"Il y a une forme d'amateurisme": Dominique de Villepin fustige les propos de Bruno Retailleau sur l'Algérie

Quand un ancien ministre de l'Intérieur tance le locataire actuel de la place Beauvau. Invité ce dimanche 23 février sur BFMTV, au lendemain de l'attaque au couteau qui a fait un mort et sept blessés à Mulhouse, Dominique de Villepin a estimé que les propos de Bruno Retailleau dénotaient "une forme d'amateurisme".
Samedi soir sur TF1, le ministre de l'Intérieur a indiqué que l'auteur présumé de l'attaque, un Algérien de 37 ans, était visé par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé Alger de ne pas l'avoir l'admis sur son sol "à dix reprises".
"Une fois de plus, j'ajoute que ce sont les désordres migratoires qui sont aussi à l'origine de cet acte terroriste", a estimé Bruno Retailleau. Le ministre de l'Intérieur plaide par ailleurs pour mettre fin à l'accord de 1968 entre la France et l'Algérie facilitant l'arrivée et la délivrance de titres de séjour aux ressortissants algériens.
Plus tôt dans la journée, Patrick Stefanini, le représentant spécial du ministre de l'Intérieur sur la question de l'immigration, a également jugé sur BFMTV que le moment était venu pour Paris "d'élever le ton" face à l'Algérie pour "changer la donne" et renégocier l'accord de 1968.
"La situation dans notre relation avec l'Algérie est inacceptable" et "nous ne pouvons pas ne pas trouver un terrain d'entente avec l'Algérie pour régler ces problèmes", a concédé Dominique de Villepin.
"Dire 'c'est la faute de l'Algérie', ça nous fait avancer?"
Mais aux yeux de l'ancien Premier ministre, "ce n'est pas ce que dit M. Retailleau qui peut infléchir la position des Algériens" et "la surenchère du durcissement ne règlera rien": "Dire 'c'est la faute de l'Algérie', ça nous fait avancer?"
Mettant en avant ses "40 ans d'expérience diplomatique", Dominique de Villepin affirme que "ce n'est pas en jouant le bras de fer" que la France parviendra à faire plier l'Algérie et "la scène publique" et le "20 heures de TF1" ne sont pas les lieux idoines pour tenter de le faire.
"La responsabilité politique, ce n'est pas aller dans le sens du vent, ce n'est pas d'aller de micro en micro alors qu'il faut tenir le manche de la République", a-t-il encore cinglé.
Dominique de Villepin considère que Bruno Retailleau outrepasse ses fonctions de fonctions de ministre de l'Intérieur en agissant ainsi et qu'il empiète sur les plates-bandes du Quai d'Orsay et de l'Élysée. "J'ai le sentiment que la question de la relation avec l'Algérie, c'est d'abord la responsabilité du ministre des Affaires étrangères et du président de la République", a-t-il glissé. "La politique étrangère, ce n'est pas la politique intérieure."