Comment Blanquer s'est imposé comme pilier du gouvernement

Jean-Michel Blanquer mercredi lors de la présentation de sa réforme du bac. - Stéphane de Sakutin - AFP
C'est la semaine de Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l'Education a présenté mercredi sans fracas sa réforme du baccalauréat. Ce jeudi, il est l'invité de l'Emission politique de France 2. Tout en retenue, le ministre gagne du poids politique.
> La discrétion
Le ministre, ancien recteur et directeur général de l'enseignement scolaire, est arrivé discrètement à son poste rue de Grenelle. Inconnu du public, il s'est installé "en donnant l'impression de maîtriser son sujet, sans non plus donner l'impression d'avoir réponse à tout", se souvient Bernard Sananès, président de l'institut d'opinion Elabe.
Pas de sorties tonitruantes ni de provocation. Loin de certains de ses prédécesseurs, Jean-Michel Blanquer se fait discret. Il prend garde de ne pas froisser pas ses interlocuteurs, et multiplie les projets de réforme: les classes de CP dédoublées, la réforme du bac, et l'installation de Parcoursup pour remplacer le système post-bac. Dans le même temps, il s'entoure de personnalités de tous bords, dont certaines sont issues de la société civile.
> Pas d'idéologie
A l'image d'Emmanuel Macron, Jean-Michel Blanquer ne se réclame pas non plus d'étiquettes politiques. Il n'est pas idéologisé et le revendique. "Je suis convaincu que l'éducation n'est pas un sujet de clivage gauche-droite", confiait-il au Monde. "Elle se situe au niveau le plus haut, celui des valeurs".
Depuis son arrivée au gouvernement, il évoque régulièrement ces "valeurs" et revendique le "retour à l'autorité", aux "valeurs fondamentales de l'école". "C'est quelque chose qui fait consensus", estime Bernard Sananès. Le besoin du retour à l'autorité est partagé par 6 Français sur 10, selon Elabe.
Au passage, il s'adresse à l'électorat de droite, et se construit en opposition à l'action de sa prédécesseure, Najat Vallaud-Belkacem. "Blanquer, c'était la bonne nouvelle du gouvernement pour la droite, qui détestait Vallaud-Belkacem", rappelle Jérôme Sainte-Marie, de l'institut Pollingvox. "Au gouvernement, il remplit une fonction qu'Emmanuel Macron a du mal à remplir: le conservatisme sur le plan scolaire." A gauche, les attaques sont rares et proviennent principalement de la France insoumise, qui l'accuse de mettre en place une sélection pour l'entrée à l'université. C'est d'ailleurs le député LFI Alexis Corbière qui débattra face au ministre sur France 2.
> Un contexte favorable
Jean-Michel Blanquer bénéficierait-il aussi d'un alignement des planètes? Le contexte lui est en tout cas favorable. Il arrive rue de Grenelle au moment où les syndicats sont affaiblis. Malgré des critiques de la France insoumise au sujet de sa réforme du bac et de Parcoursup, les lycéens et les étudiants se mobilisent peu. Les appels à manifester ont été peu relayés. "Il arrive au moment où les ressources idéologiques de la gauche universitaire sont épuisées", estime Jérôme Sainte-Marie. "Et ainsi, il solde les comptes de la période précédente".
> Le défi de l'opinion publique
Si Jean-Michel Blanquer a le vent en poupe, il lui reste toutefois un défi de taille à relever: celui de l'opinion publique. S'il concentre peu d'opposition contre lui de la part du monde de l'Education, il n'emporte pas pour autant une réelle adhésion du public: "or l'Education nationale, c'est un sujet grand public!", rappelle Bernard Sananès.
Selon Elabe, il ne bénéficie "que" de 18% d'opinions favorables contre 29% d'images négatives. Et surtout, la même étude relève que 53% des sondés ne se prononcent pas à son sujet: "Il n'est pas encore identifié, et beaucoup attendent encore de voir ce qu'il va faire". Son passage à l'Emission politique devrait lui permettre de se faire mieux connaître, voire de s'exprimer sur d'autres sujets que l'Education. La laïcité, le service national, la formation... Des sujets brûlants, sur lesquels Emmanuel Macron pourrait avoir besoin de soutien.