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Inaction policière, cinq plaintes, suspect en fuite... Ce que l'on sait du féminicide d'Inès Mecellem à Poitiers

Au moins 1.200 personnes ont participé à une marche silencieuse en mémoire d'Inès Mecellem, 25 ans, à Poitiers, le 20 septembre 2025.

Au moins 1.200 personnes ont participé à une marche silencieuse en mémoire d'Inès Mecellem, 25 ans, à Poitiers, le 20 septembre 2025. - JEAN-FRANCOIS FORT / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP

Inès Mecellem a été tuée le 9 septembre dernier à Poitiers. Son ancien conjoint, contre qui elle avait déposé cinq plaintes, est le principal suspect et est toujours en fuite.

Inès Mecellem, âgée de 25 ans, a été tuée de plusieurs coups de couteau à Poitiers, le 8 septembre dernier. La victime avait déposé de multiples plaintes à l'encontre de son ancien compagnon, qui est toujours recherché par les forces de l'ordre.

Au lendemain du drame, le parquet indiquait que la jeune femme "présentant plusieurs plaies par arme blanche" était morte des suites de ses blessures. Son corps avait été découvert alors qu'elle était gravement blessée dans une zone résidentielle située à proximité du centre-ville.

Une enquête pour "assassinat" a été ouverte et confiée aux policiers de la Direction de la criminalité organisée et spécialisée (DCOS 86).

• Un ex-compagnon principal suspect

Très vite, la piste menant à son ancien compagnon est développée. Né en 1989, ce dernier est depuis "activement recherché", avait précisé à l'AFP une source policière.

Près de deux mois avant d'être tuée, Inès Mecellem avait déposé une première plainte à son encontre, le 10 juillet. La jeune femme avait fait part de son intention de se séparer. Angélique, sa mère, rapporte au micro de BFMTV que son conjoint ne voulait alors "pas partir de chez elle".

"Au bout d'un moment, il a quand même fini par partir. C'est à partir de ce moment-là qu'il a commencé à la harceler, d'abord sur les réseaux sociaux, par message. Il passait tous les jours dans sa rue", retrace-t-elle.

Dans sa déposition, la victime fait état de violences physiques et sexuelles subies. "Je n'étais pas au courant de tout ça", déplore sa mère, qui ajoute: "Elle avait honte, ne voulait pas m'en parler. Je suis tombée des nues, une vision d'horreur."

• Sa famille dénonce l'inaction policière

La mère de la victime regrette le manque de conséquences liées aux plaintes déposées par sa fille. "En allant porter plainte, elle pensait pouvoir être en sécurité par la suite, ça n'a pas du tout été le cas."

Au total, cinq plaintes ont été déposées. "On se pose évidemment beaucoup de questions. On se demande pourquoi ils lui demandaient de rentrer chez elle", soulève son frère Yacine.

Un téléphone grave-danger lui est finalement fourni. Une réponse jugée trop faible par la famille. "Franchement, d'un côté ils estiment qu'elle est suffisamment en danger pour lui donner le téléphone et d'un autre côté, ils ne font rien. Il y a quelque chose qui n'est pas logique."

• Une interpellation sans garde à vue

Deux jours avant sa mort, son ancien conjoint est interpellé après l'avoir poursuivi. Des policiers avaient "interpellé l'individu sans qu'il ne soit placé en garde à vue", a précisé la procureure de la République à Poitiers, Rachel Bray.

Une décision "incompréhensible" pour Angélique, qui se dit "écœurée". "Il l'avait entre leurs mains, aujourd'hui il court dans la nature." Son frère a de son côté déclaré: “Aujourd’hui il y a deux meurtriers: celui qui est en fuite, mais aussi le système policier et judiciaire."

• L'IGJ saisie par Gérald Darmanin

Le ministre démissionnaire de la Justice, Gérald Darmanin, a décidé de saisir l'Inspection générale de la justice sur ce dossier, a-t-il annoncé ce dimanche 21 septembre.

Il souhaite ainsi faire "toute la lumière" sur cette affaire et résoudre également les problèmes qui ont mené à cette série de dysfonctionnements.

• Une personne "sociable, ouverte et rayonnante"

Une personne "sociable, ouverte, qui avait toujours le sourire", a décrit son frère aîné, lors d'une marche blanche à laquelle près de 1.000 personnes ont participé en son honneur, le 20 septembre dernier. "Elle se battait pour la justice et contre l'injustice, elle était rayonnante."

"Elle a eu le courage de traverser le commissariat six fois en deux mois", ajoute-t-il, en interpellant "toutes les institutions" défaillantes dans la prise en charge de ses plaintes.

Au micro, une proche de la famille abonde: "Inès n'est pas seulement un chiffre ou un fait divers. Inès n'est pas seulement la victime d'un homme mais d'un système défaillant".

Arthus Vaillant