Russie: ce que l'on sait de l'explosion qui a tué un blogueur militaire à Saint-Pétersbourg

Un blogueur militaire russe a été tué dimanche par l'explosion d'une bombe, dans un café de Saint-Pétersbourg, où il s'exprimait à l'occasion d'une conférence d'une organisation baptisée "Cyber Z Front", favorable à l'opération des forces russes en Ukraine.
Au moins 32 autres personnes ont été blessées, dont huit sont toujours dans un état grave. Une jeune femme de 26 ans a rapidement été interpellée, présentée par les autorités russes comme étant affiliée à l'opposant historique de Vladimir Poutine, Alexeï Navalny. BFMTV.com fait le point sur ce que l'on sait à ce stade.
• Une explosion dans un café de Saint-Pétersbourg
À 18h13 locales dimanche, la police du district de Vasileostrovskiï, dans la ville de Saint-Pétersbourg, située au nord-ouest de la Russie, a reçu des informations selon lesquelles "une explosion s'était produite dans un café sur le quai Universitetskaïa, au numéro 25".
Selon des précisions données à l'agence de presse d'État russe Tass par le parquet local, l'explosion a eu lieu dans le café "Street Food Bar No. 1", situé le long de la Neva, non loin du centre historique de Saint-Pétersbourg.
• Un célèbre blogueur militaire russe tué
"À la suite de l'incident, une personne est décédée. Il (...) s'agit du blogueur militaire Vladlen Tatarskiï", a rapidement déclaré le ministère russe de l'Intérieur, dans un communiqué, après l'explosion.
Âgé de 40 ans et né dans le Donbass ukrainien, Vladlen Tatarskiï, de son vrai nom Maxime Fomine, était un personnage connu de la blogosphère militaire en Russie, avec plus d'un demi-million d'abonnés sur sa chaîne Telegram.
Vladlen Tatarskiï a développé sa communauté sur le réseau social en publiant, depuis le début de l'offensive militaire russe en Ukraine, des vidéos d'analyse sur la situation sur le terrain et de conseils pour les mobilisés, selon Tass.
Selon les médias russes, il avait été incarcéré en Ukraine pour un braquage en 2011. En 2014, profitant des affrontements déclenchés dans l'est de l'Ukraine par des séparatistes pilotés par Moscou, il s'est échappé de prison pour rejoindre ces combattants. En 2019, il a quitté les forces séparatistes, selon le quotidien Kommersant, pour se faire un nom en tant que blogueur.
En septembre dernier, il avait choqué pendant une réception au Kremlin célébrant l'annexion unilatérale de régions ukrainiennes.
"On vaincra tout le monde, on tuera tout le monde, on volera tous les gens qu'il faudra, tout sera comme on aime", avait-il lâché face caméra.
Lundi, Vladlen Tatarskiï a été décoré à titre posthume de l'Ordre du courage par Vladimir Poutine "pour le courage et la bravoure dont il a fait preuve dans l'exercice de ses fonctions professionnelles", peut-on lire dans un décret publié sur le site du Kremlin.
Selon un dernier bilan, 32 autres personnes ont également été blessées dans l'explosion, dont huit sont dans un état grave. La déflagration a été d'une puissance équivalente à 200 grammes de TNT.
• Un café appartenant à Wagner
Le groupe Cyber Front Z, qui se décrit sur les réseaux sociaux comme "les soldats de l'information de la Russie", a indiqué qu'ils avaient loué le café pour la soirée.
Le café ciblé appartenait au chef du groupe paramilitaire Wagner, Evguéni Prigojine. Ce dernier a souligné lundi matin sur Telegram qu'il avait confié l'établissement en question au "Cyber Z Front".
Dimanche soir, le chef de Wagner a rendu hommage au blogueur dans une vidéo apparemment filmée de la ville de Bakhmout, l'épicentre des combats dans l'est de l'Ukraine.
• Une jeune femme arrêtée
Peu après l'explosion, une source citée par l'agence russe Ria Novosti avait affirmé qu'"une fille" aurait "vraisemblablement" apporté l'engin explosif dans le café. "Il y avait une figurine dans la boîte: un cadeau destiné à M. Tatarskiï", avait ajouté cette source.
Les enquêteurs ont annoncé ce lundi l'arrestation d'une jeune femme, Daria Trepova, une ressortissante russe présentée comme une militante du Fonds de lutte contre la corruption d'Alexeï Navalny, interdit en Russie depuis 2021. L'opposant à Vladimir Poutine, emprisonné depuis plus de deux ans, purge une peine de neuf ans de prison pour escroquerie et fait aussi l'objet de poursuites pour extrémisme.
"J'ai apporté une statuette qui a explosé" dans ce café, a indiqué Daria Trepova, âgée de 26 ans, dans une vidéo publiée lundi après son interpellation par le ministère russe de l'Intérieur. À la question d'un policier lui demandant qui lui avait transmis cette bombe, elle a répondu qu'elle expliquerait cela "plus tard".
• Moscou accuse Kiev et Navalny
Le Comité antiterroriste russe a affirmé ce lundi que l'explosion "a été planifiée par les services secrets de l'Ukraine, qui ont recruté des agents parmi ceux collaborant avec le prétendu Fonds de lutte contre la corruption de Navalny". Le porte-parole du président russe Vladimir Poutine a quant à lui dénoncé "un acte de terrorisme".
Un responsable de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak a démenti dimanche sur Twitter toute implication, estimant qu'il s'agissait de "terrorisme intérieur" dû à des rivalités au sein du régime russe.
Après les accusations portées contre l'organisation d'Alexeï Navalny, sa porte-parole, Kira Iarmych, a dénoncé un coup monté du Kremlin.
"Alexeï sera bientôt jugé pour extrémisme, il risque 35 ans. Et le Kremlin s'est dit: c'est super pour la suite de pouvoir y ajouter 'terrorisme'", a-t-elle écrit sur Twitter.
De con sôté, le chef du groupe Wagner, Evguéni Prigojine, a pris le contre-pied des autorités, en excluant que ces assassinats aient été préparés par les services secrets ukrainiens. "Je n'accuserai pas le régime de Kiev de ces actes. Je pense qu'un groupe de radicaux est en action", a-t-il dit sur la chaîne Telegram de son service de presse.