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"Faites attention à ce que vous dites": la réunion tendue entre Michel Barnier et les macronistes

Gabriel Attal et Michel Barnier, le 5 septembre 2024

Gabriel Attal et Michel Barnier, le 5 septembre 2024 - Sarah Meyssonnier / POOL / AFP

Le Premier ministre a participé ce mardi matin à la réunion de groupe des députés Renaissance avant la présentation du budget 2025. Mais les échanges qui devraient réchauffer l'atmosphère ont tourné au vinaigre et crisper encore plus les relations entre Matignon et la macronie.

Une séance de câlinothérapie qui tourne mal. À deux jours de la présentation du budget 2025 dans un contexte financier particulièrement tendu, Michel Barnier s'est rendu à la réunion de groupe des députés Renaissance. Avec un but: arrondir les angles face à des hausses d'impôts ciblées qui ne passent pas dans une partie du camp présidentiel.

"C'est important pour moi d'être là aujourd'hui", a d'abord expliqué le Premier ministre qui assistait pour la première fois à ce rendez-vous qui a lieu tous les mardis. L'occasion pour lui également d'afficher son entente avec le président.

Attal estime avoir évité "le pire"

"Ma relation avec le président est fluide et assez simple", a assuré le nouveau chef du gouvernement, se disant "fier d'avoir une dizaine de députés" Renaissance dans son gouvernement et "reconnaissant" de leur travail.

De quoi détendre un peu l'atmosphère alors qu'Antoine Armand, à peine deux jours après sa nomination à la tête du ministère de l'Économie, s'était fait sévèrement recadré par le chef du gouvernement pour avoir exclu le RN de "l'arc républicain".

Après des échanges tendus entre Gabriel Attal et Michel Barnier à l'issue du discours de politique générale, le président des députés Renaissance a, lui aussi, joué la carte de l'amabilité.

"Ça aurait pu être le pire (comme Premier ministre) et c'est le meilleur qui en ressort", s'est ainsi félicité l'ex-locataire de Matignon.

L'épineux sujet des hausses d'impôts

Mais plus que sur ses relations avec l'Élysée ou ses ministres, c'est sur le budget 2025 que le Premier ministre est attendu au tournant. Le texte prévoit 60 milliards d'euros d'économies, dont 40 de réduction de dépenses et 20 de hausses d'impôts. Michel Barnier a déjà annoncé des hausses d'impôts pour les plus aisés et les grandes entreprises, tout en excluant toute hausse de l'impôt sur le revenu.

Mais la stratégie fiscale adoptée par Matignon a provoqué la colère de Gérald Darmanin et Gabriel Attal qui n'ont eu de cesse de rappeler que la macronie a refusé d'augmenter les impôts ces sept dernières années.

"Je prends le risque d’être impopulaire, mais pas le risque d’être irresponsable", a répondu le Premier ministre, assurant que "son objectif" était de "montrer de la responsabilité".

"Je ne veux pas qu'on touche les plus faibles, les classes moyennes, les petites et moyennes entreprises", s'est encore défendu Michel Barnier.

Des députés qui se lèvent pour mettre la pression

La macronie n'a pas digéré ces derniers jours que les retraités soient probablement mis à contribution dans le budget 2025. Le gouvernement envisage de reporter du 1er janvier au 1er juillet 2025 l'indexation des retraites sur l'inflation.

La méthode a également déplu alors que plusieurs pistes d'économies ont été égrenées ces derniers jours dans la presse, de l'augmentation possible de la fiscalité sur les jeux en ligne en passant par la baisse potentielle de la prise en charge des consultations médicales chez le généraliste.

Manifestement pas convaincus, plusieurs députés bons connaisseurs des enjeux budgétaires se sont levés tous ensemble pour exiger de Michel Barnier des précisions sur les chiffres des déficits, la feuille de route pour baisser les dépenses et une trajectoire précise du redressement des comptes publics.

De quoi mettre la pression sur le Premier ministre, avant une conférence de presse de Gabriel Attal ce mercredi sur le budget. Le chef du gouvernement a-t-il convaincu les députés. Rien n'est moins sûr.

"Je vous demande de faire attention à ce que vous dites"

Plusieurs échanges ont ainsi été très tendus. Alors qu'une députée lui disait "enfin, vous venez nous voir", Michel Barnier lui a répondu: "Je vous demande de faire attention à ce que vous dites, vraiment".

Interrogé par une députée, Michel Barnier a encore regretté "une prise de parole pour lui faire des critiques".

"Que des remarques acerbes"

Autant dire que le style du Premier ministre, qui a promis lors de son discours de politique générale "de dire ce qu'il pense", passe mal chez Renaissance.

"Il n'y pas d'éléments sur le fond, il n'a que des remarques acerbes", s'agace encore un proche de Gabriel Attal, regrettant que le Premier ministre ne réponde pas précisément à leurs questions avant de partir en cours de route de la réunion. C'est finalement Laurent Saint-Martin, le ministre délégué au Budget qui s'est chargé de cela dans une ambiance glaciale.

L'atmosphère sera-t-elle meilleure lors des prochaines venues de Michel Barnier? La question est ouverte alors que les prochaines semaine s'annoncent déjà très tendues à l'Assemblée nationale lorsque les députés se pencheront en hémicycle sur le budget.

Anne Saurat-Dubois avec Marie-Pierre Bourgeois