Covid-19: est-on en train de ressentir les premiers effets du confinement?

Ses habitants ont été parmi les premiers à se voir imposer un reconfinement le week-end, il y a presque deux mois. Dans les Alpes-Maritimes, le taux d'incidence de l'épidémie de Covid-19, lissé sur 7 jours, était de 229 pour 100.000 habitants dimanche. Un chiffre que le département n'avait pas connu depuis le 17 décembre. Au CHU de Nice, le service de réanimation souffle enfin quelque peu.
"Actuellement, on est aux alentours de 65-70% patients Covid, (...) on n'a pas cette pression qu'on avait, permanente, d'avoir tous les lits pleins. (...) Ceci nous permet de reposer un petit peu du personnel, c'est une évidence", confirme Carole Ichai, cheffe du pôle anesthésie réanimation au CHU, auprès de BFMTV.
Stabilisation
Une telle évolution amène à s'interroger: le pic de la troisième vague en France a-t-il été atteint? À l'échelle nationale depuis quelques jours, un infléchissement du nombre de patients en réanimation semble s'amorcer.
Le 13 avril, ce chiffre était très élevé, totalisant 5952 malades. Depuis, il est sur une tendance à la stabilisation. Par ailleurs, après avoir été faussée par le week-end de Pâques, la courbe des nouveaux cas quotidiens baisse ces derniers jours, avec une moyenne, sur les 7 derniers jours, qui est tombée en dessous des 34.000 contaminations.
Faut-il y voir un impact des mesures de freinage mises en place ces dernières semaines? Interrogé ce lundi par BFMTV, Pascal Crepey, épidémiologiste et biostatisticien à l'École des hautes études de santé publique, estime que c'est "tout à fait possible", mais note que la baisse est fragile. "Ça n'augmente plus, on est plutôt sur un plateau", précise-t-il.
"L'ensemble des indicateurs, y compris les indicateurs hospitaliers, ont légèrement infléchi leurs courbes. (...) Tout ça montre que ces mesures de confinement ont un impact. Néanmoins, ça montre malheureusement n'est pas aussi fort que l'impact que l'on a pu connaître lors des premier et deuxième confinements et on s'oriente vers un plateau ou une (décrue) très douce", constate-t-il.
"Plus d'efforts"
Deux hypothèses sont évoquées pour expliquer la lenteur de cette baisse. La première tient à ce que les restrictions actuellement en place sur le territoire sont moins strictes que lors des confinements précédents. À côté de cela, il y a la présence majoritaire en France du variant du coronavirus détecté au Royaume-Uni, qui est 50% plus contagieux que sa souche initiale.
"Au premier confinement, 10 personnes en contaminaient 7. Actuellement, 10 personnes en contaminent entre 9 et 10. (...) Il faut faire plus d'efforts pour limiter sa transmission", prévient Mircea Sofonea, maître de conférence en épidémiologie à l'Université de Montpellier.
Rouvrir le 15 mai, est-ce réaliste?
Prudent, le président Emmanuel Macron a déclaré jeudi devant des élus qu'il fallait prévoir une augmentation du nombre d'hospitalisations dues au Covid-19 pendant encore une dizaine de jours. Malgré la légère amélioration, les services de réanimation des Alpes-Maritimes continuent d'accueillir des patients de toute la région Paca.
"L'épidémie est légèrement différente par rapport à ce qu'on a connu", abonde Pascal Crépey. "Donc forcément, il faut que les mesures soient beaucoup plus fortes" si l'on veut assister aux mêmes baisses sensibles qu'à l'issue des deux premiers confinements, dit-il.
Est-ce à dire que la date d'entame de la réouverture du pays annoncée par Emmanuel Macron, autour du 15 mai, est compromise par cette laborieuse embellie? "La date du 15 mai (...) a été fixée selon des critères politiques" et non épidémiologiques, "comme un nombre de nouveau cas à atteindre avant de rouvrir", rappelle Pascal Crepey.
"L'assouplissement des mesures devra être très léger si on veut rester sur une pente descendante, parce que la situation reste très fragile. (...) Il va falloir être très précautionneux", prévient l'épidémiologiste.
Invitée de France Inter ce lundi, sa consœur Dominique Costagliola, de l'Inserm, se montre encore plus prudente, voire pessimiste. L'épidémiologiste ne voit en effet aucune "baisse massive" possible des chiffres de l'épidémie d'ici la fin du mois de mai.
"On n'a pas vu une baisse nette du nombre de cas, et on a même vu plutôt un plateau haut alors même qu'on teste moins, donc je ne vois pas qu'on puisse extrapoler une baisse quelconque. Et d'autant moins que les écoles primaires vont recommencer à partir du 26, et les collèges et lycées la semaine suivante", a-t-elle énuméré.