel lui a été remis par la préfecture de police et qu'un agent lui a conseillé d'enfiler le brassard une fois sur place, "au risque d’être pris pour un casseur par les CRS".
"Il faut protéger" Patrick Strzoda
Après avoir appris l'existence de cette vidéo et sa diffusion sur les réseaux sociaux, Alexandre Benalla assure avoir immédiatement prévenu l'Elysée et ce, dès le 1er mai au soir. Or, cette version contredit celles d'Alexis Kohler, secrétaire général de l'Elysée et Patrick Strzoda, directeur de cabinet, qui assurent n'avoir été mis au courant que le 2 mai.
Après s'être vu notifier sa sanction de mise à pied de quinze jours, le 3 mai, Alexandre Benalla raconte aussi que la responsable des ressources humaines de l'Elysée a voulu lui faire signer un document dans lequel il reconnaissait les faits. Mais Benalla a refusé au motif que ce "n'était pas la réalité":
"Je ne suis pas allé de ma propre initiative avec ma voiture et un casque faire du maintien de l’ordre, je ne suis pas fou", déclare-t-il. "Elle m’a alors dit que cette décision était au nom du directeur de cabinet et qu’il fallait le protéger, de la même façon que le préfet de police". Alexandre Benalla a fini par signer la missive après avoir fait modifier le texte.
Trois pistolets non déclarés chez LaREM
Dans les extraits des autres mis en examen, on apprend notamment que Vincent Crase a, après des dénégations initiales, avoué avoir porté une arme sur lui le 1er mai, arme qu'il détenait sans permis. Le chargé de sécurité salarié de LaREM révèle au passage la présence de trois pistolets Glock non déclarés dans les locaux du parti, des armes qui appartiennent à LaREM et sont "réservées pour la défense du site".
Au sujet des relations qui semblaient unir Benalla et le chef de l'Etat, enfin, on apprend que les trois policiers mis en examen les jugeaient étroites, raison pour laquelle ils auraient voulu sortir Alexandre Benalla du pétrin. "Pour nous, M. Benalla [représentait] Macron pour tous les sujets sécurité", assure l'un d'eux dans les extraits du Monde, contredisant les déclarations officielles des membres de l'Elysée. Il ajoute que Benalla était destinataire "au quotidien, des télégrammes et notes confidentielles".
Et de narrer une anecdote éclairante: le jour de la descente des Bleus le long des Champs-Elysées, "plusieurs témoins" se sont étonnés du "lien direct téléphonique avec le président de la République afin de caler le timing".