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Réforme des retraites: pourquoi Jean-Paul Delevoye entre-t-il au gouvernement?

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Le Haut-commissaire aux retraites fait sa rentrée au gouvernement à l'occasion du séminaire de ce mercredi. Il incarne un profil moins "nouveau monde" que les macronistes historiques.

Les rumeurs ont été confirmées mardi. Le Haut-commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye a bien fait son entrée au gouvernement pour piloter cet épineux dossier. La suite logique pour cet ancien ministre de Jacques Chirac qui a remis son rapport sur les retraites en juillet.

Désormais il va être chargé de boucler la réforme des retraites, qu'il porte depuis le début, et qui fait de lui l'homme de la situation. Si pour notre éditorialiste politique Christophe Barbier, Jean-Paul Delevoye va surtout servir de démineur au gouvernement:

"On le fait venir tout de suite parce qu'on sent du côté du gouvernement que ça va devenir très politique. (...) Jean-Paul Delevoye vient pour piloter la concertation avec les syndicats mais d'abord répondre à l'opposition politique au Parlement et animer le débat citoyen qu'on nous a promis sur les retraites."

Le Haut-commissaire devrait en effet jouer un rôle-clé dans la nouvelle phase de négociations que doit bientôt démarrer le Premier ministre Edouard Philippe avec les syndicats et le patronat.

La carte de l'expérience

La personnalité de Delevoye, vieux routier de la politique, longtemps membre du RPR puis de l'UMP, ne fait pourtant pas très "nouveau monde". En 2003 l'ex-maire de Bapaume pilotait déjà... la concertation avec les syndicats de fonctionnaires dans le cadre de la réforme des retraites Fillon. Mais c'est justement son expérience qui a peut-être séduit le président.

Selon Apolline de Malherbe, éditorialiste politique de BFMTV, il correspond parfaitement à ce que veut le chef de l'Etat pour cette seconde partie de quinquennat:

"Il assume tout à fait d'aller chercher quelqu'un qui a de l'expérience et qui est assez rond, contrairement à la plupart des jeunes macronistes qui peuvent paraître un peu plus cassants. Lui, il sait écouter, il avait d'ailleurs déjà fait un certain consensus lors du débat qu'il a mené en interne, avec les partenaires sociaux (...) Ça fait 18 mois en réalité que Delevoye consulte. Désormais il va le faire publiquement."

Incarner une "volonté d'ouverture" du débat

Mais son entrée au gouvernement intervient peu de temps après que le chef de l'Etat a balayé la question de l'âge pivot de 64 ans que Delevoye avait préconisé. Lors d'une interview sur France 2 le 26 août Emmanuel Macron avait expliqué préférer un accord sur la durée de cotisation plutôt que sur l'âge, ne souhaitant pas toucher à l'âge légal de départ, fixé à 62 ans.

Un épine dans le pied de Delevoye pour Christophe Barbier: "C'est un problème que le chef de l'Etat ait déjugé cet âge pivot, ça l'affaiblit au moment où il entre au gouvernement, mais d'un autre côté ça pose les bornes techniques de ce débat (...) Et Delevoye reste partisan surtout d'un changement systémique, c'est-à-dire de passer à un système par points, d'être plus dans la révolution que dans la comptabilité."

Pour le député LaREM du Nord Laurent Pietraszewski, ce désaccord est au contraire le bienvenu:

"Il est très bien que le président ait pu donner sa préférence et qu'elle ne soit pas exactement ce qui a été repris dans les propositions du Haut-commissaire. Ça montre bien la volonté de débat et l'ouverture qu'il y a pour ces concertations", explique-t-il.

Jean-Paul Delevoye est donc officiellement entré dans son rôle de négociateur et de pacificateur. Mais Christophe Barbier met en garde: "Le calendrier va être long, il va falloir enjamber les municipales et si les municipales sont ratées, ça va évidemment peser sur le débat qui va suivre."

Manon Fossat