Variant Delta: est-il risqué de rouvrir les boîtes de nuit dès ce vendredi?

Une boîte de nuit (photo d'illustration) - Linh Pham / AFP
Vendredi après des mois de fermeture dus à la pandémie de Covid-19, c'est le grand retour des boîtes de nuit, qui pourront rouvrir en France. Cette décision avait été annoncée le 21 juin dernier, mais depuis le variant Delta a progressé dans le pays, et représente désormais plus de 40% des contaminations. Sa circulation fait craindre aux autorités l'arrivée d'une quatrième vague dès juillet, et le retour des restrictions.
Mais malgré cette situation, il n'est pour l'heure pas question de revenir sur l'ouverture des boîtes de nuit. Interrogé mercredi à ce sujet, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a seulement rappelé qu'un pass sanitaire serait demandé à l'entrée des établissements et qu'un "protocole sanitaire extrêmement rigoureux a été mis en place", avec une jauge de 75%. Tellement strict d'ailleurs que 70% des boîtes de nuit en France ne devraient pas ouvrir leurs portes ce vendredi.
Un cluster en discothèque aux Pays-Bas
Le pass sanitaire comme clé d'entrée permet en théorie que la soirée ne se déroule qu'entre personnes non-contaminées. C'est sous cette forme que les boîtes de nuit ont rouvert aux Pays-Bas le mois dernier. Mais ce week-end, un cluster comprenant 165 cas positifs a été détecté après une soirée de 600 personnes dans la ville d'Enschede. Une enquête est en cours pour comprendre ce qu'il s'est passé, et savoir si des fraudes ont eu lieu avec des pass sanitaires. Les autorités ont appelé toutes les personnes présentes ce jour-là à se faire dépister.
Un exemple qui pourrait alerter à quelques heures de la réouverture en France, et alors que la Catalogne (Espagne) a annoncé la fermeture de ses boîtes de nuit en intérieur en début de semaine, après une augmentation du nombre de cas due au variant Delta. Mais dans ce cas-là, c'est moins les boîtes de nuit directement qui étaient visés que les lieux à haut potentiel de contamination, où se rassemblaient notamment les jeunes, dont le taux d'incidence a fortement augmenté dernièrement.
Il faudra désormais présenter un test antigénique ou PCR négatif, ou être vacciné, pour participer à des évènements en plein air réunissant plus de 500 personnes.
La situation épidémiologique en Catalogne est extrêmement compliquée", a expliqué Patricia Plaja, porte-parole du gouvernement autonome catalan, lors d'une conférence de presse mardi. "Le nombre des cas croît à un rythme exponentiel, très supérieur à ce que nous pouvons tolérer."
En France, les plus jeunes sont également dans le viseur des autorités sanitaires. "Chez les 20-29 ans, le taux d'incidence a pratiquement doublé en une semaine, cette situation est liée en France comme dans le reste du monde au variant Delta", expliquait Gabriel Attal mercredi.
"Le contexte festif rend difficile le respect des règles de distanciation ou du port du masque"
Et les jeunes sont aussi moins vaccinés que leurs aînés: pour le moment, 46,56% des 18-29 ans ont reçu au moins une dose de vaccin en France, et 21,55% sont totalement vaccinés, ce qui n'est pas suffisant pour empêcher l'épidémie de circuler. "Si parallèlement à cette augmentation de cas, on avait une augmentation de la vaccination, on serait beaucoup plus rassurés, malheureusement on n'a pas encore une majorité de personnes en France qui sont complètement protégées par la vaccination, c'est-à-dire par deux doses", expliquait mercredi sur RMC l'infectiologue Karine Lacombe.
En ce sens, "vue l'augmentation très rapide du nombre de cas dus à ce fameux variant Delta en France on peut se poser la question de la réouverture dans les jours à venir des boîtes de nuit, ce d'autant que le nombre de personnes positives est particulièrement important chez les plus jeunes", déclarait-elle. "Peut-être que c'est une mesure un peu trop précoce."
"Il n'y a aucune étude sur le risque de contamination réel dans les boîtes de nuit", expliquait sur BFMTV l'infectiologue Jérémy Zeggagh, l'un des co-organisateur de l'expérimentation française dans les boîtes de nuit, annulée faute de participants. Mais avoir des personnes concentrées dans une même pièce, potentiellement alcoolisées et dansant collées serrées, sans masque, apparaît comme une contre-indication en temps de pandémie. D'autant plus si la boîte de nuit est en intérieur, où l'on se contamine beaucoup plus.
C'est en raison des risques de contamination inhérents à ces établissements que le Conseil d'État - saisi par les professionnels - avait, dans un premier temps, rejeté la possibilité de leur réouverture, expliquant que "l’activité de danse qui y est pratiquée inclut des contacts physiques rapprochés et le contexte festif rend difficile le respect des règles de distanciation ou du port du masque". "Aucune mesure autre que la fermeture, ni même la réouverture en format bar de nuit, ne peut apporter de garanties équivalentes pour maitriser le risque de contamination."
Plus d'informations dans les semaines à venir
La réouverture progressive des boîtes de nuit dans plusieurs pays ressemble donc, pour le moment, à une expérimentation grandeur nature, dont les résultats seront connus dans les semaines à venir. Des régions ont par exemple fait le choix de n'imposer aucune restriction à l'entrée de ces établissements, comme le Royaume-Uni, qui prévoit de réouvrir ses discothèques le 19 juillet.
Le week-end dernier, 250 personnes ont participé à une expérimentation à Bruxelles pour évaluer l'incidence des boîtes de nuit sur la circulation du virus, en vue d'une ouverture potentielle dans les semaines à venir. Ils ont dansé sans masque, et sans distanciation sociale. Une expérimentation similaire avait eu lieu à Leipzig (Allemagne) courant juin.
En France, dans les jours à venir, "il y aura de nombreux contrôles pour vérifier que le pass sanitaire est bien utilisé, sur le protocole sanitaire et sur les jauges" des discothèques, a précisé Gabriel Attal. "Et si on devait constater qu'un établissement ne respecte pas le cadre qui a été fixé, évidemment nous prendrons des décisions administratives de fermeture", a-t-il prévenu.
