Attentats de Paris: la mort d'Abaaoud est-elle vraiment une victoire pour la France?

Le cerveau présumé des attentats du 13 novembre est mort. Une victoire politique pour la France, mais qui confirme qu'un jihadiste hautement recherché a pu entrer en France et y circuler.

Abdelhamid Abaaoud, le djihadiste belge soupçonné d'avoir commandité les attentats du 13 novembre, est mort. Son corps a été formellement identifié parmi les dépouilles retrouvé dans l'appartement assiégé mercredi par la BRI et le RAID.

Traqué depuis 5 jours

La mort d'Abaaoud a été saluée par Manuel Valls qui a tenu à féliciter les services français et la police. La traque de l'homme, identifié à peine 24 heures après les attentats comme le probable commanditaire des attaques, a été largement facilité par un témoignage dont on sait pour l'instant peu de chose. 

Pour Mathieu Guidère, spécialiste du terrorisme, la mort d'Abaaoud est un "succès" pour la France, "qui nous met à l'abri d'actions de représailles". Selon l'expert, Abaaoud n'est pas n'importe qui, c'est un chef de guerre, un formateur, un artificier, quelqu'un de très important dans le réseau francophone jihadiste". Selon Bernard Cazeneuve, il était soupçonné d'avoir fomenté quatre attentats ou tentatives d'attentats en Europe depuis le printemps.

Un avis que tempère François-Bernard Huygue, docteur en science politique. Pour lui, la mort d'Abaaoud laisse le champ libre à tous ceux qui l'ont pris en modèle. "Ca va se bousculer pour prendre sa succession au niveau opérationnel car je crains qu'il a suscité des vocations chez Daesh" explique l'universitaire. En outre, la mort d'Abaaoud, même si elle semblait inévitable au vu de la violence de l'assaut, signe la perte d'une mine d'informations que détenait le belge.

Le problème de sa présence en France

Si la mort d'Abaaoud est une victoire opérationnelle pour la France, la confirmation de sa présence à Saint-Denis pose la question d'une faille sécuritaire. Sur l'antenne de France Info, David Thomson, journaliste spécialiste du jihadisme, estime qu'on est "au-delà de la faille sécuritaire".

Le journaliste explique en effet qu'Abaaoud était une figure célèbre du jihadisme francophone, et qu'il était traqué par toutes les polices d'Europe après l'attentat manqué de Verviers qu'il avait commandité. Comment a-t-il pu circuler librement en Europe, et en France, sans être repéré par les services français et européens ?

Une faille d'autant plus inquiétante que pour les attentats de Paris, les jihadistes étaient une dizaine. Alors que l'opposition réclame une commission d'enquête sur les événements du 13 novembre (ce qui est impossible tant que l'affaire est traitée par la justice), le gouvernement n'a pour l'instant donné aucune explication quant à la présence d'Abaaoud en France.

Paul Aveline