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Rencontre Trump-Poutine: cinq questions pour comprendre les enjeux d'un sommet crucial pour l'Ukraine

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Donald Trump et Vladimir Poutine vont se rencontrer ce vendredi 15 août en Alaska lors d'un sommet crucial pour le futur de l'Ukraine. Le président américain, qui espère contraindre son homologue russe à stopper son invasion, a évoqué un accord de paix basé sur un "échange de territoires".

Une rencontre au sommet, pour des résultats incertains. La rencontre très attendue entre Donald Trump et Vladimir Poutine aura lieu ce vendredi 15 août, à partir de 21h30 (heure française) sur une base militaire près d'Anchorage en Alaska. Les deux présidents vont tenter de trouver une issue au conflit en Ukraine, plus de trois ans et demi après le début de l'invasion russe.

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Il s'agit du second sommet bilatéral entre les deux hommes après celui d'Helsinki en 2018. L'entretien est prévu en tête-à-tête, avec la seule présence d'interprètes. Ni le président ukrainien, ni aucun dirigeant européen n'a été convié. Écarté des négociations, Volodymyr Zelensky voit dans ce sommet une "victoire" de Vladimir Poutine. Il redoute que le président russe et Donald Trump n'entreprennent vendredi de redessiner la carte de l'Ukraine sans son accord.

Le président américain a lui dit espérer une discussion "constructive" et estimé à "25%" le risque d'échec de sa rencontre avec Vladimir Poutine. Le président russe et son homologue ukrainien "sont prêts à la paix", a-t-il ajouté.

· Un cessez-le-feu conclu?

L'Ukraine, soutenue par les Européens, presse Donald Trump d'obtenir avant toute chose de Vladimir Poutine un cessez-le-feu sur le front ukrainien. Le président russe s'y est jusqu'ici toujours refusé, préférant résoudre les "causes profondes" du conflit au préalable.

Après une série de réunions avec Kiev et l'administration américaine, les dirigeants européens ont montré un optimisme prudent, le Premier ministre britannique, Keir Starmer, évoquant une chance "réelle" de cessez-le-feu. Côté américain, le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio a lui aussi jugé "crucial" d'obtenir un cessez-le-feu.

"Il faudra bien discuter, entre autres, des différends territoriaux, des revendications et des raisons qui motivent les combats. Tous ces éléments feront partie d'un ensemble global, mais je pense que le président espère obtenir un arrêt des combats afin que ces discussions puissent avoir lieu", a déclaré le chef de la diplomatie américaine.

· Vers un "échange de territoires"?

Donald Trump insiste sur le fait que les négociations pour mettre fin au conflit seront basées sur un "échange de territoires" entre la Russie et l'Ukraine, "au bénéfice de chacun" selon lui.

"Je ne veux pas utiliser le terme 'se partager les choses', mais d'une certaine manière, ce n'est pas un mauvais terme. Il y aura du donnant donnant en ce qui concerne les frontières, les territoires", a-t-il précisé ce jeudi.

La notion d'"échange" interroge. L'armée ukrainienne ne contrôle aucun territoire russe. En Ukraine, où s'inquiète que des territoires occupés ne basculent définitivement dans le giron russe ou que d'autres, encore sous contrôle de Kiev, soient cédés à Moscou. Actuellement, l'armée russe contrôle 20% de l'Ukraine, c'est-à-dire l'oblast de Lougansk et une large partie des oblasts de Donetsk, Zaporijia et Kherson, en plus de la péninsule de Crimée annexée en 2014.

Selon le Wall Street Journal, Vladimir Poutine accepterait un cessez-le-feu complet si l'Ukraine consentait à retirer ses troupes de toute la région orientale de Donetsk. La Russie contrôlerait alors toute la région du Donbass, où les séparatistes favorables à Moscou combattent depuis 2014.

Mais Volodymyr Zelensky a d'ores et déjà rejeté un retrait de ses troupes. "Toute décision qui serait prise contre nous, qui serait prise sans l'Ukraine, serait une décision contre la paix", a-t-il mis en garde. "Les questions territoriales (...) ne seront négociées que par le président ukrainien", l'a soutenu Emmanuel Macron, pour qui "il n'y a pas aujourd'hui, de manière sérieuse, des schémas d'échanges territoriaux qui sont sur la table".

