"Vide informationnel", paranoïa et bonne santé: un ancien proche de Poutine décrit le quotidien du président russe

Vladimir Poutine, le 22 juin 2022 - AFP
C'est une parole extrêmement rare, au plus proche de Vladimir Poutine. Le 14 octobre dernier, près de huit mois après le début de l'invasion russe en Ukraine, un certain Gleb Karakulov, officiellement un ingénieur russe, embarque à l'aéroport d'Astana, au Kazakhstan, pour un vol sans retour direction la Turquie avec sa femme et sa fille.
En réalité, Gleb Kazakulov n'est pas un passager lambda. Officier du service secret de sécurité personnelle d'élite du président Vladimir Poutine (FSO), il a pendant de longues années, de 2009 à 2022, été chargé de mettre en place des communications sécurisées pour le président russe. Malgré ces années de bons et loyaux services, à l'aune du conflit ukrainien auquel il est opposé, il décide d'abandonner le pays.
Paranoïa
Depuis, l'ancien officier s'est confié à plusieurs reprises dans de longs entretiens accordés à Dossier Center, un groupe d'enquête basé à Londres financé par la figure de l'opposition russe Mikhail Khodorkovsky. Dans ces interviews, l'homme n'hésite pas à réaffirmer son opposition à la guerre en Ukraine, et à ouvertement critiquer son ancien patron.
"Notre président est devenu un criminel de guerre. [...] Il est temps de mettre fin à cette guerre et d'arrêter de se taire", déclare-t-il.
Au-delà de cette prise de position pacifiste, Gleb Kazakulov détaille le quotidien du dirigeant russe. Il pointe un homme isolé, loin de toutes technologies, dont le comportement frôle la paranoïa permanente.
"Durant toutes mes années de service, je ne l'ai pas vu une seule fois avec un téléphone portable", se rappelle-t-il, assurant qu'un intermédiaire lui fait remonter toutes les informations nécessaires.
"Il n'utilise ni Internet, ni téléphone portable. Il ne reçoit des informations que de son entourage le plus proche, ce qui signifie qu'il vit dans un vide informationnel", ajoute-t-il.
"Grâce à mon travail, j'ai pu constater à quel point l'information est déformée", ajoute-t-il, soulignant que l'homme fort du Kremllin exigeait un accès à la télévision russe d'État et ce, peu importe où il se trouvait.
L'ancien officier pointe également la paranoïa ambiante dans laquelle le président russe vit. Le plus possible, Vladimir Poutine évite l'avion pour se déplacer, préférant un wagon blindé anonyme pour éviter d'être repéré.
Fréquemment, de faux cortèges de véhicules quittent les résidences officielles afin de brouiller les pistes. "Il a simplement peur", ajoute Kazakulov, qui signale que plusieurs bureaux officiels similaires ont été construits à travers le pays.
Quelle santé pour Poutine?
Au delà de ces précautions extrêmes, le président russe serait également extrêmement pointilleux en ce qui concerne sa santé. Gleb Kazakulov assure ainsi que Vladimir Poutine vit dans une bulle sanitaire inviolable et passe le plus clair de son temps dans des bunkers. "Nous devons observer une quarantaine stricte pendant deux semaines avant tout événement, même ceux qui durent de 15 à 20 minutes", se rappelle-t-il.
"Tout le monde subit des examens de santé, surveille sa santé et passe des tests réguliers. Je sais que tous les assistants du président passent des tests PCR plusieurs fois par jour."
Toutefois, et contrairement aux rumeurs qui fleurissent depuis le début du conflit ukrainien sur l'état de santé de Vladimir Poutine, le président russe serait en parfaite santé. "Il est en meilleure santé que beaucoup d'autres personnes de son âge. Il a des visites médicales annuelles", assure-t-il.
Depuis son départ de Russie, Gleb Kazakulov vit clandestinement, et sous haute sécurité, avec le reste de sa famille.