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Maladie d’Alzheimer: un diagnostic bientôt possible grâce à un test sanguin?

Des personnes âgées dans une maison de retraite à Paris en 2010 (image d'illustration)

Des personnes âgées dans une maison de retraite à Paris en 2010 (image d'illustration) - MIGUEL MEDINA / AFP

Les autorités sanitaires américaines ont autorisé le premier test sanguin de diagnostic de la maladie d'Alzheimer, ce qui devrait permettre une prise en charge plus rapide et plus efficace des patients.

Une étape importante. La Food and drug administration (FDA) des États-Unis a donné mi-mai son feu vert au premier test sanguin de diagnostic de la maladie d'Alzheimer, une technologie prometteuse qui pourrait arriver bientôt en Europe et en France.

La maladie d'Alzheimer est la forme la plus courante de démence. Elle s'aggrave avec le temps, privant progressivement les personnes atteintes de leurs souvenirs et de leur indépendance. 17% des personnes de plus de 75 ans en sont atteintes, selon la fondation Vaincre Alzheimer. Mais si la maladie touche des centaines de milliers de patients, seulement 1 sur 2 est correctement diagnostiqué.

· Comment fonctionne ce test?

Le test, mis au point par la firme japonaise Fujirebio Diagnostics, mesure la présence dans le sang de la protéine bêta amyloïde et la protéine tau, caractéristiques de la maladie d'Alzheimer. En raison de leur très faible quantité, elles n'étaient jusqu'à présent que difficilement détectables lors d'une prise de sang.

Attention, un test positif ne signifie pas automatiquement que la personne est atteinte de la maladie. "Il s'agit bien d'un test diagnostic et non d'un dépistage", précise à BFMTV.com le professeur Philippe Amouyel, directeur général de la Fondation Alzheimer.

Quand un dépistage détecte la présence d’une maladie à un stade précoce chez des personnes a priori en bonne santé, le test de Fujirebio Diagnostics s'adresse à des patients présentant déjà des symptômes et doit être confirmé par d'autres informations cliniques, comme des test neurocognitifs.

"Les protéines que l'on cherche se trouvent en grande quantité chez les malades d'Alzheimer, mais on les trouve également en petite quantité chez des gens qui n'ont pas de maladie d'Alzheimer. Le test étant tellement sensible, la maladie pourrait être détecté à tort", poursuit le spécialiste.

· Quel est l'avantage du test sanguin?

Aujourd'hui, le diagnostic de la maladie d'Alzheimer peut être posé à partir de différents examens: tests neuropsychologiques, IRM, tomographie par émission de positons (ou PET scan, une imagerie qui mesure l'activité métabolique). Les médecins peuvent aussi réaliser une ponction lombaire qui va mesurer dans le liquide céphalo-rachidien les protéines que l'on trouve en grande quantité dans le cerveau d'un patient atteint de la maladie d'Alzheimer.

"Avec ces éléments, et en observant l'évolution des symptômes, on fait un diagnostic de syndrome démentiel. Car l'Alzheimer, c'est 60 à 70% des formes de démence, mais il existe d'autres formes comme la maladie à corps de Lévy ou les démences fronto-temporales", explique le professeur Philippe Amouyel.

Le problème de ces examens est qu'ils sont "relativement lourds, qu'ils prennent du temps et, pour la ponction lombaire, sont quand même assez invasifs". Le test sanguin, plus simple et plus rapide, est donc une réelle avancée.

· Vers une meilleure prise en charge des patients?

Il existe actuellement deux traitements approuvés de l'Alzheimer, les lecanemab et donanemab, qui ciblent la plaque amyloïde et ralentissent modestement le déclin cognitif, sans permettre une guérison totale.

Un autre traitement agissant sur la première phase de la maladie, le Leqembi, vient d'être autorisé par les autorités européennes mais n'est pas encore accessible en France.

Les partisans de ces traitements, dont de nombreux neurologues, avancent qu'ils doivent être pris plus tôt pour être efficaces.

"Plus on traite tôt la maladie, meilleur sera le maintien des fonctions intellectuelles. Car ce qui caractérise l'avancée dans la maladie, c'est la perte des neurones, et les neurones ne repoussent pas", souligne le professeur Philippe Amouyel.

"Le but est de donner ces traitements aux patients qui ont une réserve cognitive suffisante pour continuer à vivre normalement sans question de dépendance. Donc il faut faire un test assez rapidement, ce que permet le test sanguin", conclut-il.

· À qui s'adresse le test?

Le test est autorisé en milieu clinique pour les patients présentant déjà des signes de déclin cognitif.

"Il s'agit de patients dont les troubles - de la mémoire, mais pas seulement - entraînent une gêne sociale pour eux-mêmes ou leurs proches", rappelle le professeur Philippe Amouyel.

En France, le médecin généraliste oriente les patients qu'il pense être atteints d'Alzheimer vers des "centres mémoire" qui réalisent des diagnostics plus poussés. "C'est dans ce contexte que, dans un premier temps, le test devrait être développé", indique Philippe Amouyel.

· À quand une arrivée en France?

Une demande de mise sur le marché a été déposée auprès des autorités européennes, et une réponse est attendue à l’automne. Il pourrait donc être disponible en France dès l’année prochaine.

Le processus d'autorisation est plus rapide pour un test que pour un médicament, pointe Philippe Amouyel. "On ne juge pas la balance bénéfice-risque mais la sensibilité, la capacité de donner la bonne réponse. Donc ça devrait aller vite".

François Blanchard