Grippe: comment expliquer que l'épidémie touche autant d'enfants cette année?

Urgences pédiatriques du CASED de Rennes le 7 juin 2021 (photo d'illustration) - Sebastien SALOM-GOMIS © 2019 AFP
Pour certains parents, c'est un très long hiver ponctué de toux, de grises mines et d'une bonne dose de sirop au paracétamol. La grippe frappe fort cette année, y compris chez les enfants. C'est ce que relève l'agence Santé publique France (SPF) dans un bulletin épidémiologique daté de ce mercredi 29 janvier.
Dans cette note renseignant sur la circulation des virus saisonniers, l'autorité de santé zoom sur l'activité particulièrement forte de la grippe chez les plus jeunes. Le taux d'incidence, soit le nombre de cas rapporté à la population globale, est "exceptionnellement élevé chez les moins de cinq ans", avec plus de 1.500 cas pour 100.000 habitants.
"À l'hôpital, la part des hospitalisations pour grippe/syndrome grippal parmi les hospitalisations toutes causes se situait à un niveau d'intensité très élevé chez les enfants et (un niveau) élevé chez les 15 ans et plus", explique SPF.
Une adolescente tuée par "une pneumonie consécutive à un état grippal"
Certains de ces cas sont tout sauf anodins. Anne-Laure, une mère de deux filles, raconte à BFMTV que l'une d'entre-elles à vécu une infection particulièrement douloureuse. "Elle n'a vraiment pas pu se lever de son lit pendant au moins deux semaines. Il y a eu des pics de fièvre à 40°C, des douleurs à la gorge, à l'oreille... On était inquiets", témoigne-t-elle.
Dans le Maine-et-Loire, le virus a même mené à un drame. À Saumur, dimanche 26 janvier, une adolescente de 12 ans est "décédée des suites d’une pneumonie consécutive à un état grippal", comme l'a expliqué la procureure Alexandra Verron après l'autopsie de la victime.
Un cas parmi d'autres? Sur la base de données préliminaires, Santé publique France précise seulement que deux cents décès ont été signalés depuis le début de l'épidémie, "dont 62 chez les 65 ans ou plus". Au cours de la semaine dernière, 40 enfants âgés de moins de deux ans ont été admis en réanimation pour une grippe, auxquels s'ajoutent 54 âgé de 2 à 17 ans.
Une notion de souche du virus et d'anticorps
Le constat est donc sans appel: les plus jeunes prennent la vague de plein fouet. Mais pourquoi? Une partie de la réponse se trouve dans les spécificités de l'épidémie 2024-2025.
Le terme "la grippe" est un abus de langage qui regroupe sous une même étiquette plusieurs souches du virus. Ces temps-ci, on observe la co-circulation de trois souches de virus, A(H1N1), A(H3N2) et B/Victoria. Une situation qualifiée d'"inhabituelle" par les autorités.
Puisque toutes les souches ne circulent pas en même temps, certains enfants développement une "mémoire immunitaire" à certaines d'entre elles, mais pas à d'autres, comme l'explique à France info Brigitte Virey, la présidente du Syndicat national des pédiatres français (SNPF).
"Certains, parmi les plus jeunes, n'ont jamais été confrontés à un virus de la grippe et n'ont pas d'anticorps", indique l'experte.
Reste également la question de la vaccination. La Haute autorité de santé recommande le vaccin contre la grippe chez "dès 6 mois" chez les enfants souffrant de comorbidités. "La vaccination contre la grippe saisonnière est également proposée aux enfants de 2 à 17 ans révolus sans maladie chronique", peut-on lire sur le site de l'organisme de référence.
Les Français semblent pourtant très réticents à l'idée de vacciner leurs enfants. Selon les derniers chiffres officiels, sur la saison 2023-2024, le taux de couverture vaccinale des moins de 18 ans à risque de grippe sévère n'était que de 13,9%.
D'une certaine façon, le calendrier pourrait permettre d'endiguer la vague. Les périodes de cours sont propices aux échanges et aux infections entre enfants. Ils peuvent ensuite transmettre la maladie à leurs parents à leur tour. Les vacances d'hiver pourraient ainsi offrir une accalmie. Mais le meilleur remède reste le recours aux gestes barrière et à la vaccination.