Polémique autour d'une attaque de Jean-Luc Mélenchon

Jean-Luc Mélenchon a suscité ce week-end une vive polémique en accusant le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, de ne pas "penser français" mais "finance internationale" lors du congrès du Parti de gauche à Bordeaux. /Photo prise le 15 février 2013/R - -
BORDEAUX/PARIS (Reuters) - Jean-Luc Mélenchon a suscité ce week-end une vive polémique en accusant le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, de ne pas "penser français" mais "finance internationale" lors du congrès du Parti de gauche à Bordeaux.
Aussitôt après la tenue de ces propos, samedi, le premier secrétaire du Parti socialiste, Harlem Désir, a dénoncé des relents d'antisémitisme dignes des années 1930.
Pierre Moscovici a pour sa part estimé dimanche sur Canal+ que ce n'était pas un dérapage de l'ancien candidat du Front de gauche à l'élection présidentielle. "Il sait ce qu'il dit et il le fait exprès. C'est plus qu'une dérive ou une surenchère", a déclaré le ministre.
Le Mouvement antiraciste européen a condamné de son côté des propos "nauséabonds" et une "funeste rhétorique".
A droite, le président de l'UMP, Jean-François Copé, a exhorté François Hollande à rompre avec le Front de Gauche et Jean-Luc Mélenchon, qui lui avait apporté son soutien entre les deux tours de la présidentielle de 2012.
Le secrétaire national du Parti de gauche, François Delapierre, avait dénoncé samedi à Bordeaux l'attitude à l'égard de Chypre des "17 salopards de l'Europe" que sont à ses yeux les 17 gouvernements de la zone euro.
"Dans ces 17 salopards, il y a un Français, il a un nom, il a une adresse, il s'appelle Pierre Moscovici et il est membre du Parti socialiste", avait-il ajouté.
Devant des journalistes, Jean-Luc Mélenchon avait abondé dans son sens et accusé le ministre de l'Economie d'avoir "le comportement de quelqu'un qui ne pense pas français, qui pense finance internationale".
Réaction immédiate d'Harlem Désir: "Cette attaque sur l'identité française de Pierre Moscovici donne le haut le c?ur."
"L'HONNEUR D'ÊTRE UNE CIBLE"
Pierre Moscovici, dont le père a été déporté par les nazis, a pour sa part adressé une mise en garde aux dirigeants du Parti de gauche et du Front de gauche.
"Je n'abdiquerai pas l'honneur d'être une cible. Mais il faut qu'ils fassent attention à ce qu'ils disent", a-t-il déclaré. Jean-Luc Mélenchon "est en train, par détestation de la sociale démocratie, par détestation du Parti socialiste, de franchir certaines bornes."
Pour Jean-François Copé, cependant, "c'est le prix que l'on paye quand on s'allie avec des extrémistes".
Candidat à l'élection présidentielle de 2012, Jean-Luc Mélenchon avait appelé à voter au second tour pour François Hollande et contre le président sortant Nicolas Sarkozy.
"Le temps est venu pour (François Hollande) de dire si oui ou non, dans ce contexte, il continue cette alliance électorale (...) car c'est cela qui est en cause au regard de propos indignes, contraires aux valeurs de la République", a dit le président de l'UMP lors de l'émission "Le Grand Rendez-vous" d'Europe 1-i-Télé-Le Parisien.
Le secrétaire national du Parti de gauche, dont les propos ont été le prétexte des déclarations de Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé dimanche une "polémique consternante et affligeante", sans vraiment mettre de l'eau dans son vin.
"Nous mettons en cause M. Moscovici comme responsable du gouvernement français qui vote dans l'Eurogroupe le fait qu'on saigne les Chypriotes", a dit à Reuters François Lapierre.
"Voilà ce qu'a fait M. Moscovici. Ça, c'est un acte de salopard. Quand on est responsable politique, on doit rendre des comptes et je ne vois pas d'autre mot pour qualifier ce qu'il a fait", a-t-il ajouté. "Plutôt que de répondre sur le fond, le Parti socialiste invente une diversion, une polémique."
Claude Canellas à Bordeaux et Emmanuel Jarry à Paris, édité par Henri-Pierre André