Accident de Pierre Palmade: comment soigne-t-on une addiction?

Il était 18h45 vendredi lorsque la voiture conduite par l'humoriste Pierre Palmade a fait une embardée sur une départementale de Seine-et-Marne, sans raison apparente. L'accident a envoyé trois personnes à l'hôpital, grièvement blessées: un enfant de 6 ans, son père et la belle-sœur de ce dernier, qui a de surcroît perdu l'enfant qu'elle portait.
Le comédien est lui-même blessé. Samedi, les résultats toxicologiques ont rendu leur sentence: Pierre Palmade était sous l'emprise de la cocaïne au moment des faits.
C'est la raison pour laquelle l'enquête en cours a été ouverte pour homicide et blessures involontaires par conducteur sous l'emprise de stupéfiants. L'addiction bien connue de Pierre Palmade à la drogue remonte à de nombreuses années. Il faut dire qu'elle est des plus délicates à soigner comme l'ont souligné ce lundi deux invités de BFMTV.
"Pas d'entre-deux"
"Quand on est addict à la cocaïne, soit on arrête, soit on n’arrête pas. Il n’y a pas d’entre-deux". C'est la chanteuse Rose qui tranche ainsi d'emblée. Celle qui a connu le succès avec les morceaux La Liste et Ciao Bella en 2006 est bien placée pour être aussi définitive. Il lui a en effet fallu mener un long combat pour balayer sa dépendance. Aujourd'hui, elle alerte et sensibilise ses auditeurs sur les dangers et les difficultés d'une telle bataille dans son podcast Contre-addictions.
L'interprète a rappelé les phases successives de la relation proprement toxique qui unit le consommateur à son poison: "C’est en trois épisodes. D’abord, on essaie, on consomme. Après, il y a l’abus puis la dépendance."
Notant qu'on peut plonger dans la drogue "pour 1000 raisons", Rose a tenu à dissiper une illusion: "La volonté n’est pas le problème". "L’addiction a ses raisons que la volonté ignore", a-t-elle martelé.
Inutile, donc, de seriner à une personne dépendante qu'il lui suffit de vouloir arrêter pour s'en tirer. L'artiste a, au contraire, remarqué que c'est bien souvent lorsque le sujet a le sentiment d'être acculé, de ne plus avoir le choix, qu'il saute le pas: "Soit on arrête quand on va mourir, soit quand la police nous arrête, quand on est au pied du mur".
L'abstinence comme seul horizon
Et à l'heure de rompre avec ses habitudes destructrices, il convient de ne pas transiger. "Il y a une seule solution pour arrêter cette maladie qui est mortelle, et qu’on a toute la vie, c’est l’abstinence", a encore insisté Rose.
Pour autant, il ne s'agit pas de baisser les bras au premier faux pas. "Les rechutes font partie du rétablissement souvent, ce sont des étapes. On ne revient jamais au départ. Ok, on revient un petit peu en arrière, mais on continue à avancer et on garde ce qu’on a gagné", a ainsi assuré la chanteuse.
Comment expliquer un tel parcours du combattant? Le témoignage qu'a livré sur BFMTV Amine Benyamina, psychiatre, addictologue et président de la Fédération française d’addictologie, éclaire sur ce point. "On ne guérit pas de la drogue", a ainsi introduit le spécialiste, avant de mettre en exergue le "long travail" à accomplir:
"Il y a ce qu’on appelle la réduction des risques, c’est-à-dire qu’on ne peut pas guérir au sens où on l’entend – vous faites une bronchite vous en guérissez – mais on aide la personne à en sortir, à se sevrer."
Une "maladie du lien"
L'aidant doit donc avant tout chercher à guider le consommateur vers une prise de conscience. Nécessité qui se traduit concrètement dans la pratique du psychiatre par une batterie de questions à son patient désireux de se débarrasser de son addiction.
"Où vous vivez? Avec qui? Où vous l’achetez? Qu’est-ce que ça vous procure? Si je vous demande de vous arrêter qu’allez vous ressentir à l’arrêt? Quels sont les avantages et les inconvénients à consommer?", a listé Amine Benyamina, justifiant: "On les amène à faire une balance décisionnelle pour pouvoir majorer leur envie de sortir".
"On ne peut pas arrêter seul", confirme Rose qui pointe une ruse de la dépendance: " À partir du moment où on dit : ‘Je vais contrôler’, c’est qu’on ne peut pas contrôler".
C'est "l'amour inconditionnel" de l'artiste pour son fils qui l'a poussée, dit-elle, à décrocher. Mais tous n'ont pas la possibilité de puiser leur force au contact de proches. Bien consciente de cet obstacle, Rose appelle les addicts à se tourner en direction d'autres cercles: "Les groupes de parole sont extrêmement puissants parce qu’on retrouve un lien concret avec des gens."
L'asservissement à la cocaïne, à la drogue en général, à l'alcool, est en effet une "maladie du lien" selon la définition qu'en donne l'animatrice du podcast Contre-addictions. Elle a alors achevé: "Et il faut nourrir sa vie de choses vraies pour s’enlever cette béquille."
