"Aventure collective", transparence: les pistes pour gagner la confiance des Français sur le vaccin

Une infirmière prépare une dose de vaccin Pfizer-BioNTech contre le Covid-19 dans un établissement de San Juan, Porto Rico, le 15 décembre 2020 - Ricardo ARDUENGO © 2019 AFP
Le Premier ministre Jean Castex a annoncé le début de la vaccination contre le Covid-19 en France "dès la dernière semaine de décembre". En plus des défis logistiques et humains que va représenter la campagne vaccinale au niveau national, le gouvernement français doit aussi prévoir une campagne de communication auprès de la population, car la vaccination n'étant pas obligatoire, se faire vacciner sera un choix, une décision personnelle.
"La réussite de cette campagne repose sur la confiance de nos concitoyens dans le vaccin, et plus largement dans l’action publique qui sous-tend la politique vaccinale, qui doit être restaurée", écrit l'Institut Montaigne - plateforme de réflexion sur les politiques publiques - dans une note donnant quelques pistes sur le sujet, en attendant la campagne gouvernementale.
· Mettre en avant la surveillance des vaccins
Ces conseils interviennent alors qu'un Français sur deux déclare ne pas vouloir se faire vacciner, selon un sondage pour BFMTV publié ce jeudi, un chiffre en baisse, mais qui reste élevé. Parmi les personnes interrogées refusant le vaccin, 63% évoquent le manque de recul sur la maladie et le vaccin et 51% expliquent craindre des effets secondaires indésirables.
"Le questionnement par rapport à des nouveaux vaccins il est tout à fait légitime, on est sur une révolution technologique avec des nouveaux vaccins dont les premières données sont très rassurantes en terme d'efficacité et de sûreté mais il est logique que les gens se questionnent", rappelle ce jeudi sur BFMTV Christophe Rapp, infectiologue à l'hôpital américain de Paris.
En ce sens, la surveillance des effets du vaccin fait partie des points clefs pour gagner la confiance des Français sur le sujet. L'Institut Montaigne rappelle la nécessité d'un système de surveillance continue permettant "de générer des données sur l’efficacité réelle, la sécurité des vaccins distribués mais également sur l’état de l’immunité au niveau individuel puis collectif". Un rapport sur les effets indésirables signalés sera publié chaque semaine et un "dispositif renforcé" sera mis en place pour faciliter leur déclaration, a déjà promis l'Agence du médicament.
Les Français et les professionnels de santé pourront "déclarer [des effets indésirables] sur le site du gouvernement, il y a un portail de signalement, c'est très important de le connaître, il faudra qu'on en fasse la promotion", explique également Christophe Rapp.
· Créer "une aventure collective"
L'institut Montaigne conseille également de valoriser les échanges entre les individus au niveau local pendant la campagne, "de mobiliser des figures de proximité" comme des élus, des professionnels de santé ou des associations, "en privilégiant la communication de pair à pair en rendant chacun acteur de la communication vaccinale".
"Il va falloir attendre les échanges entre le patient et le médecin pour favoriser l'acceptabilité", explique par exemple Christophe Rapp. Il faut "créer des communautés de personnes, auxquelles les gens peuvent s'identifier, pour instaurer de la confiance mutuelle", déclare dans Le Parisien Nicolas Bauquet, directeur délégué à la recherche et à la transformation publique de l'Institut Montaigne et co-auteur du rapport.
"La définition d’un but collectif est en elle-même un levier essentiel de réussite, parce qu’elle définit la campagne de vaccination non comme une myriade de décisions individuelles mais comme une aventure collective", écrit l'Institut Montaigne.
Pour l'organisme, il s'agira de concentrer la campagne de communication sur des personnes favorables, ou du moins "pas hostiles" au vaccin, mais qui hésite face à celui du Covid-19. "Pour ceux-ci, qui forment une majorité de la population, le passage à l’acte vaccinal n’est pas acquis et requiert une capacité à faire passer de l’intention à l’action".
· Une organisation claire et transparente
Face à la méfiance, une transparence maximale est évidemment attendue sur tous ces sujets: que ce soit sur les données de pharmacovigilance recueillies au fur et à mesure (immunité, effets secondaires...), mais aussi sur les doses disponibles dans le pays et sur les étapes vaccinales à suivre. En France la Haute autorité de la Santé avait publié ses recommandations fin novembre, conseillant de vacciner d'abord les personnes les plus fragiles dans les Ehpads.
La qualité de l’exécution de cette campagne "jouera un rôle majeur dans la question de la confiance inspirée par le vaccin", écrit l'Institut Montaigne. Il conseille au niveau national "une organisation claire, transversale et ouverte", et au niveau territorial, de "clarifier le dispositif pour inclure tous les acteurs".
Les Français suivent déjà, depuis plusieurs mois, les évolutions pas à pas de la recherche pour un remède contre le Covid-19. "Il y a rarement eu autant de transparence sur toutes les étapes de la recherche qui ont conduit à la création de ces vaccins", souligne sur BFMTV Antoine Flahault, directeur de l'institut de santé globale de l'université de Genève. "C'est absolument unique dans l'histoire de la médecine moderne de voir en si peu de temps autant d'investissement, de recherches", au niveau mondial.
