"On n’a pas mis la poussière sous le tapis": les coulisses de la réintégration de Quatennens au groupe LFI

Le député LFI Adrien Quatennens le 11 avril 2023 à l'Assemblée nationale - THOMAS SAMSON / AFP
Le député Adrien Quatennens, suspendu quatre mois après sa condamnation pour violences contre son ex-compagne, a été autorisé mardi à siéger de nouveau dans le groupe LFI à l'Assemblée nationale, à la suite d'une réunion du groupe politique qui a duré plus de deux heures.
45 personnes ont voté en faveur de la réintégration du parlementaire, 15 contre, et 2 se sont abstenues, d'après des informations de BFMTV. 10 élus n'étaient pas présents.
Un débat avant le vote à bulletins secrets
Toujours d'après nos informations, cette réunion a commencé à 11h par un compte-rendu des quatre députés qui ont auditionné Adrien Quatennens "pour faire un point". Après le rendu de leurs conclusions un débat a eu lieu.
Selon un insoumis, "il y a eu une vingtaine d’interventions. La discussion a été propre, digne, il y avait toutes les opinions, y compris les plus radicales du type: ‘Pourquoi on discute ?’"
Le vote, à bulletins secrets, a commencé à 12h59. Sébastien Delogu, député des Bouches du Rhône et proche de Jean-Luc Mélenchon, était en charge de garder l’urne. Les résultats sont tombés à 13h15.
Des députés ont immédiatement transmis les résultats du vote à Adrien Quatennens, qui était, pendant la réunion, en train de faire une intervention dans l'hémicycle au sujet de l'inflation. Il siégeait alors encore comme non-inscrit.
"Le vote était joué d’avance", déclare à BFMTV un Insoumis, "ce n’était pas simple mais on a géré. L’idée c’était de montrer qu’on n’a pas mis la poussière sous le tapis."
"Je ne veux pas alimenter les diversions"
Peu de réactions ont émané du groupe LFI dans l'après-midi. Seules quelques paroles ont été recueillies à la volée à l'Assemblée nationale, notamment celle d’Alma Dufour: "Il y a eu un vote, il fallait respecter le vote et avancer", a-t-elle déclaré à la sortie de la réunion.
"Il y a une décision qui est prise, c'est bien, il y a eu une discussion, une délibération. C'est bien un groupe qui discute, qui prend des décisions comme cela", a rapidement réagi le LFI Alexis Corbière. "Ce que le groupe a décidé, c'est qu'après l'avoir écouté, après l'avoir entendu (...) le bilan a été fait qu'une peine, une fois purgée, on peut passer à autre chose, on peut réintégrer la vie active", a déclaré sur notre antenne l'Insoumis Aymeric Caron.
"Le groupe s’il décide de sa réintégration, moi je suis un soldat. Moi je défends la décision. Je ne veux pas alimenter les diversions. Le plus important c’est les retraites", ajoute un autre député LFI.
Dans un communiqué du groupe LFI-NUPES, il est indiqué qu’Adrien Quatennens suit toujours un stage de sensibilisation aux violences conjugales, condition sine qua non à sa réintégration. Cela se déroule notamment sous la forme notamment de séances avec un psychologue, selon entourage.
Il est également indiqué qu'Adrien Quatennens "a affirmé regretter les expressions médiatiques qu'il a eues à la suite de sa condamnation. Il reconnait que certains de ses propos (notamment tenus sur BFMTV, ndlr) ont eu pour effet, sans qu’il n’en ait eu l’intention, de relativiser la gravité des faits et d’inverser la culpabilité entre l’auteur et la victime de violence."
"Passer à la télé, cibler sa compagne et avoir un sentiment de toute puissance… Là au moins il semble avoir compris. Pour son retour, il a intérêt à être sobre", déclare à BFMTV une députée LFI.
Selon nos informations, les députés insoumis ont aussi voté sur le contenu de ce communiqué de presse post-réunion. 53 ont voté pour, 6 contre.
De retour dans le groupe LFI dès jeudi 13 avril
Adrien Quatennens pourra de nouveau siéger officiellement dans le groupe LFI à partir de ce jeudi 13 avril, date de la fin de sa suspension temporaire. Mais restera-t-il membre de la commission des Affaires étrangères ou bien reviendra-t-il dans la commission des Affaires sociales (qui traites des sujets de violences conjugales)? Son entourage affirme que "cela n’a pas encore été évoqué".
"On va laisser passer les vacances parlementaires pour voir dans quel combat il souhaite retourner", dit-on encore.
Quant à son travail parlementaire, il pourra potentiellement être inscrit en tant que chef de file sur un texte, indique son entourage à BFMTV. Aucune prise de parole médiatique n’est toutefois prévue pour l’heure.
"Il y a eu la condamnation puis la sanction et maintenant la réhabilitation. Il ne faut pas passer les 2 premiers et ne pas oublier le 3ème", déclare encore l'entourage du député. "Contrairement à Borne, il se soumet à un vote de confiance et il le remporte plutôt pas mal".
"Cette réintégration est une insulte aux victimes de violences conjugales"
L'annonce de la réintégration du député Quatennens est loin d'avoir fait l'unanimité dans les rangs de la Nupes.
"J’éviterai de bosser avec lui", déclare ainsi une députée Nupes, "notre but ce n’est pas de mettre à mort une personne. Mais il y a un devoir d’exemplarité." Pour un autre parlementaire Nupes "cette réintégration est une insulte aux victimes de violences conjugales tant LFI a fait de la lutte contre ces violences l’un de ses principes fondamentaux".
"Cela fait 4 mois que je me lève et pars à chaque fois qu’il parle. Il est réintégré. Je considère désormais que ce n’est pas aux féministes de partir", a lancé la députée écologiste Sandrine Rousseau.
"S’il avait été socialiste il n’aurait pas été réintégré. Nous ne voulons pas qu’il occupe la moindre responsabilité au sein de la NUPES", a également assuré Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste.