Abaissement de la vitesse sur le périphérique: la majorité municipale parisienne contre-attaque et pousse pour la mesure

Plusieurs élus de la majorité municipale se sont réunies à proximité du périphérique pour appuyer leur mesure d'abaissement de la vitesse. - BFM Paris Ile-de-France
Il est 10 heures ce mercredi 11 septembre. Dans les locaux du conseil régional d'Île-de-France, les élus adoptent une motion contre le projet de la ville de Paris d'abaisser la vitesse sur le périphérique à 50 km/h et souhaitent la régionalisation de l'axe.
Au même moment, l'exécutif parisien fourbit ses armes. Patrick Bloche, le nouveau premier adjoint (PS) d'Anne Hidalgo, entouré de quatre autres adjoints et de deux maires d'arrondissement, organise un déplacement sur le rond-point de la porte de Vincennes, à deux pas de l'Hypercasher, pour contre-attaquer.
À cette frontière entre le 12e, le 20e et Vincennes, les bruits et les odeurs de pot d'échappement sont forts et incessants. "J'espère que le bruit du périphérique ne va pas gêner la compréhension de nos propos", lance d'entrée Patrick Bloche à destination des journalistes présents, dont BFM Paris Île-de-France.
Pas assez de consultations?
Selon la mairie de Paris, l'abaissement de la vitesse sur le périphérique est une mesure de "santé publique" pour les 500.000 habitants qui vivent à proximité. Au niveau de la pollution atmosphérique, de la sécurité routière, mais surtout de la pollution sonore.
"Ce sont d'abord des raisons liées à ce que génère le boulevard périphérique, c'est-à-dire à la fois un facteur de pollution de l'air et évidemment de pollution sonore", rappelle le premier adjoint. "Il y a un enjeu de sécurité routière que personne ne peut nier. Il y a moins d'accidents à 50 km/h qu'à 70km/h comme à chaque fois qu'on limite la vitesse", poursuit-il au micro de BFM Paris Île-de-France.
Après avoir annoncé la mise en place de cette nouvelle limitation de vitesse, les critiques à l'encontre de la mesure et de la majorité municipale ont fusé.
Ce mercredi matin, l'exécutif parisien est donc revenu point par point sur les reproches formulés, notamment par la région ou encore le préfet de police. "On n'est pas dans une démarche anti-bagnole. Il faut que l'automobile s'adapte au confort de vie ce que souhaitent les gens", assure Patrick Bloche.
D'après la préfecture de police de Paris, les "consultations prévues n'ont pas été menées à leur terme". Faux selon la majorité.
"Les raisons sont dans le débat public depuis longtemps parce qu'il y a eu, contrairement à ce qu'on peut lire ici ou là, une concertation qui date en 2018. Il y a eu une mission d'information et d'évaluation du conseil de Paris", assure le premier adjoint d'Anne Hidalgo.
Et de renchérir: il y a eu les ateliers du périphérique, qui ont notamment associé des communes limitrophes".
La question de la légalité
Sur la question de la légalité, la nécessité ou non d'un décret du gouvernement se pose. Depuis une loi de février 2017 qui porte sur le statut de Paris, la compétence revient donc à la maire. Mais plusieurs avocats spécialisés dans le droit routier avaient des doutes car la dernière baisse de vitesse, qui date de janvier 2014, a été décidée par un décret du Premier ministre Manuel Valls. Or, dans la hiérarchie des normes, les arrêtés pris par Anne Hidalgo comme maire sont inférieurs aux décrets du gouvernement.
"Tout cela va se faire dans le respect du droit. J'entends qu'il faudrait un décret du gouvernement comme en 2014. Depuis, d'un point de vue de droit, il y a eu une jurisprudence en 2015 d'un arrêt du Conseil d'Etat. Et surtout, une loi en 2017 qui a transféré à la maire de Paris des autorités et une compétence notamment en matière d'autorité de police, de circulation, et de stationnement", précise Patrick Bloche.
Et d'ajouter: "C'est la raison pour laquelle, nous considérons, et cela se fait dans des échanges suivis avec le préfet de police, que la maire de Paris est fondée d'un point de vue de droit dans un cadre légal pour prendre un arrêté pour l'abaissement de la vitesse."
Dès lors, les élus parisiens s'interrogent d'une potentielle intervention de Laurent Nuñez. "Vous imaginez le préfet de police ne pas respecter le droit?", demande David Belliard, adjoint écologiste aux Mobilités. Il y a une guérilla forte mais classique dans les questions de santé publique et d'écologie."
Il rappelle, une nouvelle fois, que la mesure s'inscrit dans une amélioration de la vie des habitants à proximité directe. "Elle sera extrêmement efficace pour améliorer le confort de nuit aux habitants. C'est-à-dire simplement pouvoir dormir", rappelle-t-il au micro de BFM Paris Île-de-France.
Avant de lancer une attaque à la région:"je suis abasourdi de voir le texte de la région qui renonce à quelque chose qui pourtant va améliorer la santé de nos concitoyens."
Des enrobés phoniques ?
De son côté, la région a elle aussi cherché des solutions pour limiter le bruit. Une proposition a été formulée à plusieurs reprises: la pose d'enrobés phoniques. Valérie Pécresse s'est dite prête à financer pour moitié avec la ville de Paris. Mais depuis 2012, la ville de Paris en a déjà posé sur le périphérique. Mais selon la présidente de région, il faut aujourd'hui les renouveler.
"Plus de la moitié du périphérique en bénéficie, et cela a coûté 17 millions d'euros. C'est aussi pour cela qu'on en voit les limites. Nous voulons aller plus loin dans la baisse des nuisances sonores en réduisant la vitesse maximale, en particulier la nuit !", assure David Belliard sur son compte X.
"On appelle à la raison. D'expérience, les agences indépendantes l'ont dit. L'enrobé phonique réduit, mais il réduit très modestement le bruit", rappelle encore David Belliard. "C'est un sparadrap sur une jambe de bois. Ce ne sont pas des mesures radicales", fustige aussi Patrick Bloche.
La levée de boucliers contre l'abaissement de la vitesse est vue par l'exécutif parisien de la même manière que celle qu'avait suscitée la fermeture des voies sur berge.
"C'est la même problématique", assure Patrick Bloche au micro de BFM Paris Île-de-France. "Faut-il adapter la ville à la voiture comme cela a été fait pendant des décennies. Où est-ce que la place de la voiture doit se faire de manière plus restreinte?", questionne-t-il.
Du côté des principaux concernés, les riverains les plus proches de l'axe de 35 km, emprunté par un million d'automobilistes chaque jour, la mesure est bien accueillie. "Ça peut changer notre quotidien, ça peut nous faire du bien", estime Félicité, qui espère pouvoir à l'avenir se poser sur son balcon pour "se reposer". Pour l'instant, le 1er octobre, les automobilistes devront bien lever le pied sur le périphérique.