· Quelles "garanties de sécurité" pour l'Ukraine?

L'Ukraine les réclame depuis des mois à Washington, qui refuse de les lui accorder. Les "garanties de sécurité", qui permettraient à Kiev d'avoir l'assurance que la Russie ne relancerait pas sa guerre une fois un accord de paix conclu, font encore l'objet d'incertitudes.

Les États européens membres de la "coalition de volontaires" ont proposé de mettre à disposition des troupes de maintien de la paix dans le cadre d'un cessez-le-feu en Ukraine. Mais Donald Trump, qui refuse l'entrée de l'Ukraine dans l'Otan, n'a rien proposé de tel. Le président américain considère que l'accord économique conclu en mai avec Kiev est un soutien suffisant à la souveraineté ukrainienne.

Toutefois, ce jeudi, le secrétaire d'État Marco Rubio a semblé remettre le sujet sur la table. "Pour parvenir à la paix, je pense que nous reconnaissons tous qu'il faudra discuter des garanties de sécurité", a-t-il déclaré.

· Un second sommet avec Volodymyr Zelensky?

Si Volodymyr Zelensky a proposé à plusieurs reprises de rencontrer Vladimir Poutine, le président russe a jusqu'ici toujours rejeté cette offre, conditionnant tout sommet de ce type à l’obtention préalable de "résultats" dans les négociations.

Mais à la veille de son tête-à-tête avec Vladimir Poutine, Donald Trump a souligné que seul un sommet tripartite incluant aussi Volodymyr Zelensky pourrait sceller un accord de paix en Ukraine.

"Cette rencontre va ouvrir la voie à une autre", a assuré le président américain à la radio Fox News. "La deuxième rencontre sera très, très importante, car ce sera celle où ils concluront un accord".

"Je ne sais pas où aura lieu cette deuxième rencontre", a-t-il ajouté. "On pense à trois lieux différents ainsi qu'à la possibilité, car ce serait de loin la plus facile, de rester en Alaska".

· Des sanctions à la clé?

L'annonce du sommet en Alaska est intervenue le jour même de l'expiration d'un ultimatum lancé le président américain au Kremlin pour mettre un terme au conflit. "Sans accord" de paix, les droits de douane "seront à 100 %" pour les alliés de la Russie, avait-il promis mi-juillet. Mercredi, Donald Trump a rappelé que la Russie s'exposait à des "conséquences très graves" si elle n'acceptait pas de mettre un terme à la guerre en Ukraine.

Depuis son retour au pouvoir, le républicain a régulièrement proféré des menaces de sanctions contre Moscou, mais celles-ci sont toujours restées lettres mortes. En mai dernier déjà, Européens et Américains avaient sommé la Russie d'accepter un cessez-le-feu de 30 jours immédiat en Ukraine, sous peine de sanctions "massives". Mais face à l'inflexibilité russe, Donald Trump n'avait pas mis ses menaces à exécution et, après un nouvel appel avec Vladimir Poutine, avait annoncé un nouveau cycle de négociations.

Aux États-Unis, l'influent sénateur américain Lindsey Graham a mis sur un pied un parquet de sanctions drastiques contre Moscou. Son texte de loi, également soutenu par des démocrates, "donnerait au président Trump la capacité d'imposer des droits de douane de 500% sur n'importe quel pays qui aide la Russie et soutient la machine de guerre de Poutine", a-t-il expliqué. Donald Trump avait dit en juillet "étudier de très près" cette proposition.

Le président Volodymyr Zelensky réclame un renforcement des sanctions contre l'Ukraine et appelle les Occidentaux à "utiliser tous les avoirs russes gelés". L'Union européenne a adopté en juillet un nouveau train de sanctions, le 18e depuis le début du conflit, et "l'un des plus sévères contre la Russie à ce jour" selon la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas.

François Blanchard