BFMTV
Education

Ecole: des enseignants ne veulent plus que "le masculin l'emporte sur le féminin"

placeholder video
Ils sont un peu plus de 300 profess.eurs.euses à vouloir changer une règle de grammaire qui paraissait gravée dans le marbre. Mais le ministre Jean-Michel Blanquer ne le voit pas du même œil.

Plus de 300 professeurs ont publié cette semaine une tribune où ils s'engagent à ne plus enseigner la règle de grammaire "résumée par la formule 'le masculin l'emporte sur le féminin'", une initiative qui ne rencontre pas les faveurs du ministre de l'Education.

Dans cette tribune, publiée sur le site Slate.fr, 314 professeurs des écoles, collèges et lycées déclarent "avoir cessé ou (s')apprêter à cesser d'enseigner" cette règle de grammaire, qui veut par exemple que dans un groupe nominal, l'adjectif prend toujours le genre masculin s'il est précédé ou suivi de noms communs féminins et masculins. Ils souhaitent que l'adjectif s'accorde en genre avec le nom commun le plus proche.

Les signataires donnent trois raisons à leur décision: cette règle n'a pas toujours été en vigueur, son application reflétait une volonté politique de maintenir les femmes dans une position d'infériorité, la répéter au sein des écoles conforte les stéréotypes de genre.

Eliane Viennot, "professeuse" émérite de littérature qui a lancé une pétition sur change.org pour soutenir l'initiative, a dit à RMC qu'il n'est "pas possible d'expliquer aux enfants qu'il y a un domaine, la langue française, où le masculin l'emporte sur le féminin alors qu'on essaie partout ailleurs de leurs expliquer qu'il faut faire avancer l'égalité".

Pour elle ce "combat est tout sauf futile". Pour preuve, selon elle, les "levées de boucliers" et autres "réactions hystériques" soulevées par le débat.

Le "masculin" peut s'apparenter au "genre neutre"

Interrogé à ce sujet, le ministre de l'Education Jean-Michel Blanquer a jugé que l'expression "le masculin l'emporte sur le féminin" n'est "sûrement pas une bonne formule". "Il faut dire simplement qu'en cas de pluriel, on accorde au masculin, ce qui dans la langue française s'apparente souvent au genre neutre", a-t-il déclaré mardi lors d'un déplacement dans un collège à Nanterre.

"La langue française n'est pas à instrumentaliser pour des combats aussi légitimes soient-ils", a-t-il ajouté, précisant qu'il n'était "pas favorable" à la pétition lancée par les signataires.

Sur un sujet connexe, le ministre avait jugé sur BFMTV et RMC que l'écriture inclusive (qui consiste à intégrer les terminaisons féminines et masculines des mots accordés) rajoutait "une complexité qui n'(était) pas nécessaire".

Ces derniers expliquent dans leur tribune que cette règle date du XVIIe siècle. Les accords se faisaient auparavant au gré de chacun "comme c'était le cas en latin et comme c'est encore souvent le cas dans les autres langues romanes". Cette règle a attendu "la généralisation de l'école primaire obligatoire pour être appliquée massivement".

D'autre part, selon eux, "l'objectif des promoteurs de la nouvelle règle n'était pas linguistique mais politique". Et de citer un passage de la Grammaire générale de Beauzée (1767) qui indique que "le masculin est réputé plus noble que le féminin à cause de la supériorité du mâle sur la femelle".

Enfin, répéter aux enfants que 'le masculin l'emporte sur le féminin' "dans les lieux mêmes qui dispensent le savoir et symbolisent l'émancipation par la connaissance induit des représentations mentales qui conduisent femmes et hommes à accepter la domination d'un sexe sur l'autre".

David Namias et AFP