Mère voilée prise à partie par un élu RN: retour sur la polémique autour de l'accompagnatrice scolaire
Vendredi 11 octobre, la violente invective d'un élu Rassemblement national de Bourgogne-France-Comté contre Fatima, une accompagnatrice scolaire, est largement diffusée sur les réseaux sociaux et dans les médias. Une vidéo montre le conseiller RN Julien Odoul demander à ce que cette femme sorte de la salle du conseil régional parce qu'elle porte un voile, avant de lui-même quitter les lieux, la présidente de région refusant d'accéder à sa demande.
La théorie d'une "provocation" organisée
S'en suit un torrent de sorties sur le sujet du voile pendant plusieurs jours, mais aussi la diffusion d'une théorie: la présence de cette femme au sein de l'hémicycle serait un "coup monté", voire même "une provocation", comme l'a martelé Julien Odoul lors de l'assemblée plénière régionale du 15 novembre. "Tout dit qu'elle est une militante en réalité", abonde de son côté Marine Le Pen, cheffe du RN.
Une théorie reprise par le président de la République. "Il (Julien Odoul, ndlr) s'est fait coincer! Apparemment cette femme est plus proche des milieux de l’islam politique qu’on ne le croyait", déclarait Emmanuel Macron dans un entretien à l'hebdomadaire Valeurs Actuelles fin octobre.
Ces accusations découlent de la proximité supposée de l'accompagnatrice scolaire avec le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF). Régulièrement critiqué, notamment par le RN qui avait demandé sa dissolution, cette organisation est accusée d'accointances avec les Frères musulmans, de communautarisme ou encore de diffuser un islam politique. Le CCIF "lutte pour un islam politique", déclarait la députée LaREM Aurore Bergé début novembre sur BFMTV.
Une sortie non prévue par la mère
Fatima vit seule dans un quartier populaire de Belfort avec ses deux enfants, dont elle accompagne régulièrement les sorties scolaires, lors desquelles la loi l'autorise à porter son voile. Mais selon les recherches de BFMTV, elle n'avait, ce jour-là, pas prévu de se rendre à cette sortie.
"La veille, la maîtresse m'a laissé un mot dans le carnet pour me demander d'y participer, car aucune autre maman n'était disponible", a expliqué l'accompagnatrice de dernière minute au CCIF.
Sa version a été confirmée à BFMTV par la présidente de la Fédération des parents d'élèves de Belfort, contredisant ainsi la thèse d'un événement prémédité.
"On ne savait même pas ce que c'était le CCIF"
D'autre part, les liens de cette mère de famille avec le CCIF semblent, à ce stade, limités. Fatima a donné son unique témoignage à ce collectif, et est défendue par une avocate du CCIF, dans le cadre de ses plaintes pour "violence en réunion" et "incitation à la haine" par des élus.
Mais "elle comme moi, on ne savait même pas ce que c'était le CCIF avant cette histoire! Ici, on n'est militant de rien du tout, on ne fait pas de politique et Fatima non plus", déclare à BFMTV le responsable d'un club de boxe basé à Belfort, accusé d'être un repère de militants par des sites d'extrême droite.
La mère et son fils pratiquaient la boxe depuis un an dans ce lieu, mais Fatima "est très affectée par tout ça, à tel point qu'elle n'est pas revenue à la salle depuis", continue le responsable.
Fatima n'a pas souhaité répondre à notre demande d'interview car selon un proche, elle "ne veut être le porte-parole de rien ni personne" et souhaite simplement "protéger ses enfants".