Les précipitations de ces derniers jours ont-elles suffi pour remplir les nappes phréatiques?

Cette photo prise le 3 août 2022 montre le lac asséché de l'Entonnoir, connu sous le nom de lac du Bouverans, à Bouverans, dans l'est de la France. - SEBASTIEN BOZON / AFP
À l'approche de l'été, la France est bien loin d'être sortie d'affaire. Alors que l'alerte est tirée de longue date en ce qui concerne le niveau parfois critique des nappes phréatiques sur le territoire, les dernières précipitations en date qui ont touché le pays ont-elles réellement changé la donne?
"Nappes phréatiques en déficit"
Ce dimanche en Normandie, région touchée par de forts orages, de 20 à 40 litres d'eau sont tombés par m² tandis que, plus tôt dans le mois, dans le sud du pays, ce sont localement entre 100 et 150 litres d’eau au m² qui ont été recensés.
Malgré tout, ces précipitations sont bien loin de suffire pour inverser la situation. Selon le site Info-Sécheresse.fr, seuls dix départements français sont placés en couleur bleue, synonyme de bon ou très bon niveau des nappes phréatiques.
À l’inverse, 17 sont en orange, niveau bas, et 15 en rouge, niveau très bas, des chiffres qui n'ont que très sensiblement évolué ces dernières semaines.
"Il faut être prudent. Vous avez 423 masses d’eau (nappes phréatiques, ndlr), et sur ces 423 masses d’eau vous en avez 280 qui sont en déficit, plus de la moitié. La pluie n’a pas arrangé les choses, elle est venue remplir les cours d’eau, mais elle n’est pas venue soutenir les nappes phréatiques en déficit, donc prudence", avertit ce lundi matin sur BFMTV Olivier Depraz, directeur général d’ImaGeau, et à l'origine du site Info-Sécheresse.
Ruissellement
En réalité, les fortes pluies de ces derniers jours n'ont pas servi à remplir les nappes phréatiques, mais à humidifier les sols sur une profondeur qui va de 0 à 40 centimètres. Trop secs, de nombreux sols sont devenus imperméables à ces pluies, et l'eau, au lieu de les pénétrer, va au contraire ruisseler et parfois provoquer des dégâts.
Point positif, cette arrivée d'eau a permis de remplir les cours d'eau, les bassins, mais a également profité à la végétation "qui s'est servie", explique encore Olivier Depraz.
Dans les Bouches-du-Rhône, ce phénomène est particulièrement visible dans le secteur de l'Huveaune, un fleuve qui serpente dans le département et qui se jette dans la Méditerranée à Marseille. Les fortes précipitations de ces derniers jours ont bien fait monter son niveau, mais sans effet sur les nappes.
"Aujourd'hui, la nappe qui est sous nos pieds a un niveau de recharge qui est quasi nul. Tout a été pompé par la végétation ou a été trop rapidement transféré à la rivière", fait valoir Eric Brenner, chargé de mission ressources en eau à l'EPAGE HuCA.
"Ça va être compliqué"
Pour les semaines à venir, avec l'arrivée de l'été, la situation risque donc d'être extrêmement tendue dans les départements concernés. "Ça va être compliqué d’être entièrement soulagé. Ce qui peut nous soulager ce sont les précipitations, et je pense que maintenant l’été arrive", reprend Olivier Depraz.
"Je conseille d’être conscient que la ressource en eau est un bien commun qui peut être en difficulté, et de faire en sorte de participer à une sorte de mise en œuvre de frugalité en terme de dépenses de ressources en eau", ajoute-t-il.
En raison d'un automne et d'un hiver extrêmement secs, les nappes phréatiques n'ont pas pu se remplir convenablement. La semaine dernière, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a estimé que le niveau des deux tiers des nappes phréatiques françaises sont sous les normales de saison.