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Démission de Cahuzac: une victoire pour Mediapart

La une de Mediapart, quelques heures après la démission de Jérôme Cahuzac.

La une de Mediapart, quelques heures après la démission de Jérôme Cahuzac. - -

Le site internet d'investigation Mediapart voit son enquête reconnue après l'ouverture d'une information judiciaire contre Cahuzac, et sa démission.

La démission de Jérôme Cahuzac du gouvernement à la suite d'une affaire lancée par des révélations de Mediapart sonne comme une victoire pour le site internet, qui a toujours défendu le sérieux de son enquête et son indépendance vis-à-vis des pouvoirs de droite et de gauche.

La justice a estimé mardi que le ministre du Budget était probablement celui qui reconnaissait avoir détenu un compte en banque en Suisse, dans un enregistrement révélé par Mediapart. Peu après, François Hollande a décidé de mettre "fin aux fonctions de Jérôme Cahuzac, à sa demande" et de le remplacer au Budget par Bernard Cazeneuve, actuel ministre des Affaires européennes.

"Notre seule satisfaction, c'est de voir reconnue la qualité de notre travail de journalistes. Depuis des mois, on est sous les feux croisés d'une partie de notre profession, ce qui est extrêmement désagréable. C'est une excellente nouvelle de voir que notre travail de journalistes débouche sur la mise en place d'une enquête indépendante, ce qu'on demande depuis le début", a commenté François Bonnet, rédacteur en chef de Mediapart.

De son côté, Edwy Plenel, cofondateur de Mediapart, n'a pas caché sa joie de voir le travail de ses journalistes reconnu. Le parquet "confirme ligne par ligne l'ensemble des informations mises sur la place publique par Mediapart. Il conclut logiquement à ce que nous avions dit, c'est-à-dire qu'il fallait une information judiciaire pour mener des investigations internationales", s'est-il félicité, avant de commenter sur Twitter: "L'affaire Cahuzac montre l'utilité de Mediapart, de ses enquêtes, de sa liberté". Et d'appeler dans la foulée à s'abonner au site, payant.

Un tableau de chasse impressionnant

Ce rebondissement conforte le site internet d'information qui, vilipendé sous l'ère Sarkozy pour sa proximité supposée avec la gauche, a toujours défendu son image de contrepouvoir indépendant.

"Mediapart était indépendant sous la droite, il l'est aussi sous la gauche", avait récemment déclaré Edwy Plenel, pour les cinq ans du site. Peu après sa création, à l'été 2008, le site avait mis au jour les possibles illégalités du jugement arbitral favorable à l'ancien homme d'affaires Bernard Tapie et l'implication de l'ex-ministre de l'économie Christine Lagarde accusée d'avoir trouvé un arrangement à l'amiable avec lui dans ce dossier.

Suivent, en septembre 2008, des révélations sur l'affaire Karachi, un éventuel détournement de commissions sur des contrats d'armement avec l'Arabie Saoudite et le Pakistan au profit de la campagne présidentielle d'Edouard Balladur en 1995, dont l'enquête a récemment été étendue à des faits de blanchiment aggravé de 1993 à mars 2012.

La fracassante affaire Bettencourt

A partir de juin 2010, le site s'attaque à l'affaire Bettencourt, du nom de l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt, un dossier d'abus de faiblesse devenue affaire d'Etat. Plusieurs mises en examen sont depuis intervenues, dont celle à deux reprises de l'ancien ministre Eric Woerth, trésorier de la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007.

En juillet 2011, c'est encore Mediapart qui publie des documents tirés des archives de l'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine, mis en examen dans le volet financier du dossier Karachi, mettant peu à peu au jour les relations occultes liant ce marchand d'armes au premier cercle de Nicolas Sarkozy.

Mediapart est contrôlé actuellement par trois groupes d'actionnaires: les fondateurs, les amis de Mediapart et des "investisseurs-partenaires", liés entre eux par un pacte qui expire en 2014. Avec près de 65.000 abonnés, 6 millions d'euros de chiffre d'affaires et 700.000 euros de résultat net, l'année 2012 est la deuxième année bénéficiaire pour Mediapart.


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A. G. avec AFP