"Chemsex": quels sont les produits utilisés pour cette pratique, évoquée dans l'affaire Pierre Palmade?

De la kétamine et de l'ecstasy photographiées en Colombie le 2 avril 2022 (Photo d'illustration) - JOAQUIN SARMIENTO / AFP
Projeté dans le débat public après l'accident causé par le comédien Pierre Palmade vendredi 10 février, le chemsex, une contraction des termes anglais chemicals (produits chimiques) et sex, est une pratique qui vise à avoir des rapports sexuels sous l'emprise de substances psychoactives, afin de démultiplier le plaisir mais également de se désinhiber.
Alors que Pierre Palmade conduisait sous l'emprise de la cocaïne, les substances utilisées par les pratiquants du chemsex sont variées, allant des drogues de synthèse aux stimulants sexuels. Les associations de prévention des risques tentent depuis plusieurs années de dresser une liste exhaustive de ces produits, afin d'informer au mieux les usagers pour limiter les risques lors des prises, mais également avertir sur les dangers auxquels ils s'exposent.
• Les cathinones de synthèse
Les cathinones de synthèse sont des dérivés chimiques de la plante de khat, connue pour ses effets stimulants et euphorisants. Un article scientifique paru dans la revue PSN pointe du doigt ces drogues qui "n’existent pas à l’état naturel, et sont élaborées à partir de nombreuses réactions chimiques".
Parmi les cathinones de synthèse les plus répandus auprès des pratiquants du chemsex, on retrouve la 3-MMC, la 4-MMC ou encore la 4-MEC. Le Réseau de prévention des addictions (RESPADD) indique dans une brochure que "les effets recherchés sont l’euphorie, la désinhibition, l’empathie, l’augmentation de la sensualité, la performance sexuelle". Les cathinones allient à la fois les effets de la cocaïne et des amphétamines: stimulants et euphorisants.
Ils peuvent être pris par voie nasale ou être ingérés, mais également par intraveineuse. Cette dernière pratique expose les usagers à des abcès. "Les injections répétées entraînent des abcès et plaies, des risques bactériens, et une détérioration des veines qui favorise l’apparition de nécroses", écrit sur son site Drogue Info Service.
De manière plus générale, les consommateurs de cathinones de synthèse s'exposent à des risques graves pour leur santé. Drogues Info Service mentionne des états de grande agitation, de possibles psychoses sévères, une forte déshydratation ou des risques musculaires. Les cathinones peuvent également entraîner une forte dépendance, et sont connus pour provoquer un craving, c'est-à-dire une envie incontrôlable de consommer à nouveau.
• Le GHB
Issu de la molécule gamma-hydroxybutyrate, le GHB est une drogue initialement développée dans le domaine médicale pour servir d'anesthésiant et d'analgésique. Elle se présente sous forme de poudre blanche mais peut également être bue. Le GBL, un produit chimique qui se transforme en GHB une fois ingéré, est également utilisé dans le cadre du chemsex.
Les effets recherchés par les consommateurs visent à entrer dans un état de relaxation physique important, euphorisant. Sur BFMTV en octobre 2021, alors que le GHB était suspecté d'avoir circulé dans de nombreuses soirées en France, l'addictologue William Lowenstein avait évoqué des consommateurs tels des "zombies passifs", incapables de s'opposer "aux ordres qui peuvent être donnés".
"Le principal risque avec le GHB/GBL/BD est le surdosage car la marge entre les quantités nécessaires pour obtenir les effets recherchés et celles entraînant des effets indésirables est très faible", met en garde le RESPADD.
Drogues Info Service indique que "la dépendance" au GHB "n’est pas établie scientifiquement et reste discutée". Néanmoins, les effets qu'il procure peut encourager les usagers à renouveler les prises.
• Les amphétamines et les méthamphétamines
Ces produits sont tous rattachés à la famille des phényléthylamines. Les méthamphétamines, aussi appelés "crystal meth", sont cependant 2 à 5 fois plus puissantes que les amphétamines, dont est dérivé l'ecstasy. Ces produits peuvent être sniffés, inhalés pour la "crystal meth", ou injectés.
Pour ces substances, les effets recherchés sont l'euphorie et l'excitation, mais également une empathie démultipliée. Les méthamphétamines, plus puissantes que les amphétamines, permettent d'augmenter sa confiance en soi, d'accroître sa faculté de concentration et de réduire la fatigue.
Les effets secondaires sont nombreux et importants. Des insomnies, des contractions de muscle, de l'anxiété, mais également un sentiment de "descente" suite à la prise. Cette période "se manifeste par un grand abattement : humeur triste voire dépressive, avec une sensation de tête vide, d’incapacité physique et psychique", détaille Drogue Info Service.
• La kétamine
Initialement développée comme anesthésiant, notamment pour cheval, la kétamine est le plus souvent sniffée par les usagers sous forme de poudre. La consommation de kétamine produit d'abord un effet apaisant, et peut déboucher sur des troubles sensoriels et hallucinatoires. Les consommateurs peuvent également ressentir un sentiment de flottement.
Le principal risque auquel s'exposent les usagers est le K-hole, qui "se caractérise par des troubles de l’humeur et du comportement, une perte d’identité et du contact à la réalité, des visions effrayantes, cauchemardesques qui peuvent conduire à un état de panique", explique Drogue Info Service.
La dépendance à la kétamine est rare, mais sa prise régulière est dangereuse, car les quantités nécessaires pour obtenir l'effet désiré sont à augmenter à chaque prise.
• La cocaïne
Très répandue dans toutes les franges de la société, la cocaïne est également présente dans le milieu du chemsex. Issue des feuilles du cocaïer, elle est comme la kétamine majoritairement sniffée. Elle donne au consommateur un sentiment de toute-puissance et une indifférence à la fatigue.
Les usagers de cocaïne connaissent également une phase de descente après la prise, qui se traduit par un état dépressif.
"La dépendance se traduit par une impulsion irrésistible de consommer à nouveau. Cet état est favorisé par la faible durée des effets de la cocaïne et l’état dépressif qui suit les prises", met en garde Drogue Info Service.
• Des stimulants sexuels
Enfin, les personnes pratiquant le chemsex peuvent avoir recours à des stimulants sexuels, comme le viagra, pour maintenir une érection que les drogues peuvent venir altérer.
Pour se faire aider, il est possible de contacter le numéro d'appel "chemsex urgences" de Aides au 01 77 93 97 77 (numéro non surtaxé) ou Drogues info service au 0 800 23 13 13 (service et appel anonymes et gratuit, 7j/7 de 8h à 2h).