"Notre monde s'est effondré": une immense manifestation à Tel-Aviv pour demander la fin de la guerre à Gaza et le retour des otages

Vêtue d'une robe de mariée, voile blanc dans les cheveux, Ilana Gritzewsky vient d'organiser ses noces fictives devant une centaine de personnes, à Tel-Aviv. Son compagnon est toujours retenu captif à Gaza. "Matan, mon chéri, si tu n'avais pas été kidnappé, nous aurions déjà pu être mariés", dit-elle dans un micro.
Le couple avait été kidnappé par le Hamas à leur domicile lors des attaques du 7-Octobre en Israël. Elle, a été libérée un mois plus tard. Lui, est resté otage.
"Notre monde s'est effondré, tu n'es pas là pour me serrer dans tes bras et je ne peux pas être pas là pour te donner de la force", poursuit-elle la voix tremblante.
Tambours, slogans et rubans
Tout au long de la journée, ce dimanche 17 août, des milliers de manifestants se sont rassemblés dans les rues de Tel-Aviv au rythme des tambours et des slogans.

Beaucoup ont porté des morceaux de ruban adhésif sur leurs chemises avec le numéro 681 écrit au marqueur, représentant le nombre de jours depuis que les otages ont été enlevés. Tous réclament le retour des captifs israéliens et la fin de la guerre à Gaza.
Si certains se sont rendus dès 8 heures devant la résidence du Premier ministre Benjamin Netanyahu, d'autres ont paralysé les axes routiers et les places principales de la ville.
"Nous ne devons pas oublier"
Réunis jusqu'au soir sur la place baptisée "place des otages", les Israéliens ont brandi pancartes, banderoles et drapeaux, et enchaîné les prises de parole.
"Aujourd'hui est un jour particulier, parce que nous devons continuer à vivre notre quotidien, mais en même temps nous ne devons pas oublier et normaliser ce qui se passe réellement depuis 681 jours", confie une habitante, drapeau israélien sur l'épaule.


En marge des manifestations, des arrestations ont eu lieu dans les rues de la ville. La police israélienne avait annoncé se préparer aux manifestations "avec des forces renforcées".
"Des milliers de policiers et de soldats des forces de sécurité frontalières seront déployés dans tout le pays et dans différents endroits tout au long de la journée", avait averti la police dans un communiqué, assurant qu'elle "ne tolérera aucun trouble à l'ordre public".

Une nouvelle offensive à Gaza
Des manifestations ont été organisées régulièrement pendant les 22 mois de guerre déclenchée dans la bande de Gaza par l'attaque sans précédent du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023. Mais le rassemblement de ce dimanche apparaît comme l'un des plus massifs à ce jour.
La mobilisation s'est organisée après la décision du gouvernement de Benjamin Netanyahu, il y a un peu plus d'une semaine, de lancer une nouvelle offensive contre le Hamas dans le territoire palestinien, et de s'emparer de la ville de Gaza et des camps voisins.

Ce plan de prise de contrôle des zones les plus peuplées de Gaza, alors que les agences humanitaires et l'ONU mettent en garde contre une famine imminente dans le territoire, a suscité la réprobation internationale. En Israël même, elle a encore accru le sentiment d'urgence pour ceux qui exigent la fin de la guerre en échange d'un accord négocié pour libérer tous les otages.
500.000 participants selon les organisateurs
Au total, 500.000 personnes se sont rassemblées dans les rues de Tel-Aviv, selon le décompte des organisateurs. Au-delà du sort des 49 otages toujours retenus à Gaza - dont 27 déclarés morts par l'armée israélienne - d'autres inquiétudes remontent. "Le pays tout entier se déchire, notre image dans le monde a complètement changé, elle est pire que jamais, et ça suffit", s'émeut Nick, un travailleur de la tech de 31 ans, auprès de l'AFP.
Certains s'inquiètent encore du sort de leurs propres enfants enrôlés dans l'armée israélienne, et redoutent qu'ils soient bientôt rappelés pour combattre. "Nous espérons et prions pour que notre gouvernement nous entende et nous écoute", déclare Ella Kaufman qui se dit "inquiète", ses deux fils servant comme officiers.
"Comme Israéliens, nous faisons tout pour servir et nous sacrifier pour notre pays, tant que le gouvernement est au service des citoyens. Ces derniers mois, nous avons perdu ce lien et cette confiance dans notre gouvernement qui semble surtout suivre ses propres motivations politiques", estime-t-elle.
Au milieu de cette foule, d'autres habitants de Tel-Aviv soutiennent toutefois le gouvernement en des temps aussi sensibles. "Pourquoi les gens manifestent-ils? Personne ne sait où sont les otages. Donc ne manifestez pas contre Netanyahu. Mais pour soutenir les otages", interpelle Patrick Menache, un investisseur immobilier de 69 ans.
"Tout le monde est fatigué, les otages sont fatigués, les familles sont fatiguées, les Palestiniens sont fatigués (...) Cela doit se terminer. Mais la fin de cette guerre est d'abord entre les mains du Hamas", affirme-t-il à l'AFP avant de conclure "Netanyahu doit terminer la guerre", "et ensuite il devra partir, ça c'est certain".