"Regarder la réalité en face": ce que contient le nouveau plan d'adaptation de la France au changement climatique

Le gouvernement présente ce lundi 10 mars son très attendu troisième plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc). Reporté à maintes reprises notamment après la dissolution de l'Assemblée nationale, ce document vise à préparer la France à un réchauffement pouvant atteindre +4°C en 2100.
Fruit de deux ans de travaux préparatoires, ce plan sera présenté officiellement par la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher. Une première ébauche publiée en octobre a fait l'objet d'une consultation publique durant près de deux mois.
"Ce plan national d'adaptation au changement climatique permet de rappeler la réalité scientifique du dérèglement climatique et de réaffirmer notre ambition à protéger la population face à ses effets déjà perceptibles", écrivait le gouvernement dans un communiqué le mois dernier.
À quoi doit ressembler la France dans ce contexte climatique? Quel est le niveau d'adaptation souhaitable? Quelles sont les solutions à privilégier? Ce plan doit répondre à ces questions en préparant tous les pans de notre société (citoyens, collectivités territoriales, entreprises) à un environnement changeant.
Anticiper une France à +4°C en 2100
"S'adapter n'est pas renoncer", déclarait Agnès Pannier-Runacher. Le gouvernement l'assure: l'idée n'est pas de renoncer à réduire les émissions de gaz à effet de serre (émis par les activités humaines et responsables du réchauffement climatique) mais "d'accepter de regarder la réalité en face et de se préparer activement à une hausse de réchauffement climatique dont les impacts se font de plus en plus sentir en France".
Pour cela, la France a défini une trajectoire de référence pour l'adaptation au changement Climatique (TRACC), afin que tous les acteurs basent leurs stratégies sur une vision commune. Il s'agit d'offrir un cadre de référence permettant d'orienter les décisions à long terme.
Se basant sur des prévisions scientifiques de Météo-France, il s'agit ainsi de préparer une France à une hausse de 2°C en 2030, 2,7°C en 2050 et 4°C en 2100, par rapport à l'ère pré-industrielle. Ces niveaux de réchauffement ont été revus à la hausse car le précédent plan d'adaptation (2018-2022) tablait sur un réchauffement de 1,5°C à +2°C d'ici 2100.
Au vu de la faiblesse des engagements internationaux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, cette trajectoire est considérée comme "optimiste" par certains scientifiques. Le pays s'est d'ores et déjà réchauffé de +1,8°C.
Intégrer un même référentiel dans tous les pans de la société
Le but de cette trajectoire de référence est donc de doter tous les acteurs et décideurs, collectivités, entreprises d'un même référentiel pour développer des stratégies d’adaptation à moyen et long terme. Elle "devra être progressivement intégrée dans l'ensemble des documents de planification publique".
Selon les premiers documents présentés en fin d'année dernière, concrètement, le troisième Pnacc comprend 51 mesures divisées entre cinq principaux axes: "protéger les personnes", "assurer la résilience des territoires, des infrastructures et des services essentiels", "adapter les activités humaines", "protéger les patrimoine naturel et culturel" et "mobiliser les forces vives de la nation".
Il s'agit ici essentiellement de prendre des mesures sur une période allant jusqu'à 2028. L'objectif est de créer un réflexe adaptation dans tous les pans de la société et donc de nous préparer à vivre, travailler, nous déplacer dans une France à +4°C.
Parmi les mesures envisagées, le gouvernement veut, par exemple, bâtir une cartographie nationale d’exposition aux risques naturels qui intégrera l’ensemble des aléas climatiques (inondations, incendies de forêt, submersions, cyclones...) à utiliser pour les professionnels et les particuliers.
Agriculture, santé, logement...
Autre exemple: l'accent est mis sur les assurances face à ces changements. Ainsi, le gouvernement "visera à inciter les assureurs à maintenir une offre assurantielle à tarif abordable sur l’ensemble du territoire et à ne pas délaisser les zones à risques".
En termes de logement, qui subissent de plein fouet la crise climatique, notamment les passoires thermiques et énergétiques, "il s'agira de garder des logements confortables malgré la chaleur" avec de nouveaux diagostics et programmes de rénovation.
La hausse globale des températures pousse également à chercher à mieux protéger les salariés pendant les fortes chaleur. "Dès 2025, seront renforcées les mesures de prévention prévues par les employeurs" et "l'inspection du travail sera en situation de faire cesser immédiatement les situations de danger grave et imminent", explique le gouvernement.
Les 51 mesures déjà dévoilées appellent également à assurer l'adaptabilité et la résilience de domaines comme l'agriculture, la santé ou encore les sites culturels et patrimoniaux.
La question des moyens alloués
Si le document du Pnacc mentionne un réhaussement du "fonds Barnier", qui permet déjà de financer les travaux pour réduire la vulnérabilité des habitations ou des locaux, à hauteur de 75 millions d'euros, la question autour des moyens mis en oeuvre pour cette adaptation au changement climatique perdure.
Lors de sa première présentation en octobre, des scientifiques spécialistes du climat alertaient déjà sur cette problématique. Selon un travail de l'Institut de l’économie pour le climat, entre 1 et 2,5 milliards d'euros devraient être investis chaque année rien que dans le domaine du bâtiment neuf, 4,4 milliards pour la rénovation des logements, et au moins 1,5 milliard d'euros par an pour celui de l’agriculture.
En outre, il semble que peu de mesures présentées dans le Pnacc seront contraignantes. Selon Libération, le gouvernement a déjà fait savoir "qu’aucune évolution législative n’était prévue", c'est-à-dire qu'aucune mesure ne serait soumise au vote du Parlement.
En mars dernier, la Cour des comptes soulignait le retard de l'État face au défi que représente l'adaptation au changement climatique.
La Question météo-climat, votre nouveau podcast BFMTV
Pourquoi ne sommes-nous plus habitués au froid? Comment le changement climatique va-t-il changer notre quotidien? Va-t-on manquer d'eau? C'est quoi un anticyclone? Tous les jours, nos journalistes répondent à vos questions sur le temps qu'il fait et le temps qu'il fera. La Question météo-climat est un podcast quotidien de BFMTV, à retrouver sur le site et l'application et sur toutes les plateformes d'écoute - Apple Podcast, Amazon Music, Deezer ou Spotify.