Le sénateur Joël Guerriau, soupçonné d'avoir drogué une députée, peut-il être forcé à démissionner?

Joël Guerriau peut-il vraiment rester élu au Palais du Luxembourg? Mis en examen et placé sous contrôle judiciaire samedi 18 novembre, le sénateur est accusé d'avoir drogué la députée Sandrine Josso à son insu dans le but de l'agresser sexuellement - ce que l'intéressé réfute, son avocat plaidant un "accident".
Dans un communiqué de presse, le président du Sénat Gérard Larcher lui a demandé de "se mettre en retrait" de toutes ses fonctions parlementaires. Cet élu de Loire-Atlantique est vice-président de la commission des Affaires étrangères et secrétaire du bureau de la chambre haute.
Une peine d'inéligibilité pour le contraindre à la démission
Cette demande, purement symbolique, et à laquelle n'a pas accédé Joël Guerriau à l'heure actuelle, ne l'empêcherait pas de continuer à toucher son indemnité parlementaire.
"Seule la justice pourrait, le cas échéant, le démettre de son mandat parlementaire, à l’issue de la procédure pénale", précise Gérard Larcher.
En cas de condamnation de Joël Guerriau, les juges pourraient en effet prononcer, en plus d'une peine de prison, une peine d'inéligibilité qui aurait alors un effet immédiat.
Le maire de Toulon, Hubert Falco, a par exemple été condamné en avril dernier pour recel de détournement de fonds publics à trois ans de prison sursis et à une peine d'inéligibilité de cinq ans. L'édile avait dû alors renoncer immédiatement à ses mandats locaux.
Condamnation n'entraîne pas forcément démission
Les condamnations d'élus, en lien direct avec leur mandat ou non, n'entraînent cependant pas toujours une peine d'inégibilité. Alexandre Vincendet, alors maire de Rillieux-le-Pape, a par exemple été condamné en 2020 pour des faits de violence sur mineur sur son fils, sans se voir retirer son mandat de maire. Il a été élu député LR en 2022.
Même constat pour Adrien Quatennens, condamné à 4 mois de prison avec sursis pour des violences contre son épouse. Si ce très proche de Jean-Luc Mélenchon s'était mis un temps en retrait une fois l'affaire connue et avait été suspendu 4 mois de son groupe après sa condamnation, l'ex-étoile montante des insoumis n'a pas démissionné.
Dans ce cas de figure, la décision de démissionner reviendrait à Joël Guerriau. Si les démissions d'élus en cours de mandat sont possibles, elles restent cependant très rares et proviennent souvent plutôt d'un contexte personnel que d'une affaire judiciaire.
L'ex-ministre des Solidarités Damien Abad est par exemple toujours député, après avoir été accusé par plusieurs femmes de viol et de tentatives de viol. Une information judiciaire est actuellement en cours.
"Il continue ses fonctions"
Joël Guerriau devrait, lui aussi, rester en poste. Son avocat, Rémi-Pierre Drai, a assuré auprès de France bleu Loire Océan que le sénateur "entendait reprendre sa vie professionnelle normalement".
"Il n'a pas été interdit d'accès au Sénat", a-t-il expliqué. "Il n'a pas été interdit de continuer à être sénateur et de remplir son mandat parlementaire. Donc, il fera ce qu'il pourra faire dans la mesure du possible. Il continue ses fonctions."
Suspendu samedi par son parti Horizons et par son groupe parlementaire, Joël Guerriau va cependant devoir tenir face à la pression. Laurent Marcangeli, le président des députés Horizons, l'a appelé ce mercredi à réfléchir "en son âme et conscience".