Le prince Charles exprime sa "tristesse personnelle" pour le passé esclavagiste de la Grande-Bretagne

Le prince Charles, en visite en Belgique, le 17 juin 2015 (photo d'illustration) - GEERT VANDEN WIJNGAERT / POOL / AFP
Le prince Charles a affirmé vendredi à Kigali, en ouverture de la réunion des dirigeants du Commonwealth, que les États membres étaient libres d'abandonner le giron de la monarchie et exprimé sa "tristesse" pour le passé esclavagiste de la Grande-Bretagne.
Ce sommet (CHOGM) se tient au Rwanda, qui a intégré le Commonwealth en 2009, au moment où l'association aux 54 États membres est traversée par de profondes interrogations, dans une période de transition pour la monarchie britannique et de remise en question du passé colonialiste.
De plus en plus de pays qui "n'ont pas de liens constitutionnels" avec la famille royale
Dans 14 des États membres, la Reine Elizabeth II est la cheffe de l'État, et certains d'entre eux n'ont pas caché leur volonté de prendre leurs distances avec la monarchie, dans le sillage de la Barbade qui s'est officiellement proclamée république en novembre 2021.
"Le Commonwealth compte en son sein des pays qui ont eu des liens constitutionnels avec ma famille, certains qui continuent d'en avoir et de plus en plus qui n'en ont pas", a déclaré le prince Charles, qui représente sa mère la reine Elizabeth II, cheffe du Commonwealth.
"Je tiens à dire clairement, comme je l'ai déjà dit, que le régime constitutionnel de chaque membre, en tant que république ou monarchie, relève uniquement de la décision de chaque État membre", a-t-il insisté, devant des dizaines de dirigeants parmi lesquels les Premiers ministres britannique Boris Johnson et canadien Justin Trudeau.
"La période la plus douloureuse de notre histoire"
L'héritier à la Couronne britannique a également reconnu que les racines du Commonwealth "plongent profondément dans la période la plus douloureuse de notre histoire".
"Je ne peux décrire la profondeur de ma tristesse personnelle face à la souffrance de tant de gens, alors que je continue à approfondir ma compréhension des effets durables de l'esclavage", a-t-il déclaré.
Le CHOGM se tient en pleine polémique sur un accord d'expulsion de migrants clandestins du Royaume-Uni vers le Rwanda, qui a suscité l'indignation de nombreuses ONG de défense des droits humains, de l'ONU et de l'Église anglicane. Selon la presse britannique, le prince Charles a également manifesté en privé son désaccord avec ce dispositif, qu'il a qualifié de "consternant".
Le gouvernement britannique a promis de persister sur ce programme d'expulsions, bloqué à la dernière minute le 14 juin par une décision de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).
Politique controversée
Le prince Charles a rencontré vendredi matin Boris Johnson. Mais le Premier ministre britannique a indiqué qu'il ne détaillerait pas la teneur de l'entretien.
"Il y a beaucoup de préjugés sur le Rwanda qui doivent être balayés", a-t-il répété vendredi aux médias britanniques, après avoir appelé la veille les opposants au texte à "garder l'esprit ouvert".
Boris Johnson a fait l'éloge des "pas de géant" réalisés par le Rwanda, petit pays d'Afrique de l'Est qui a connu depuis la fin du génocide de 1994 un développement économique spectaculaire. Il est toutefois régulièrement critiqué pour sa politique en matière de droits humains.
En amont du CHOGM, 23 ONG ont rappelé dans une lettre ouverte leurs "graves préoccupations" à ce sujet. Parallèlement, la République démocratique du Congo voisine avait demandé au Royaume-Uni de condamner le Rwanda, qu'il accuse d'"agression" dans l'est du Congo et de soutenir le groupe armé du M23.
Secrétaire générale réélue
La secrétaire générale du Commonwealth, la Britannico-Dominicaine Patricia Scotland, a été réélue de justesse vendredi après-midi pour un nouveau mandat de deux ans, mettant fin à plusieurs mois de campagne parfois tendue.
La ministre jamaïcaine des Affaires étrangères, Kamina Johnson Smith, briguait le poste, avec le soutien du Royaume-Uni qui avait exprimé son mécontentement à l'égard de la gestion de Patricia Scotland.
Le CHOGM doit s'achever samedi, lors d'une journée qui verra l'intégration de deux nouveaux membres, le Togo et le Gabon. "De nouvelles nations cherchent à se joindre, ce qui montre tout ce que vous devez savoir sur la santé et la vitalité de notre Commonwealth", a déclaré Boris Johnson.