Pourquoi les feux de végétation sont moins nombreux en France cet été comparé à 2022

Vue de la végétation portant les stigmates d'un vaste incendie qui avait ravagé landes et tourbières à l'été 2022, le 11 juillet 2023 aux Monts d'Arrée dans le Finistère - Fred TANNEAU
Un été plus calme? Pour l'instant, même si le pays a connu quelques incendies avec plus de 20.000 hectares brûlés, l'Hexagone est relativement épargné par les feux de végétation comparativement à l'année dernière où 72.000 hectares étaient partis en fumée au cours de l'été. Une situation qui s'explique notamment par la météo de ces dernières semaines et par la prévention menée.
"De nombreux passages orageux"
Romaric Cinotti, responsable de l'assistance feux de forêt en zone Sud chez Météo-France, le reconnaît, "à la fois la surface parcourue et le nombre d’éclosions de feux sont plus faibles" cette année par rapport à 2022 à la même date.
La situation n'a cependant rien de "surprenant", estime-t-il auprès de BFMTV.com, car "2022 et 2023 sont des années très différentes en termes de météo".
"En 2022, le mois de juin était particulièrement chaud et sec, on a donc eu une sécheresse précoce", indique-t-il. Un an plus tard, la situation est bien différente: l'Hexagone a connu "de nombreux passages orageux en juin" qui ont permis de "tempérer la sécheresse qui n'a pas eu le temps de s'installer", dit-il.
L'absence "d'étincelle"
Certaines régions, le sud-est notamment, connaissent pourtant de fortes chaleurs ces dernières semaines. Plusieurs massifs du Var, des Bouches-du-Rhône et des Alpes-Maritimes ont ainsi été fermés au public entre fin juin et début juillet en raison d'un risque d'incendie jugé "très sévère".
Comment expliquer alors que ces départements n'ont pas ou peu connu d'incendies? Pour Christophe Chantepy, expert en défense des forêts contre les incendies à l'Office national des forêts (ONF), toutes ces conditions ne suffisent pas à déclencher nécessairement un feu.
"Les alertes sont là pour dire que la végétation est tellement sèche et les vents tellement importants que la population doit faire attention. Mais il n'y a pas toujours un démarrage de feu, il faut une étincelle", c'est-à-dire une intervention, en général humaine, rappelle-t-il auprès de BFMTV.com
"Un début d'acculturation aux feux de forêts"
S'il est difficile d'évaluer précisément les raisons de cette absence d'élément déclencheur, Christophe Chantepy veut croire que la prévention fonctionne.
"Il y a un discours qui passe mieux qu’il y a quelques années. On a le sentiment que les gens font plus attention et qu’il y a un consensus" sur le sujet, souligne-t-il.
L'alliance départementale des comités communaux feux de forêt et des réserves communales de sécurité civile des Alpes-Maritimes (ADCCFF), notamment chargé de mener un travail de prévention auprès du grand public, abonde. "Les années font que ça rentre dans les mœurs", assure Charlotte Cartier, responsable administrative de l'organisation, à BFMTV.com. Elle estime que le grand public est désormais plus nombruex à prendre garde de ne pas jeter leur mégot dans la nature ou réalisent plus souvent un débroussaillage des alentours de leur maison.
Il y a "un début d'acculturation aux feux de forêts", affirme Christophe Chantepy, tout en rappelant que le travail est encore loin d'être terminé.
L'extinction des "feux naissants"
Les moyens déployés sur le terrain pour prévenir les feux sont également plus importants cette année. Romaric Cinotti, de Météo-France, souligne notamment qu'un "renforcement des moyens de pompiers dans certains départements" a été réalisé avec notamment plus de Canadair et d'hélicoptères bombardier d'eau.
Christophe Chantepy souligne aussi l'importance des équipes de pré-extinction des feux de végétation mis en place par l'ONF et par certains conseils départementaux. Concrètement, des agents sont mobilisés dans les zones à risques au volant d'une voiture 4x4, chargée de 600 litres d'eau. "Ils sont capables d'agir vite. S'il y a un départ de feu, ils peuvent être sur place en 10-15 minutes", indique-t-il.
Ces équipes ont été "musclées" dans le sud et "étendues" dans le reste du pays cette année, explique l'expert de l'ONF, ce qui permet de mieux prévenir les départs de feu ou de les maîtriser rapidement.
"Il y a eu pas mal de feux naissants dans le sud, mais ils ont été tapés (éteints NDLR) très vite" et "on n'en pas parlé", car ils n'étaient "pas étendus", souligne-t-il.
"Le pire est devant nous"
Pour autant, Romaric Cinotti, de Météo-France, met en garde: "la sécheresse va se réinstaller très vite".
De fait, l'hiver a été très sec, avec des précipitations bien moindres qu'espérées et qui n'ont donc pas permis de recharger complètement les nappes phréatiques. Ces dernières semaines, le mercure a par ailleurs grimpé dans la région du sud-est, contribuant encore à créer une situation propice aux incendies.
"Dans le sud-est, il y a eu des vents assez importants ces dernières semaines, avec le mistral et la tramontane, ça a contribué à sécher les sols", souligne encore Romaric Cinotti. "Il faut être très prudent", souligne-t-il.
"Le pire est devant nous", prévient de son côté Christophe Chantepy, avec "un niveau de risque fort pour le Var, les Alpes-Maritimes, la Corse, le nord des Pyrénées-Orientales". Le département des Bouches-du-Rhône a d'ailleurs été placé par Météo-France en alerte rouge pour risques d'incendies mardi.