La réforme du collège, un casse-tête depuis 1975
Najat Vallaud-Belkacem n'en finit pas d'essuyer les critiques sur sa réforme du collège. Le texte, qui doit s'appliquer en 2016, reçoit une pluie de critiques venant essentiellement de la droite, à commencer par Nicolas Sarkozy. Lundi soir, le chef de l'UMP s'en est pris à la réforme du gouvernement.
"Au nom de l'égalitarisme, ils ont construit l'école de l'injustice", a scandé le président de l'UMP. Bruno Le Maire, à l'initiative d'une lettre signée par 200 députés destinée au chef de l'Etat dénonce, lui, un nivellement de l'enseignement par le bas et une réforme "naufrage".
Un débat récurrent depuis 1975
Le texte met en place, entre autres, des enseignements transversaux et des accompagnements personnalisés. Pour faire de la place à ces nouveaux enseignements, les collégiens auront chaque semaine un peu moins d'heures de français ou de maths. Des heures redistribuées dans les pratiques interdisciplinaires.
Face aux critiques, Najat Vallaud-Belkacem tient sa ligne et affirme que sa réforme permettra à davantage d'élèves d'être diplômés et rendra le collège moins élitiste. Démocratisation contre perte de niveau, ce débat date en fait de la création du collège unique en 1975. "Chaque fois que les débats sont centrés sur la question du collège, ils sont violents, outranciers", rappelle l'historien de l'Education Claude Lelièvre dans le Parisien.
En 1975, René Haby le ministre de l'Education de l'époque avait mis en place le collège d'aujourd'hui qui créait une filière unique pour tous les élèves. Déjà à cette époque explique Claude Lelièvre, s'opposaient les partisans "d'un collège qui assure avant tout une bonne scolarité obligatoire à tous" et ceux en faveur d'un enseignement plus élitiste.
Un clivage droite-gauche autour du collège
Pour Bruno Poucet, également historien de l'Education, l'opposition qui se forme aujourd'hui autour du texte a un fondement idéologique classique et ancien. "La droite résiste souvent aux mesures éducatives qui proposent de revenir sur des avantages réservés à une élite", explique-t-il à 20minutes.fr.
Najat Vallaud-Belkacem tient la même conclusion, rappelant que de nombreuses réformes scolaires ont connu des oppositions virulentes. "Jules Ferry rendant l'école publique obligatoire, Jean Zay prolongeant l'âge de cette obligation ou René Haby instaurant le collège unique", détaille la ministre dans le JDD. "A chaque fois, ceux qui cherchent à démocratiser l'école et la réussite sont accusés par les conservateurs de "niveler par le bas" et de faire de 'l'égalitarisme'", se défend Najat Vallaud-Belkacem.
Cette fois-ci toutefois, même si la ministre a reçu le soutien du président de la République et de Manuel Valls, des voix à gauche se sont également fait entendre sur certains points de la réforme. C'est le cas sur la suppression des classes bilangues. Pour le gouvernement, elles ne profiteraient qu'à 15% des élèves. Jack Lang à l'origine de ces classes en 1992 les défend. "Les filières d'excellence ne sont pas réservées aux élites, elles existent aussi dans les quartiers difficiles", assure-t-il. La suppression de ces classes a aussi soulevé "l'inquiétude" de Jean-Marc Ayrault, ancien professeur d'allemand. Sur ce point Najat Vallaud-Belkacem a voulu rassurer, le nombre de postes de professeurs d'allemand devrait augmenter avec la mise en place d'une seconde langue dès la 5e.
Le 19 mai prochain, la ministre devra malgré tout faire face à un appel à la grève lancé par le principal syndicat du secondaire. Mais Najat Vallaud-Belkacem a prévenu, elle soutiendra sa réforme "jusqu'au bout".