Lutte contre le communautarisme: des cadres LR attendent des actes concrets de la part de Macron

Le président des Républicains Christian Jacob - AFP
Peu audibles sur la réforme des retraites, les Républicains entendent dégainer l'artillerie lourde sur le sujet du communautarisme. Profitant du déplacement d'Emmanuel Macron à Mulhouse ce mardi pour annoncer son plan de lutte contre le communautarisme, plusieurs dirigeants de LR ont pris le chef de l'État pour cible.
C'est sur CNews que le vice-président du parti, Guillaume Peltier, a ouvert les hostilités: "Ça fait mille jours qu'Emmanuel Macron est président de la République et mille jours qu'on attend non seulement un discours, mais désormais des actes".
Et le député du Loir-et-Cher d'accuser le locataire de l'Elysée de "non assistance à pays en danger, tant la situation est lourde et grave".
"Macron culpabilise les Français"
Sur notre antenne, c'est le patron du groupe LR au Sénat Bruno Retailleau qui s'en est pris à Emmanuel Macron. Selon l'élu vendéen, le chef de l'État "va faire ce qu'il fait de mieux, (...) il va faire un discours". Il l'accuse de cultiver une "formidable ambiguïté" sur ces sujets. D'un côté, le refus d'étendre l'interdiction du voile dans les écoles publiques aux sorties scolaires, de proscrire les listes communautaires, et de l'autre la fermeté affichée face à l'islamisme politique.
"Quand Emmanuel Macron culpabilise les Français sur la guerre d'Algérie, il ne se rend pas compte qu'il fait le jeu des islamistes, qui eux-mêmes utilisent la rhétorique décoloniale pour l'agréger à leur rhétorique islamiste, (...) pour dire que la France est coupable", a dénoncé Bruno Retailleau ce mardi matin.
"On peut être des Bisounours, on mourra"
Même son de cloche du côté d'Eric Woerth, président de la commission des finances de l'Assemblée nationale. Invité de France Info, le député de l'Oise, très sévère avec la majorité sur les thèmes économiques, a mis en garde contre "l'abdication de la République" qu'entraînera selon lui l'islamisme. Un sujet face auquel Emmanuel Macron aurait mis "quasiment trois ans pour se réveiller".
"À force de vouloir rien faire, on peut être des Bisounours tout le temps, on mourra et puis c'est tout, d'autres plus forts s'imposeront à l'État français et l'État changera de nature", a prévenu Eric Woerth.
D'après l'ancien ministre du Budget de Nicolas Sarkozy, Emmanuel Macron de "tout accepter" sur le terrain identitaire et culturel. "À force (...) on accepte surtout sa propre disparition. Donc il y a un danger fondamental", a-t-il insisté.
"On ne peut pas prendre des demi-mesures. Il y a eu beaucoup de mesures prises. Aucun gouvernement n'a été totalement immobile sur ces sujets-là. (...) C'est peut-être l'évolution du monde qui s'exporte en France, mais enfin en tout cas, ça a été peu efficace. (...) Il faut être plus dur, il faut de l’autorité, il faut de la réaction, quand c’est interdit il faut interdire."
"On attend qu'il agisse"
La séquence ne serait pas complète sans l'intervention du grand timonier de LR. Au micro d'Europe 1, Christian Jacob a fustigé le "débat sémantique" auquel se livrait d'après lui Emmanuel Macron. En somme, le fait de dénoncer le "séparatisme" plutôt que le communautarisme.
"Ce dont on a besoin aujourd'hui, c'est d'une vraie politique de sécurité. C'est de lutter contre ces 150 quartiers qui sont aux mains de l'islam politique, de radicaux, de dangereux extrémistes. (...) On n'attend pas que le président de la République fasse des phrases, on attend qu'il agisse. Or aujourd'hui, d'actions il n'y en a pas eu. Depuis deux ans et demi, rien n'a été fait", a tancé le député de Seine-et-Marne.
Le patron de la droite reproche à Emmanuel Macron d'avoir reporté à plusieurs reprises sa prise de parole sur le sujet. "La première fois qu'il en a parlé, c'est en janvier 2018, puis en juin 2018, puis en janvier 2019, et tout ça pour arriver à dire, 'est-ce que c'est du communautarisme ou est-ce que c'est du séparatisme?' Mais de qui se moque-t-on?"
Et l'ancien maire de Provins de dénoncer les "accointances" qu'ont pu avoir certains élus, de gauche comme de droite, avec des représentants communautaires à des fins électoralistes.
Macron "à contre-emploi"
Ce tir groupé n'est pas un hasard. Sentant qu'Emmanuel Macron cherche à trouver un équilibre entre fermeté et discours inclusif, dans un domaine où il se voit reprocher ses atermoiements, la droite veut réinvestir le terrain régalien. Au sein de la macronie, beaucoup sont conscients des limites du "en même temps" sur ce sujet.
"On ne sait pas bien gérer la question du communautarisme. Moi j'aimerais bien qu'on développe un truc clair, qu'on soit fermes. Il y a un moment faut arrêter de se laisser faire", pestait récemment un député LaREM de premier plan auprès de BFMTV.com.
Un conseiller gouvernemental évoquait quant à lui les racines de ces valses-hésitations. "Il n'a pas de logiciel régalien fort. C'est quelqu'un qui a une vision anglo-saxonne, donc il est un peu à contre-emploi", résumait cette source.
À droite, beaucoup ont conscience du risque d'être pris en tenaille entre le Rassemblement national, à l'aise sur ces thèmes, et un exécutif qui obtiendrait des résultats probants sur le sujet. Un cadre LR nous faisait part d'une hypothèse:
"À sa place, si Macron voulait nous tuer, je déclencherais 15 opérations policières au petit matin et j'enfermerais les jihadistes qui posent problème. Ils sont connus d'ailleurs. S'il fait ça, on est mort."