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Risque nucléaire: Olivier Véran assure que la France est dotée de suffisamment de pastilles d'iode

Le ministre de la Santé français Olivier Véran à l'Assemblée nationale à Paris, le 30 novembre 2021

Le ministre de la Santé français Olivier Véran à l'Assemblée nationale à Paris, le 30 novembre 2021 - STEPHANE DE SAKUTIN © 2019 AFP

Le ministre de la Santé assure, dans une interview au Parisien, que la France est équipée de suffisamment de pastilles d'iode pour protéger l'ensemble de la population en cas d'accident ou d'attaque nucléaire. Le ministère de la Santé affirmait pourtant le contraire à un député quelques mois plus tôt.

"Les yeux dans les yeux", le ministre de la Santé veut rassurer. Dans une interview au Parisien ce dimanche, Olivier Véran assure que la France est dôtée de suffisamment de pastilles d'iode dans le cas où elle serait confrontée à une attaque nucléaire liée à une escalade du conflit russo-ukrainien. Ces comprimés sont censés protéger des cancers de la thyroïde en cas d'exposition à la radioactivité.

"C’est une donnée classifiée, car liée à des questions de conflits", répond d'abord le ministre au Parisien, avant d'assurer: "Mais je peux vous dire les yeux dans les yeux que nous avons assez d'iode pour couvrir tous les besoins de la population si c’était nécessaire".

Un manque de 34,3 millions de pastilles

Pourtant, en fin d'année dernière, le ministère de la Santé avait déjà répondu à la question, posée à l'écrit par le député écologiste François-Michel Lambert, comme n'a pas manqué de le rappeler ce dernier sur Twitter. En septembre 2021, le ministère avait ainsi indiqué que la France avait à disposition 95,7 millions de comprimés d'iode, alors qu'il en faudrait 130 millions pour assurer la protection des populations, même situées "en dehors des zones géographiques correspondantes aux plans particuliers d'intervention délimités autour des centrales nucléaires".

"Conformément au plan national de réponse à un accident nucléaire ou radiologique majeur, les stocks stratégiques de l'Etat visent à permettre une distribution de comprimés d'iode stable en tout point du territoire en situation d'urgence (...), soit 60 millions de personnes", écrivait à l'époque le ministère. "Ainsi, les stocks stratégiques visent à avoir 130 millions de comprimés d'iodure de potassium".

Or "à la date du 29 juin 2020", ce stock "s'établissait à environ 95,7 millions de comprimés". Donc si le stock français est toujours le même aujourd'hui, 34,3 millions de pastilles viendraient à manquer en cas d'incident nucléaire.

Depuis début mars, les Européens prennent les devants face aux menaces nucléaires venues de Moscou. En France comme dans les autres pays européens, les pharmacies constatent une forte demande de pastilles d'iode. En effet, prendre un comprimé d’iode stable permet d'empêcher d'absorber de l’iode radioactif qui pourrait être rejeté dans l’environnement en cas d’accident nucléaire.

Mise en garde vis à vis de l'automédication

L'IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), explique: "La thyroïde va absorber l’iode stable jusqu’à saturation, et ne pourra donc plus incorporer l’iode radioactif qui serait éventuellement respiré ou ingéré", ce qui réduit les risques de développer un cancer.

Toutefois, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire rappelle que les comprimés d’iode stable doivent être administrés en situation accidentelle et uniquement sur instruction des autorités. Il s'agit notamment des mesures qui peuvent être prises par le préfet. Dans le cas d'un risque nucléaire, "tous les moyens (télévision, radio, véhicules avec haut-parleur…) seront utilisés pour donner la consigne de prise d’iode, sous la responsabilité du préfet".​

Surtout, la prise d'iode "préventive" peut présenter plus de risques que de bénéfices. Là encore, l'IRSN rappelle que les comprimés doivent être pris "au plus tôt une heure avant l'exposition à la radioactivité, et au plus tard dans les 6 à 12 heures qui suivent".

"Plus tôt, leur efficacité sera considérablement réduite. Plus tard, au-delà de 24 heures, leurs effets secondaires sont plus graves que les bénéfices attendus", prévient l'Institut.

Selon les profils, l'automédication pour de l'iode pourrait se révéler dangereuse et provoquer de possibles effets secondaires thyroïdiens et cardiaques.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV