La ministre de la Culture et plusieurs personnalités de gauche déplorent l'annulation du concert de Black M

La polémique n'a pas fini d'enfler autour du concert de Black M prévu le 29 mai pour les commémorations du centenaire de la bataille de 1916. Au lendemain de son annulation par la mairie de Verdun en raison d'une importante contestation de la part de la droite et de l'extrême-droite, et donc de "risques forts de troubles à l'ordre public", la gauche condamne ce renoncement.
Parmi les réactions les plus fortes, celle de la ministre de la Culture, Audrey Azoulay, qui s'est exprimée devant des professionnels du cinéma à l'occasion du Festival de Cannes:
"Des voix déchaînées ont obtenu l'annulation d'un concert au nom d'un ordre moral nauséabond et décomplexé. N'acceptons jamais cela. Ce n'est pas la première fois que l'autocensure succède à ces coups de forces inacceptables".
Quelques heures auparavant, le premier secrétaire du Parti socialiste avait déjà regretté cette annulation. "Pas fan de Black M, mais la police de la pensée du FN, de Menard et des réacs républicains ça commence à faire beaucoup!", a dénoncé sur Twitter Jean-Christophe Cambadélis, faisant notamment référence au maire de Béziers Robert Ménard qui avait demandé l'annulation d'un concert qu'il avait qualifié de "viol de la République".
"Ne pas capituler devant cette idéologie frontiste"
L'ancien ministre de la culture Jack Lang a également déploré la décision de la mairie de Verdun, estimant d'ailleurs qu'il était "illégal d'interdire une manifestation artistique comme celle-là [car] aucune raison ne le justifiait". Selon lui, "il n'y avait aucune menace à l'ordre public, aucun risque de violence". Samedi sur France Inter, le socialiste a encore déclaré:
"Je souhaiterais que nous soyons nombreux à dire que nous condamnons cette interdiction. Il ne faut pas capituler devant cette idéologie frontiste".
Les condamnations de la gauche ont justement été nombreuses samedi matin. Faisant référence aux élus de droite et d'extrême-droite qui avaient dénoncé le choix d'un chanteur dont les paroles ont fait parfois polémique, l'ancienne garde des sceaux Christiane Taubira a écrit sur sa page Facebook:
"Ceux qui n'ont jamais ni fauté ni combattu sont les rois du bannissement. Ils n'ont jamais prononcé une parole de travers puisque toutes leurs paroles sont de travers. Ils n'ont rien à voir dans les idées putrides qui naviguent sans cours d'eau pour stigmatiser par l'origine, la croyance, la culture, la façon d'aimer."
Dans la réaction de Black M, "des valeurs républicaines"
Invité sur le plateau de BFMTV, Alexis Corbière, porte-parole de Jean-Luc Mélenchon pour la présidentielle de 2017, a regretté que "trop de haine [aie]nt été dites" dans cette polémique. L'homme de Parti de gauche s'est dit touché par le communiqué publié par Alpha Diallo, du vrai nom de Black M, dans lequel le rappeur se présente comme "un enfant de la République" qui était "fier de participer à ces cérémonies", lui dont le grand-père a été tirailleur sénégalais lors de la guerre 39-45. Un texte salué par Alexis Corbière:
"Il y a là des valeurs fraternelles, républicaines et qui sans doute auraient pu être exprimées sur scène et qui auraient pu matérialiser le fait que même cette culture, le rap - qui plaît à une jeunesse notamment dans les quartiers populaires, les banlieues -, elle pouvait faire le lien avec ces cérémonies. Donc on voit bien que les arguments qui ont été utilisés contre ce concert ont été assez stéréotypés, souvent xénophobes. (...) Ce n'est pas comme ça qu'on réconciliera les anciens combattants et la jeunesse."
La réaction de Black M a également été saluée par l'ancienne ministre de la Culture Aurélie Filipetti, qui a vu là "une belle leçon donnée aux racistes qui ont obtenu l'annulation de son concert."
Vendredi, le secrétaire d'État aux Anciens combattants Jean-Marc Todeschini avait déjà exprimé sa "colère de voir qu'un déferlement de haine" avait conduit à l'annulation du concert.