Grève à la SNCF: la gauche s'unit, la droite patiente

La grève de la SNCF débutera lundi, à 19 heures - Ludovic MARIN / AFP
À compter de 19 heures lundi, les cheminots de la SNCF entreront dans une grève qui devrait s’étaler jusqu’au 28 juin pour protester contre le projet du gouvernement de réformer la compagnie ferroviaire. Si le mouvement s’annonce très suivi dans les rangs de la SNCF, il est également soutenu par une frange importante de la classe politique.
À commencer par la gauche au sein de laquelle douze partis (Alternative Libertaire, EELV, Ensemble, Gauche Démocratique et sociale, Génération.s, Groupe Parlementaire France insoumise, NPA , Nouvelle Donne, PCF, PCOF, Parti de Gauche, République et socialisme) ont réaffirmé vendredi leur unité dans la mobilisation contre "la casse de la SNCF" qui préfigure, selon eux, celle de tout le service public.
"La casse de la SNCF ce n'est pas simplement le fait qu'on enlève du fer, du bois, des hommes. On est en train de disloquer la République", a ainsi affirmé Benoît Hamon, fondateur de Génération.s, lors d'une conférence de presse au centre de tri postal de la Gare de Lyon.
Isolé et discret, le PS soutient la grève
De son côté, Éric Coquerel, député de la France insoumise, estime sur notre antenne que "c’est le moment d’arrêter le projet d’Emmanuel Macron", même s’il conçoit que "ça va être dur pour eux (les cheminots)".
"Ce n’est pas évident de faire grève, il ne faut pas l’oublier. Ce sont des jours de travail non payés", rappelle-t-il.
Reste le Parti socialiste qui a été tenu à l’écart de l’initiative d’union des partis de gauche. Ce qui n’a pas empêché son nouveau secrétaire général, Olivier Faure, d’afficher sur France info une ligne claire en soutien aux cheminots. Exhortant le gouvernement à "arrêter de mettre un pistolet sur la tempe de tout le monde", il a affirmé soutenir "les grévistes et aussi les usagers, parce que ce mouvement n'a pas pour seule vocation de soutenir les cheminots, il a aussi pour vocation de soutenir une idée du service public".
Pour le reste, les voix socialistes, autres que celle de leur leader, demeurent extrêmement discrètes. Ce qui a pour effet d’entretenir le flou sur l’existence d’éventuelles dissensions internes à ce sujet.
Le FN appelle à "entendre" l'inquiétude des Français
De son côté, le Front national dénonce une "réforme en trompe l’œil" alors que Marine Le Pen a accusé sur France info Emmanuel Macron de se rendre "responsable d’une très grande régression". "Faire croire que c'est le statut des cheminots qui est à l'origine de la dette de la SNCF, ça, c'est un mensonge", a ajouté la présidente du parti frontiste.
Sur notre antenne, son porte-parole Sébastien Chenu a jugé que le "service public ferroviaire est en train d’être démantelé par le gouvernement". Et de poursuivre: "Demain, la privatisation des lignes va entraîner la fermeture, on le sait bien, des lignes qui ne sont pas rentables. Donc il y a des Françaises et des Français qui se mobilisent parce qu’ils sont inquiets et il faut l’entendre".
LR embarrassé
Chez les Républicains, l’heure est plutôt à la mesure. Sans approuver ouvertement la réforme du gouvernement, jugée trop frileuse, le parti de la rue de Vaugirard ne soutient pas le mouvement social, lui qui dénonce les syndicats qui "prennent les usagers en otages". Alors, LR dit "attendre de voir" ce que le gouvernement "propose concrètement" pour répondre "point par point" avec "des propositions".
Problème, ce positionnement ambigu est source de divergences au sein du parti. Deux de ses vice-présidents, Guillaume Peltier et Damien Abad, ont publiquement affiché leur désaccord sur la question de la réforme de la SNCF. Pour l'heure, le premier se prononce contre le texte du gouvernement, regrettant notamment l’absence de la question des retraites des cheminots dans le texte. "J'attends de voir les précisions du gouvernement. Les Français méritent mieux qu'une grande grève pour une petite réforme", a-t-il déclaré.
Le second avait qualifié la réforme de "courageuse et audacieuse", chez nos confrères du Figaro. Avant de préciser: "Nous sommes une opposition libre et responsable. Il n'y a aucune difficulté pour nous, quand les choses vont dans le bon sens, à le dire. La réforme du statut des cheminots, on l'a toujours voulue. Et parce que d'autres la présenteraient à notre place, on voterait contre?"
Reste que, dans l’ensemble, les Républicains déplorent un texte qui ne traite pas "les problèmes de fond" et n’hésitent parfois pas à parler de "réformette" même si la majorité d’entre eux reconnaît qu’elle va "dans le bon sens". Sans pouvoir se positionner clairement, la droite joue la carte de la discrétion en attendant les propositions concrètes du gouvernement.
La majorité ne veut rien lâcher
Face à l’opposition, la majorité fait bloc. "Je crois qu’il faut vraiment prendre conscience des difficultés de la SNCF aujourd’hui. La SNCF, elle a un coût considérable, une dette insoutenable et un réseau extrêmement vétuste", détaille sur notre antenne Jean-Baptiste Djebbari, député LaRem et rapporteur de la loi ferroviaire.
"Le gouvernement s’est engagé sur un certains nombres de choses et la concertation continue. Je trouve assez dommage de faire cette grève de très longue haleine", regrette pour sa part Erwan Balanant, député Modem du Finistère.
Si le secrétaire d’État aux relations avec le Parlement, Christophe Castaner, a reconnu "craindre le blocage", il a prévenu que le gouvernement ne "reculera pas". "Nous tiendrons", a également promi le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.