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Climat

Climat: la montée du niveau des mers serait bien plus grave que prévu

L'atoll de Funafuti dans le sud de l'Océan pacifique, ici en 2004. Cet archipel où vivent 11.500 personnes pourrait être une des premières victimes de la montée des eaux.

L'atoll de Funafuti dans le sud de l'Océan pacifique, ici en 2004. Cet archipel où vivent 11.500 personnes pourrait être une des premières victimes de la montée des eaux. - -

Les climatologues devraient revoir à la hausse vendredi la montée attendue du niveau de la mer, mettant en exergue une menace majeure du réchauffement. Et cette possible montée des eaux ne concernerait pas que quelques îles-confettis du Pacifique.

La hausse du niveau des mers ne concernera pas que les atolls du Pacifique. C'est ce que devraient annoncer des climatologues vendredi, dans le cadre de la conférence du Giec sur le climat à Stockholm.

En 2007, dans son dernier rapport, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) avait estimé que la hausse moyenne des océans pourrait atteindre 18 à 59 cm en 2100.

Or, dans son nouvel état des lieux de la planète, dont le premier volet sera publié vendredi à Stockholm, l'organe scientifique devrait revoir ces chiffres à la hausse. Il évoquera une montée des eaux pouvant dépasser 80 cm à la fin du siècle, selon une version provisoire du résumé encore susceptible de modifications.

Des millions de personnes impactées?

Le sujet est évidemment vital pour nombre d'Etats insulaires du Pacifique (Tuvalu, Maldives, Kiribati), mais avec ces prévisions revues à la hausse, il concerne aussi potentiellement des dizaines de millions d'habitants des mégalopoles côtières et des grands deltas.

Une récente étude parue dans la revue Nature Climate Change chiffre l'impact économique potentiel des inondations dans les 136 villes côtières de plus d'un million d'habitants: en 2050, la facture pourrait dépasser les 1.000 milliards de dollars, si rien n'est fait pour les protéger.

Face à de tels enjeux, le Giec tente d'apporter des réponses toujours plus précises. "On a aujourd'hui réduit la marge d'incertitude de façon considérable", indique Anny Cazenave, spécialiste de l'observation des océans au Laboratoire d'études en géophysique et océanographie spatiale (Legos).

Une montée deux fois plus importante depuis 20 ans

Globalement, la montée du niveau des océans s'est accélérée depuis 20 ans, constatent les climatologues: 3,2 mm par an en moyenne sur les 20 dernières années, contre 1,7 mm en moyenne entre 1901 et 2010.

Désormais, les scientifiques prennent mieux en compte un phénomène encore insuffisamment connu en 2007: l'écoulement dans les océans des glaciers côtiers du Groenland et de l'Antarctique, explique Mme Cazenave, co-auteur comme en 2007 du chapitre sur la mer du nouveau rapport du Giec.

Selon les études les plus récentes, les calottes du Groenland et de l'Antarctique auraient ainsi contribué pour un peu moins d'un tiers à l'élévation du niveau de la mer depuis 20 ans, le reste se répartissant entre la dilatation thermique et la fonte des glaciers de montagne. Pour autant, "on n'a pas encore fait le tour de la question", précise Anny Cazenave, car ce phénomène d'écoulement doit encore être mieux observé et analysé.

L'Atlantique monte plus en Amérique qu'en Europe

Des progrès sont encore possibles pour mieux cerner la très forte variabilité régionale de la montée des eaux. Une variabilité due à des différences dans l'expansion thermique, mais aussi aux mouvements de la croûte terrestre. Dans certaines régions du globe, le sol a en effet tendance à s'enfoncer, par exemple en raison du pompage d'eau ou de l'exploitation de pétrole, autant de facteurs de fragilisation.

C'est le cas, par exemple, sur la côte est des Etats-Unis, où le niveau de l'océan monte plus vite que de l'autre côté de l'Atlantique, selon les scientifiques. Dans certaines régions, la hausse du niveau de la mer serait même "dix fois plus rapide que la moyenne", affirmait récemment le géophysicien Jerry Mitrovica dans la revue Nature. Ces réponses scientifiques sont plus que jamais attendues par les responsables politiques et économiques.

Marc Pédeau avec AFP